
« Êve est une sirène professionnelle qui nage dans les plus grands aquariums du monde. Mais personne n’imagine la femme brisée, fracassée, que cache sa queue en silicone. Quelqu’un lui a fait du mal, tellement de mal, et il faudra un jour rééquilibrer les comptes.
En attendant, de Genève à Tokyo, de Brisbane à Dubaï, elle sillonne la planète, icône glamour et artificielle d’un monde fatigué par le trop-plein des désirs. »
On suit Joseph Incardona depuis de nombreuses années maintenant et chacun de ses romans s’avère un régal. Grand défenseur des humbles, des bousillés, des oubliés du libéralisme cannibale, des victimes du système dont tout le monde se fout, le Suisse nous raconte des destins tragiques mais surtout la résistance de ces personnes qui affrontent le grand capital broyeur d’existences. « Homme à femmes » depuis quelques années, Joseph Incardona fait d’elles les héroïnes modernes qui ne lâchent rien dans l’adversité, de belles rebelles qui se lèvent, luttent seules pour un avenir meilleur. Dans les plus récentes parutions, on pourra citer les magnifiques Les corps solides de 2022 et Stella et l’Amérique de 2024, ses deux derniers romans. Le monde est fatigué est donc une nouvelle variante de « la lutte des classes » avec l’histoire d’une femme flinguée par la vie, la connerie, le fric roi. Mais ici, pas d’apitoiement, on a presque brisé Eve mais surtout on a fait de la jeune femme une guerrière que personne ne pourra arrêter dans sa quête.
« Parce que dans rêve, il y a Êve. »
Alors, les fans dont je suis, trouveront peut-être que le garçon tourne un peu en rond, que peut-être cette histoire comme les réflexions sur l’époque qui l’accompagnent ont déjà été écrites par le Suisse. « Ce n’était pas mieux avant. C’est pire maintenant. » Bien sûr, on a déjà senti la rage et la colère sous-jacentes chez le Suisse mais pourtant, il faut le reconnaître, on ne l’en lasse pas. Comment en vouloir à ce brillant avocat des filles, des femmes, des mères, ces victimes depuis l’aube des temps? … Les nouveaux lecteurs, eux, seront certainement impressionnés par la patte de l’auteur, le pouvoir émotionnel dégagé par ce roman.
On n’en dira pas plus faisant ainsi l’économie de certaines péripéties à l’image d’un auteur un tantinet paresseux parfois à nous dévoiler les détails du décor. La guerre d’Êve s’avère instantanément addictive et le final, démentiel, politiquement jouissif emporte tout, merci beaucoup Joseph Incardona !
Redoutez le chant des sirènes…
Clete.
PS: De Joseph Incardona également chez Nyctalopes:
STELLA ET L’ AMÉRIQUE, DERRIÈRE LES PANNEAUX IL Y A DES HOMMES, LES CORPS SOLIDES, LONELY BETTY, 220 Volts, CHALEUR, LA SOUSTRACTION DES POSSIBLES.









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