Three Burials

Traduction: Claro

Trois enterrements est le premier roman du dramaturge Anders Lustgareten dont la pièce Lanpedusa a été jouée dans quarante pays. Cette attention à la tragédie des migrants s’avère le principal moteur de ce roman.

« Comment Cherry, infirmière et mère de deux enfants, s’est-elle retrouvée en cavale au volant d’une décapotable rose, flanquée d’un policier menotté et du cadavre d’un réfugié assassiné ? Dans quelle quête pour la justice s’est-elle embarquée ? À ses trousses, un inspecteur de police raciste et enragé… Mais que peut bien faire d’autre une femme dotée d’une conscience dans l’Angleterre d’aujourd’hui ? »

Fan de « Thema et Louise », Cherry s’embarque dans une histoire totalement barrée, on l’aura compris à la quatrième couverture et vous le découvrirez très bien par vous-même. Disons seulement : Cherry ne s’est jamais remise du suicide de son fils et croit reconnaître ses traits, un matin d’ivresse, sur le visage d’un môme qui a traversé une partie de l’Afrique, survécu à l’enfer lybien pour traverser la Méditerranée et finir rejeté, mort, sur une plage de la Manche. Et c’est le début d’un gros bordel…

Etrange roman qui en surprendra plus d’un, racontant de manière très humaine, à hauteur d’homme, le drame des migrants qu’il habille d’un humour particulièrement noir, limite gênant parfois, de manière délibérée et totalement assumée. Se lisant très rapidement, Trois enterrements fait particulièrement bien le taf d’un Noir qu’on apprécie, franc, direct, garanti sans aucun filtre. Certes, ce roman n’est pas exempt de quelques faiblesses notamment dans ce désir d’épouser de trop nombreux thèmes qui tiennent à cœur au primo- romancier et Trois enterrements s’avèrera surtout maladroit en mettant en parallèle l’enfer des migrants et le mal être, le mal vivre des jeunes Anglais.

Néanmoins, le roman ouvre pas mal les yeux sur la tragédie vécue par ces gamins qui n’ont, de toute manière, rien à perdre… sauf la vie mais n’est-ce pas leur ordinaire depuis la naissance ? Eminemment politique, soulignant un côté sombre du Royaume Uni que confirme l’actu récente de la perfide Albion, Trois enterrements percute, atteint sa cible et peut être rangé à côté des romans de Joseph Incardona par exemple. On y retrouve cette rage contenue, cette colère froide devant le devenir de l’humanité, cette volonté de montrer les « invisibles » et un humour vachard particulièrement bien senti voilant un temps la tristesse, la peine. Lustgarten a choisi le combat, la lutte avec ses armes et peu importent les quelques imperfections, le message passe.

« Quand tout changement possible venant d’en haut est exclu, quand le pouvoir n’est que malveillance, que faire ? On se replie sur soi ? Ou on va chercher les autres et on se bat ? »

Clete.