Traduction : Margot Nguyen Béraud.

Biarritz, chiberta son golf, la chambre d’amour d’Anglet la ville limitrophe, le lieu de villégiature de l’impératrice Eugénie, le rocher de la Vierge, son image estampillée d’une certaine bourgeoisie et d’un goût assumé pour l’ostentatoire revêtait une place de choix à la Belle Époque. Et cette Belle Époque n’offrait pas que l’exclusivité du grand mais était nécessairement le carrefour d’inégalités, le lieu de passage et d’une certaine cohabitation de différentes couches sociales. On est donc plongé dans ce Deauville basque aux prises avec un drame qui attise les velléités journalistiques à la rubrique des chiens écrasés.

« 1938. Georges Miet, un jeune écrivain fougueux, se lance dans l’écriture d’un roman sur un drame survenu à Biarritz près de quinze ans auparavant : le corps d’une jeune libraire retrouvé dans le port avait plongé la ville dans un profond émoi. Il en est sûr, ce roman sera son chef-d’œuvre.

Georges commence alors son enquête dans l’élégante station balnéaire. Il interroge tous les acteurs de la frétillante cité – employés de maison, grands bourgeois, gendarmes, journalistes et bonnes sœurs –, nous faisant pénétrer dans l’alcôve sombre d’une bourgeoise de province, mais aussi dans les cabarets, les bordels de luxe et les restaurants les plus chics. »

Né en 1965 l’auteur a étudié la littérature espagnole à l’université de Salamanque se spécialisant par la suite dans la philosophie et l’esthétique de la littérature romantique. Cet ouvrage a reçu le prix Nadal (pendant du prix Goncourt français) en 2015.

C’est sous la forme d’une enquête documentaire d’un gratteux du nom de Georges Miet que le récit se présente en s’attachant à narrer la tragédie, « une tragédie », par les paroles et visions de différents protagonistes plus ou moins proches de la suppliciée. De ce défilé de personnages l’on perçoit aussi , et surtout, la description d’une époque, d’une société, d’un temps qui parait plus de l’enveloppe que du contenu. L’esprit volage mêlé aux plaisirs artificiels accentuait un trait vouant à creuser le fossé dans cette communauté spastique de son rang ou de son sang. Déterminisme d’une place dans la société et croquis enjoliveur médiatique fondaient cette ère, mais a t-elle évolué ?

Avec un amusement réel d’écriture mêlé à une volonté de retranscription stylistique collant à ces années, l’auteur nous livre un tableau figuratif montrant son adéquate documentation. Sa plume virevolte, sa pensée est cadrée afin d’y développer les détails d’une histoire dans l’Histoire. Il y a beaucoup de vies dans ces lignes, beaucoup d’images idéalisées de ces années folles laissant des existences sur le bord des rives.

Un cabaret possède une bien belle devanture or l’arrière scène recèle parfois de pathétiques vérités. Biarritz et cabaret sont donc deux termes, un  commun l’autre propre, possédant de bien consternantes similitudes.

Écriture acérée qui sait se départir du drame inhérent et se montrer légère afin d’accentuer ce contexte.

Beau livre d’époque, sociétal et littéraire !

Chouchou.