Traduction : Franck Reichert (Etats-Unis)
JOURS BARBARES est un livre de chevet dans le sens où on aime le retrouver pour se (re)plonger dans le récit d’une vie, dans le récit d’une passion intangible, dans le récit d’une société en miroir des yeux de Finnegan. Le surf n’est pas qu’un sport codé, il est un style de vie bardé de clichés, empesé de raccourcis et de méconnaissances patentes. A la lecture de cet ouvrage on s’interrogera nettement moins sur les us et les coutumes de passionnés épris de liberté, d’aventures guidées par le seul instinct de LA vague qui les emportera vers la félicité, dans un tourbillon extatique d’apesanteur, d’esthétique, de chaînes rompues les reliant au conventionnel abhorré.
« Le surf ressemble à Un sport, un passe-temps. Pour ses initiés, c’est bien plus : une addiction merveilleuse, une initiation exigeante, un art de vivre. Élevé en Californie et à Hawaï, William Finnegan a commencé le surf enfant. Après l’université, il a traqué les vagues aux quatre coins du monde, errant des îles Fidji à l’Indonésie, des plages bondées de Los Angeles aux déserts australiens, des townships de Johannesburg aux falaises de l’île de Madère. D’un gamin aventureux, passionné de littérature, il devint un écrivain, un reporter de guerre pour le New Yorker. À travers ses mémoires, il dépeint une vie à contre-courant, à la recherche d’une autre voie, au-delà des canons de la réussite, de l’argent et du carriérisme ; et avec une infinie pudeur se dessine le portrait d’un homme qui aura trouvé dans son rapport à l’océan une échappatoire au monde et une source constante d’émerveillement. Ode à l’enfance, à l’amitié et à la famille, Jours Barbares formule une éthique de vie, entre le paradis et l’enfer des vagues, où l’océan apparaît toujours comme un purgatoire. Un livre rare dont on ne ressort pas tout à fait indemne, entre Hell’s Angels de Hunter S. Thompson et Into The Wild de Jon Krakauer. »
William Finnegan a acquis ses galons de journaliste lors de la guerre civile au Soudan, en Afrique du Sud pendant l’Apartheid, dans les Balkans ou à Mogadiscio. Ses reportages sur les théâtres d’opérations sont le fruit de longues immersions et de patientes observations, ou, comme il aime à le résumer : “Je fouine, je parle aux gens, j’attends.” Il a reçu en 2016 pour Jours Barbares le prestigieux Prix Pulitzer.
La maîtrise et/ou les bases de cette activité sportive aquatique n’est aucunement requise. L’auteur n’a pas la volonté de nous inculquer ses rudiments mais au fil de l’eau et des pages on apprivoise les éléments en se prenant au jeu des techniques des pratiquants. C’est aussi par ce contexte que s’opère l’attachement à leurs rythmes de vies et à leurs quêtes semblant éternels. Il existe bel et bien une corrélation, immuable et inflexible, entre milieu naturel et code de conduite pour ne faire qu’un avec cet élément qui vous accueille ou vous expulse. Mais le récit n’est donc pas, et surtout pas, que cette projection dans ce monde quasi privatif. Il offre le reflet d’époques jalonnant le parcours de Finnegan. En balisant ses escapades terrestres par la description ethnologique et sociétale, il nous délivre le message cartographié d’un globe variant à l’envi les rites, les cultures, des éducations basés sur les pilotis multi-séculaires de la tradition et la prépondérance du respect de celle-ci. « JOURS BARBARES » est le livre universel d’un monde basé sur l’humain bardé de ses héritages, codifié par un passé structurant. Il est aussi le beau reflet irisé d’un parcours parsemé de saines amitiés, d’amours nostalgiques, de rencontres fondatrices, de croisements initiatiques qui scellent le sens d’une vie.
La vie de Finnegan est justement ce besoin inconscient de cette quête humaine lui permettant de se chercher, au même titre que débusquer le spot le plaçant face à ses doutes, ses interrogations, afin de se prouver que le chemin reste perpétuellement sinueux, qu’il est jalonné de carrefours où le choix de la direction revêt un axe fondamental pour certains et un fatalisme pour d’autres. Les personnalités qui auront gravité autour de sa constellation au rythme des marées illumineront sa destinée qu’il le veuille ou non. Et c’est dans cette force de liens inaliénables qu’il puise son énergie, qu’il trace son sillon, qu’il exprime son caractère dans sa profonde capacité mimétique aux milieux géographiques et de ses congénères traversés.
Fabuleux écrit d’une passion et chronique d’époques vécues sur le fil d’une existence pleine et forte.
POINTBREAK
Chouchou.
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