Vous avez déjà peut-être rencontré Christophe Levaux dans votre parcours livresque : La disparition de la chasse chez Quidam puis Le tas de pierre chez Cambourakis associé à sa sœur Aurélie. Enfin pour les amoureux de zik, on retrouve l’auteur chez Densité pour un ouvrage sur Rage against the machine. Cinq ans plus tard, il reprend la plume pour conter les heurs et malheurs du couple, sujet très hype ces derniers temps mais aussi très casse -gueule si on ne le fait pas avec talent et sensibilité.

“Lorsqu’il rencontre Sophie, c’est comme si elle illuminait subitement le monde. Avec elle, le passé moche s’efface : l’adolescence morose, les foirages amoureux, la sensation de n’être nulle part à sa place, les cris à la maison… Même le quotidien semble prendre de la distance : le travail idiot, l’ennui, la ville grise dans la province à l’abandon. Quand il s’observe dans le miroir, il semble que Sophie l’illumine, lui aussi.

Mais le temps passe, la romance s’effiloche, et on dirait que ça n’a cessé de germer, comme une plante toxique : la laideur, revenue au galop.”

Voilà, vous êtes fixés sur un sujet qui, je le répète, peut être le théâtre de magnifiques ratés si, dès le départ, une partie de vous ne s’intéresse pas vite au sujet et aux acteurs de cette mauvaise comédie humaine, finalement, si ordinaire. Tous ces drames que des couples affrontent et qui se terminent mal comme l’actualité nous le rappelle si souvent. Il est indéniable que l’opportunisme de certains auteurs se décèle rapidement, et si le roman se résume à la narration d’une tragédie prévisible, on n’a pas forcément envie de finir le voyage.

Ici, en introduisant, un footballeur belge de la fin des années 90, idole des jeunes avec un côté sombre très violent, on sent d’emblée que l’auteur a vraiment posé une réflexion, des pierres à son édifice, qui, malgré sa brièveté, laisse et laissera des traces.

Monologue, témoignage du bourreau, le roman raconte l’enfance morose et quelconque, les modèles masculins, footballeur connu et père, que l’âge adulte déboulonne méchamment, l’entrée précipitée dans la vie adulte comme une porte de sortie à défoncer pour voir plus beau.

Vient ensuite la rencontre, la passion, l’amour mais on le sait bien “Les histoires d’amour finissent mal en général”, heureusement qu’elles ne connaissent pas toutes la même issue. Petit à petit apparaissent les premières petites maladresses, les premières querelles, les premières incompréhensions, les premières erreurs et enfin les premiers coups… Au fur et à mesure, on tente de se persuader qu’ils sont trop beaux, trop intelligents, trop jeunes pour tomber dans le sale, le moche, le sang. Las !

Avec beaucoup de pudeur mais aussi un humour particulièrement roboratif, enfin au début de l’histoire, Christophe Levaux fait mal, montrant les affres du malheur, l’incompréhension, les rêves brisés, le sentiment de vacuité de l’existence, les blessures de l’enfance non cicatrisées et surtout le tableau affligeant de sa propre misère que renvoie le regard de l’être aimé. Christophe Levaux ne cherche pas à expliquer les violences conjugales mais donne des pistes pour approcher peut-être l’origine de cette colère, de cette haine et de la violence qu’elle entraîne malheureusement, hélas à la mesure du gouffre où on est tombé.

Histoire au sujet très malaisant, Baisse ton sourire au titre assassin et au traitement juste, pudique, du malheur d’un couple vaut vraiment un détour certes périlleux.

Clete.