Traduction: Adélaïde Pralon
Ren, Los Angeles, 2010
James, Twentynine Palms, 2006
Blake, Wonder Valley, 2006
Tony, Los Angeles, 2010
Britt, Twentynine Palms, 2006
Pas d’unité de lieu, de temps, on navigue avec plusieurs personnages dans des années différentes et des lieux variants. Pour la majorité ils sont dans un brouillard existentiel, vers une quête de vérité ou de solution. Car ils semblent marqués par l’impériosité de rattacher les wagons afin de donner une cohérence à leur vie, ne plus se mentir. Dans cette recherche ils feront face à leur conscience pour y trouver l’échappatoire de parcours cabossés. Ils se donnent les moyens d’y parvenir en extrayant le substrat vital de destinées bien trop souvent hantées par la crédulité ou la naïveté.
«Blond, athlétique et complétement nu, il court sur l’autoroute au milieu des embouteillages du matin à Los Angeles. Comme s’il n’attendait que ça pour s’arracher à un univers trop lisse, Tony, un avocat, quitte brutalement sa voiture pour le suivre. La poursuite de cet étrange coureur l’entraîne du côté sombre de la Cité des Anges, là où tous les déglingués de la vie semblent s’être donné rendez-vous. Britt, porteuse d’un lourd secret, et un temps réfugiée dans un ranch aux allures de secte en plein désert des Mojaves. Ren, ex-taulard et graffeur à la recherche de sa mère. Blake, dealer tourmenté qui veut venger la mort de Sam, son partenaire de galère… Parce qu’il s’est mis en danger, la carapace sociale de Tony se fissure, annulant la distance qui d’ordinaire le sépare des gens qui peuplent les rues crasseuses de Downtown. Et à travers son regard, qui pourrait être le nôtre, se déroulent les destins singuliers de ces personnages en rupture qui un jour, sans s’en rendre compte, ont emprunté la mauvaise route… »
Ivy Pochoda née à Brooklyn où elle a vécu jusqu’en 2009, vit désormais à Los Angeles. Son premier roman « L’autre côté des docks » fut lauréat du prix Page-America en 2013.
De par cette écriture kaléidoscopique, Ivy Pochoda, nous laisse des images défiler avec des interstices de libre interprétation. J’y ai retrouvé du Jérôme Charyn dans ce foisonnement d’esprit retors aux conventions et aux conformismes. C’est une des forces de ce roman noir à facettes; facettes des profils psychologiques, facettes d’idéaux naïfs, facettes du déterminisme intransigeant, facettes de ruptures tensionnelles. C’est muni de ce stylo dague que l’auteur délivre ses phrases assassines, assène les coups brutaux qui intensifient le côté morose des personnages présentés.
Ils n’évolueront pas forcément dans un monde lumineux ou doué d’une couleur chatoyante, or le livre d’inflexion, de point d’achoppement, où le sens, sa recherche, de leur vie est devenu central. Primordial, voire vital pour leur permettre d’avancer , ils enjambent les obstacles, font fi des a priori, laissent sur le bas côté des valises pleines de souffrances.
Route 62 est la lumière, est le phare d’âmes égarées cherchant une rédemption. Elle est loin d’être rectiligne et nous fait parfois errer vers des méandres obscures. Mais la chaleur stylistique nous tient à l’écart de tout excès turpide.
Captivant!
Chouchou.
Autant il me tente, autant l’errance me fait peur. Crainte de m’y perdre?
Il est vrai que la déconstruction de la trame peut déranger sur un certain nombres de paragraphes, franchi ce palier on entre dans l’ouvrage avec l’ensemble des protagonistes. L’errance n’en est pas réellement une, c’est bien plutôt une volonté de retrouver ses racines, son vecteur d’existence.