On déambule, on cherche une voie, une voix…L’accompagnement dans cette lassitude, dans cette aridité d’un être fracturé par les impasses, érodé par les échecs, les tourments sentimentaux nous conduit irrémédiablement dans une mise en abîme.

« L’homme est traqué.
L’homme joue du blues chaque soir dans un obscur bar de la rue des Martyrs à Limoges. 
Lorsqu’il dérive vers son hôtel, au milieu de la nuit, il lui arrive de dialoguer avec des clochards et autres esprits égarés. 
Il lui arrive de s’effondrer sur les pavés des ruelles antiques et de s’endormir, ivre ou épuisé. 
Il lui arrive aussi de ne jouer sur scène que pour une femme qu’il semble être le seul à voir.
Mais l’homme est traqué
 pas par un tueur. Ni par un flic. Quelque chose comme des ombres. »

L’auteur en ponctuant sa prose d’un ton écarlate, par le biais rhétorique de la Numération Formule Sanguine, densifie son propos et y adjoint un prisme de lecture tendu et fragile. Ce fil rouge encense les sens, crédite les humeurs d’une viscosité prompte aux thrombus. Caillots tensionnels qui bloquent les sentiments emplis d’acrimonies, de rancœurs.

On suit cette progression de ce musicos sans avenir, sans ambition, sans autre but que de survivre. Pourchassé par des fantômes lui retirant son libre arbitre et sa bienveillance pour autrui il se délite aux yeux de chimères faites d’émotions perdues et de résidus amoureux.

Derrière les paravents d’une pudeur incarnée par une solitude amère et emplis d’une mélancolie envahissante, son chemin n’a qu’un seul but et ce sera son chemin de croix.

Comme le présente Franck Bouysse, en citation des pages de garde de l’ouvrage auquel je ne peux m’empêcher de m’y référer à mon tour, pour ce qu’il représente à mes yeux et dans mon champ musical :

J’ai fait la saison

Dans cette boîte crânienne

Tes pensées, je les faisais miennes

T’accaparer, seulement t’accaparer

D’estrade en estrade

J’ai fait danser tant de malentendus

Des kilomètres de vie en rose

Alain Bashung

La nuit Je mens

Bouleversant et rouge.

Chouchou.