Mertvecgorod, tournant de l’an 2000.
Pour fuir une misère à laquelle ils sont socialement prédestinés, cinq ados noient leur lucidité dans toutes les drogues possibles et une bande-son pop, punk et indus russe des années 1980-90, romantique et rebelle.
Mais l’assassinat de leur voisine Valentina, vieux travesti à la vie mystérieuse, va révéler une ombre bien plus dangereuse que leur petite délinquance ordinaire.
Un roman qui me paraissait plein de promesses que ce Valentina (sous titré Un demi siècle de merde) de Christophe Siébert publié chez au Diable Vauvert. Non pas que je connaisse l’auteur et son oeuvre, récompensé du prix Sade (une petite pensée au passage pour la dernière lauréate Charlotte Bourlard appréciée chez Nyctalopes) pour son roman Métaphysique de la viande, mais ce que j’ai pu apprendre après recherches ne manquait pas d’arguments pour me convaincre de lire Valentina. C’est donc pour moi une découverte. En tant qu’objet, le livre est soigné, très beau. Et l’éditeur fait référence à Blade Runner, parle de « postsoviétisme apocalyptique et décadent », en bref ce qu’il faut pour me parler. Le résumé, lui, se veut un peu cliché. Pour autant, l’un dans l’autre, je reste curieux. Ai-je bien fait ?
On le comprend vite, ce n’est pas la belle vie pour nos cinq ados. Une petite bande paumée dans un monde à la dérive où la misère est leur quotidien. Ça se drogue, ça écoute de la musique, ça fait la teuf et ça n’a que peu de perspectives d’avenir. Et puis il y a ce meurtre qui arrive et qui ne les laisse pas indifférents, tout particulièrement Klara, 15 ans, l’ado la plus présente dans le roman, qui a la bonne idée d’aller visiter les lieux du crime peu de temps après que le corps de la victime ne soit enlevé. Mauvaise idée. Elle laisse des traces. Il y a une enquête. Le flic qui enquête, Tomas, bien plus âgé qu’elle, n’est pas très clair non plus et a un passif amoureux avec Klara. Dès lors Klara se retrouve prise dans un étau, perturbée par ses sentiments et la tournure que prennent les évènements. Une intrigue un peu simpliste, que rien n’arrive à rendre très passionnante, ni convaincante.
Il faut dire ce qui est, les personnages sont si caricaturaux et l’histoire si prévisible, que j’ai peiné à lui trouver une quelconque légitimité. L’écriture, si néanmoins très fluide, ne se prive d’aucun cliché. Elle se veut rock’n’roll, provocante et j’en passe, mais c’est si poussif et artificiel, qu’on peine à croire que le livre est écrit par un auteur adulte ou pour un lectorat adulte. S’il est certes question d’adolescents, j’ai surtout eu l’impression de lire un roman pour adolescents écrit par un adolescent. Était-ce le but ? Si tel était le but, on peut excuser bien des choses, voire même plus largement comprendre, mais en tant que roman adulte, c’est bien trop léger et peu crédible. Les références musicales s’enchainent, tout comme les références franchement naïves aux drogues, ou le vocabulaire gentiment et surtout gratuitement vulgaire. Plutôt que d’enrichir le texte, tout cela semble combler une sorte de vide et il ne reste que peu de choses à quoi se raccrocher. Bien heureusement, c’est un roman facile à lire, sur lequel on ne bute pas, ce qui sauve un peu l’expérience de lecture mais ne suffit pas. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir eu envie d’aimer.
Plutôt qu’un mauvais livre, Valentina est avant tout une occasion manquée. A qui est-il supposé s’adresser ? Si celui-ci avait été vendu comme une roman noir à destination des ados, voire des jeunes adultes à la fibre romantique et rebelle, j’aurais pu lui trouver des arguments positifs mais, en l’état, c’est bel et bien une vive déception. Je n’ai pas été embarqué une seule seconde et définitivement pas convaincu par cette écriture trop légère dans le propos et trop lourde dans la forme. Qui de l’auteur ou de moi devrait retourner prendre de la drogue ? Je ne saurais dire, même si j’ai mon idée sur la question. Quitte à me shooter à la littérature, va falloir que je choisisse un peu mieux mes produits.
Brother Jo.
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