Chroniques noires et partisanes

ENTRE HOMMES de German Maggiori / La Dernière Goutte

Traduction: Nelly Guicherd.

Il faut bien reconnaître que décembre au niveau des sorties, ça sent vraiment la fin de saison. Attention, la qualité est encore parfois présente mais on est très loin de l’euphorie de la fin de l’été ou du début d’automne. Aussi, c’est parfois l’occasion de lire des bouquins qui ont été encensés plusieurs mois auparavant dans des chroniques qui ont pu faire saliver. Et pour celui-ci j’avais lu au moins deux chroniques qui faisaient envie de la part de gens dont l’avis m’importe. Auréolé d’un bandeau le vantant comme le meilleur polar argentin de tous les temps qui éveille chez moi bien peu de choses car l’Argentine n’est pas pour moi une grande terre de polars sans vouloir vexer le peuple argentin et de références à Ellroy ou Thompson que j’ai bien eu du mal à trouver dans la lecture, « Entre hommes » est un putain de bon polar qu’on a vraiment envie d’offrir à ses amis adeptes du genre, pas loin d’entrer dans mon TOP 10 de l’année.

« Dans un luxueux appartement de Buenos Aires, un sénateur, un juge et un banquier se retrouvent pour participer à une orgie en compagnie de deux travestis et d’une jeune prostituée. Mais l’affaire tourne mal : la jeune prostituée meurt d’une overdose en pleine action. Or, toute la scène a été filmée par une caméra dissimulée derrière un faux miroir et la vidéo compromettante a disparu. C’est alors qu’entrent en scène deux flics, l’un obsessionnel, l’autre ex-tortionnaire alcoolique, chargés de retrouver l’enregistrement, deux voleurs prêts à tout pour parvenir à leurs fins et une bande de jeunes drogués embarqués bien malgré eux dans cette histoire. »

Tout d’abord une petite citation prouvant que le titre du roman « Entre hommes » est fort à propos tant la gente féminine est absente du roman dans le meilleur des cas ou vilainement malmenée dans certains autres cas et finalement peu présente dans un décor digne de la « Cour des Miracles » d’un roman gonflé à l’excès à la testostérone, la came et l’adrénaline.

« Elle avait à peu près le style d’un épouvantail qui serait passé sous un tracteur et se serait ensuite fait chier dessus par une meute de loups ayant la diarrhée. » Voilà, vous êtes tous prévenus, la poésie n’a pas cour ici à moins que vous voyiez dans cette métaphore des traces de lyrisme.

« Entre hommes » est avant tout un polar bien burné avec une histoire qu’on a déjà lu si souvent sous d’autres latitudes : la partie fine qui dérape, des notables et des politiciens sans foi ni loi autre que le pouvoir, l’urgence de l’enquête confiée à deux flics, véritables pourritures formant un couple magique «bad cop, bad cop », une traque dans les quartiers louches d’une ville en l’occurrence ici Buenos Aires et sa périphérie… Donc ces ingrédients ne suffisent pas à rendre le bouquin mangeable à coup sûr tant ce genre de sujet a déjà été si souvent traité et il m’en faut quand même un peu plus pour m’émouvoir réellement. German Mangiorri a du talent, il en a à revendre parce que le cocktail  bouffonneries, humour glacial et violence extrême est absolument jouissif tout au long d’une histoire sans temps morts mais avec certaines épisodes déchaînés vécus ou tout simplement suggérés particulièrement addictifs et barbares. Et on craint vraiment pour certains personnages tant la violence est exacerbée par la sauvagerie de flics bien pires que les truands.

« Entre hommes » est aussi un roman qui a le bonheur de montrer certains pans peu reluisants mais aussi très attristants d’une société argentine bien vérolée comme on le voit en de multiples exemples  et dont le symbole le plus visible est cette police locale qui n’a franchement rien à envier à son homologue mexicaine en matière de corruption. Pas de références à la dictature pour une fois dans un roman argentin et cela fait du bien un peu, non juste une société où les jeunes ne semblent pas avoir d’avenir et tentent de changer leur vie par des procédés négatifs qu’ils trouvent, eux, positifs pour leur existence

Et en 370 pages de folie, on balance entre rire, horreur, effroi et surtout passion parce que je ne vois pas comment un amateur de noir pourrait ne pas trouver son bonheur dans un tel polar totalement halluciné et hallucinant.

Furieusement bon!

Wollanup.

2 Comments

  1. Guillome

    tu me donnes l’eau à la bouche, je l’avais repéré celui-ci. j’ai prévu de le lire d’ici peu!

    • clete

      C’est dur comme bouquin,limite gore par moments mais c’est vraiment un super polar décoiffant grâce au talent de l’auteur et surtout son humour glacial.Vraiment Rock n’ Roll. Pour les vrais fans de noir.

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