Chroniques noires et partisanes

Étiquette : rural noir

Un job pour le weekend!

Quand vous avez un pote qui sort un roman, malgré les avis sur le net, malgré les photos de libraires montrant l’exposition du bouquin dans leurs rayons, vous ne pouvez  vous empêcher d’être animé de suspicion et de vouloir constater de visu comment le job a été fait dans votre ville.

Ce samedi, je suis donc rentré dans la version locale d’une grande enseigne bien connue de Benoît pour voir comment était présenté « Rural Noir »…

Le bouquin était bien là, (Mouais! je rendrai un rapport bien plus complet au principal  intéressé).

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Comme l’exposition ne me convenait pas, j’ai refait le présentoir pour qu’il montre plus facilement au passant quel livre choisir et masquer ainsi une certaine daube auréolée d’un coup de cœur

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Ne restait plus qu’à indiquer le bon roman à acheter, hélas, sans mon argument de vente préféré, ma batte « Louisville Slugger 300 » refusée par la sécu du magasin.

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Bon si j’étais resté dix minutes de plus, je pense que j’aurais pu commencer à signer les autographes à la place de l’auteur tant les badauds étaient surpris par cet impromptu d’un type déguisé en bouseux ricain avec casquette des Cardinals de Saint Louis, tee redneck avec  dixie flag et gros ceinturon.

Si toi aussi tu veux aider ton libraire un samedi après-midi de grande affluence, n’hésite pas à venir, comme moi avec Raccoon, accompagné d’une personne dont le charme aura beaucoup plus d’effet que le tien pour tenter d’amadouer la sécu et la responsable du rayon bien dubitatifs devant ta tronche et ne parvenant pas réellement à percevoir l’urgence nécessaire de ta quête et surtout… prie pour ne pas avoir été reconnu par des relations du boulot.

A sa demande expresse, j’attendrai la venue du Boss d’Unwalkers déguisé en cowboy version « Lone Ranger » pour faire les autres librairies de la ville.

Rockn’read!

Wolanup.

PS: une nouvelle chro aujourd’hui de Rural Noir par JOB, un auteur chroniquant un de ses pairs.

RURAL NOIR de Benoît Minville/SN.

Chroniquer le roman d’un pote n’est vraiment pas chose aisée et j’ai déjà revu ma copie plusieurs fois et je ne suis pas plus sûr de mon fait dans cette nouvelle tentative. Benoît Minville n’est plus un débutant. Après avoir écrit deux romans pour ados de qualité chez Sarbacane, le voilà à la Série Noire et putain, c’est quand même la Série Noire, le temple du polar et du roman noir  social qui accueille un mec en or, un passionné certes mais la marche est haute quand même. A Nyctalopes, on a revendiqué un côté partisan et nul doute que je vais le prouver ici parfois bien involontairement mais souvent sciemment car quand on apprécie l’homme, on a tendance à devenir aveugle devant le travail de l’artiste, enfin c’est mon cas.

 

« Adolescents, Romain, Vlad, Julie et Christophe étaient inséparables ; ils arpentaient leur campagne et formaient un «gang » insouciant.
Puis un été, tout bascule. Un drame, la fin de l »innocence.
Après dix ans d’absence, Romain revient dans sa Nièvre désertée, chamboulée par la crise, et découvre les différents chemins empruntés par ses amis. »

A propos de « Rural Noir », l’éditeur parle très justement de « country noir », terme créé par Daniel Woodrell (un hiver de glace) mais on peut citer aussi Larry Brown pour certains descriptions bienveillantes de personnages pittoresques de la campagne de la Nièvre voire le McCarthy de « Un enfant de Dieu » et bien sûr Lansdale pour cette grande amitié entre quatre ados. Très ricain comme inspiration, sans nul doute, si on y ajoute les thèmes du retour, de l’auto-justice et de la quête de rédemption grands classiques de la littérature US. En mêlant adroitement deux histoires situées à quinze ans d’intervalle, il a aussi réussi à créer et orchestrer un suspense dont la construction plairait sûrement à Thomas H.Cook.

Mais « Rural Noir » est avant tout un roman français, ancré dans la boue de la Nièvre, dans la campagne de Tamnay -en -Bazois (180 hbts). Et cette ruralité est magnifiquement décrite comme le petit paradis d’une bande de gamins qui vit son petit coin de campagne comme un beau terrain de jeux le temps d’un été. Et que certaines pages décrivant la vie à la campagne sont belles et sentent le vécu, les jours heureux. Le texte est parsemé de petites remarques, de détails, d’anecdotes qui font l’authenticité du roman, lui donnent le goût de la cambrousse, d’une époque qui semblait belle avant le drame.  « L’innocence serait fauchée durant cet été là. ».

Alors cette période dorée n’est pas niaiseuse mais bien une belle évocation des liens du sang, des liens amicaux, de la fraternité, de l’appartenance à une famille, à un clan et c’est un thème récurrent chez Benoît qui, livre après livre, comme dans la vie, célèbre et entretient l’amitié tout en nous faisant partager ses combats et ses passions … même les pires quand ce sagouin nous balance du AC/DC dès la première ligne du roman avant tout le kit de survie du metalleux en goguette par la suite.

La seconde histoire du roman, de ces gamins devenus adultes est beaucoup plus tragique, désenchantée et devient en même temps le témoin d’une réalité économique et sociale vécue dans ce coin de France, la désertification de l’espace rural avec toutes les conséquences connues sur la vie de ces populations campagnardes laissées pour compte maintenant de la même manière que les marginaux des campagnes autrefois.

Les acteurs, Romain,Vlad, Julie et Chris, sont à nouveau réunis mais quinze ans sont passés par là; la vie, les erreurs, les mauvais choix, les rendez-vous ratés, les trahisons, les fuites et la bande se retrouve pour éprouver la qualité des liens qui les unissaient au moment d’une nouvelle crise majeure. Cette partie du roman est plus brute, bien plus adulte aussi dans son traitement et dans l’analyse de la réalité du terrain, une vraie SN. Du noir mais aussi de nombreux signaux, des balises montrant la misère de la campagne en 2016, partie très juste, à l’instar des écrits de son ami Nicolas Mathieu (« Aux animaux la guerre »).

Beaucoup d’émotion, de douleur, de colère…

Benoît Minville montre bien la difficulté de devenir adulte et il me semble aussi que ce roman restera comme son passage à la maturité en tant qu’auteur et il y est parvenu à sa manière qui séduit tant, avec sincérité, humanité, et un cœur énorme.

Minville rules!

Wollanup.

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