Stéphane Pair est un journaliste que l’on peut écouter sur les ondes de France Info lors de certaines affaires de justice ou faits divers. On l’avait découvert lors de son premier roman Elastique Nègre en 2017. Il y faisait un portrait fidèle, crédible de la Guadeloupe au sein d’une intrigue policière efficace.

Lié familialement aux Antilles, l’auteur est resté dans la Caraïbe pour nous raconter certaines des pages les plus noires de Haïti. Première république noire libre en 1804, le pays a connu depuis une histoire chaotique rythmée par des catastrophes climatiques (séismes, cyclones) et par les agissements des gouvernants provoquant misère, corruption, coups d’état, répression, élimination de l’opposition, vacance du pouvoir… De toutes ces apocalypses, la plus terrible peut-être, la plus représentative de l’horreur vécue par la population haïtienne est peut-être la période de 1957 à 1986, dates du règne de la famille Duvalier père et fils surnommés aimablement et faussement « Papa Doc » et « Bébé doc » qui ont instauré une dictature avec comme bras armé, les funestes « tontons macoutes » chargés des basses œuvres, tueurs masqués officiels des tyrans.

« 1971, Haïti. Rosalie Adolphe est certainement la femme la plus puissante du pays. Au service du président François Duvalier, elle traque sans pitié les opposants au régime, allant jusqu’à participer à de véritables massacres comme celui dans lequel la famille Sansaricq a perdu la vie.


1986, Sybille est la dernière survivante de la famille Sansaricq. Membre de la rébellion, elle cherche à se venger des miliciens qui ont brutalement tué les siens, vingt ans plus tôt. Accompagnée de Jacques, un trafiquant dont elle est éperdument amoureuse, elle est décidée à mettre fin au régime violent des Duvalier et à libérer Haïti. »

Basé sur le portrait de deux femmes que tout oppose mais liées par un drame, Furie caraïbe est un roman tout à fait recommandable pour toute personne qui s’intéresse à Haïti et à son chemin de croix de territoire abandonné des dieux. La plume appliquée de Stéphane Pair s’avère judicieuse pour nous montrer la sale réalité de l’époque, les combats perdus, les luttes désespérées des Haïtiens comme la répression aveugle des opposants, l’outrance, la violence du régime des Duvalier.

Sans trop insister avec le cadre historique, Stéphane Pair construit une intrigue addictive, faisant monter progressivement un suspense qui connaîtra son apogée lors de la rencontre des deux personnages principaux, Sybille, le dernier membre d’une famille assassinée par les tontons macoutes et Rosalie chef de cette milice, tout en montrant très justement le combat vers la liberté d’anonymes mais aussi des futurs dirigeants comme un certain père Aristide.

Clete.