Traduction: Philippe Garnier

Originellement titré Dog Soldiers, Les Guerriers de l’Enfer, en 1974, lauréat du National Book Award en 1975 et adapté pour la toile trois années plus tard par Karel Reisz, ce roman décrit le pays à la bannière étoilée qui ne réfère plus à ses valeurs. Il est une version d’une Amérique désenchantée, sortant de ce conflit vietnamien, en exposant au monde des stigmates profondes, traumatisantes.

Robert Stone est un ancien correspondant dans cette guerre pas comme les autres et il construira patiemment son roman durant six années durant son séjour londonien.

«Saigon. La guerre du Vietnam touche à sa fin. Un journaliste, Converse, confie un paquet d’héroïne à Hicks, un Marine. Celui-ci doit livrer la drogue à Marge, la femme de Converse, en Californie. De retour aux États-Unis, Converse découvre que Marge et Hicks ont disparu avec la marchandise. Il est enlevé par des agents fédéraux aux méthodes peu orthodoxes. Leur folle course-poursuite se terminera tragiquement dans le désert du Nouveau-Mexique. »

De ce trafic de stupéfiants depuis le Vietnam, l’auteur ramène bien une désillusion, une amertume suivant les aspirations beatniks. C’est ce dont fait état ce roman commençant tranquillement et se poursuivant tel un thriller, pour se conclure sur un retentissant “marche ou crève” dans le désert du Nouveau-Mexique. Tout comme il est ardu de faire preuve d’une réelle empathie envers les combattants d’un conflit armé quand soi même on n’y a pas participé, il apparaît probablement qu’il faut avoir vécu aux States à cette époque pour saisir la justesse de ton affichée par Stone.

De ses phrases consciemment empesées, il présente le contexte avec une ironie non feinte mais conserve cette volonté de morale et de voyeurisme, qui pourrait sembler antagoniste mais qui, bel et bien, fait montre d’une orientation précise, déontologique. De part ses deux personnages principaux, Converse et Hicks, il renvoie dos à dos deux personnalités contraires en marquant le courage et la prise de décision du second manquant cruellement au premier. On pourrait d’ailleurs se poser la question si le personnage central n’est pas Hicks, celui par qui les destinées des acteurs sont bouleversées.

Certains pourraient y voir un négatif des livres de Kerouac, sans le sentimentalisme bien que Stone démontre son indulgence face à ses personnages perdus, il ne se veut pourtant pas cynique ni pervers.

Stone était un photographe littéraire se son époque et un dialoguiste hors pair. D’aucuns y verraient un chef d’oeuvre et je ne suis pas loin de le penser mais est-ce que ce terme signifie quelque chose?

Belle découverte!

Chouchou