Antonia Mattéi a été la reine d’Ajaccio. Elle illuminait les nuits de la ville par sa beauté, son aura et bien sûr son pouvoir. Elle faisait partie du clan Mattéi-Galea qui régnait alors sur la ville et sur toute la Corse.  Mais évidemment, ce clan créait des jalousies. Une guerre est déclarée et son mari est tué, ainsi que leur avocat. Leur meilleur ami est forcé à l’exil en Afrique. Elle se retrouve seule, avec ses deux fils, et est obligée de repartir vivre dans la maison familiale avec son père, vieux nationaliste auréolé de gloire passée.

10 ans plus tard, Galea rentre d’exil, bien décidé à reprendre sa place. Il retrouve Antonia qui vient de perdre son fils aîné, et veut lui redonner le faste qu’elle a connu. Le retour du clan ouvre la porte à de nouveaux meurtres. Cécile Stephanopoli, commissaire de police à Ajaccio est chargée de l’enquête. Elle est aidée par xxx, vieux briscard, qui a travaillé avec son père à l’époque de la guerre des clans.

S’en suit une histoire de mafia corse avec son lot de corruption, de menace, de pouvoir, la police tourne autour, essayant tant bien que mal de démêler les filets et de voir qui tire les ficelles, à qui profitent ces crimes.

Mais ce roman est avant tout une tragédie, celle de ses personnages et principalement des personnages féminins.

Les femmes doivent vivre sous le joug de leurs maris ou si celui-ci n’est plus là pour les protéger, elles doivent s’occuper et vivre sous le pouvoir de leurs pères. Mais Antonia, qui a mis sa vie entre parenthèse pendant 10 ans, qui a accepté cet état de fait, qui a vécu sous la menace perpétuelle de son père, reprend sa vie en main. Avec l’aide de son ami Galea, elle ne se remet pas aux mains de son destin, elle le prend en main. Sa soif de vengeance lui donne la force de relever la tête. D’une certaine façon, Cécile fait de même. Elle souffre dans cette Corse patriarcale. Son père est une haute figure de l’île, et elle ne supporte pas la comparaison perpétuelle dont elle est victime. Elle est blessée, sa femme vient de la quitter. Elle est dans une période de faiblesse mais son travail ne lui laisse pas le temps de s’apitoyer. Elle doit, pour elle, pour sa réputation, pour sa chef, et pour son père, résoudre ces crimes commis à 10 ans d’intervalles.

Dans cette société hautement masculine, où les femmes n’ont que peu de pouvoir, elles se prennent en main, elles montrent leurs forces en relevant la tête, se servent de leurs douleurs pour  avancer tant bien que mal, aidées malgré tout par ces hommes qui les aiment, les craignent, et qui sont conscients que leur empire sur l’île ne sera que plus grand avec l’aide de ces femmes.

Ce roman vous offre des moments de tension, de douleur, vous ne pourrez que partager la violence, les larmes des personnages mais aussi les espoirs qui sont en chacun d’eux, et rêver de la beauté de cette île, de son mystère, de sa rugosité, et de sa fierté. Une belle réussite.

Marie-Laure