Lancé dans une investigation journalistique, en vue d’une édition manuscrite, un pigiste « parisiano-aveyronnais », pléonasme, se voit balancer dans les cordes de l’affaire brûlante et mythique de la tuerie du Bar de la Poste. (Référence non feinte au Bar du Téléphone).

Porté par ce souffle catabatique sur la ligne Paris-Marseille, les confrontations multiples des contrastés milieux phocéens verront un parcours cabossé, épicé, d’un homme aux prises avec ses failles et les entrelacs d’une cité minée par son ancestrale histoire.

«  Nous coulerons de plus en plus sans toucher le fond. »

« Une phrase empruntée à Leonardo Sciascia, le chroniqueur angoissé de l’Italie des années soixante dix. En se revendiquant de l’auteur de « Il Contesto », Gérard Bon annonce la couleur : certes, Marseille n’est pas la Sicile et l’Etat en France est sans doute moins gangrené que son voisin transalpin, mais des passerelles existent. Dans ce roman noir il se livre à un exercice de mise en abîme passionnant.

Un journaliste reçoit la commande d’un éditeur : il doit se rendre à Marseille et revenir sur la tuerie du Bar de la Poste qui a défrayé la chronique il y a des années auparavant. Revenant dans un Marseille contemporain, il va mener une enquête complexe et pleine de surprises.

Inspiré de l’affaire du Bar du Téléphone, règlement de comptes au cours duquel dix personnes ont été tuées dans un bar du quartier du Canet dans le14e arrondissement de Marseille, affaire largement reprise par les médias nationaux et qui contribua à entretenir la « mauvaise réputation » de Marseille, le livre de Gérard Bon, au-delà de l’intrigue policière (qui a commandité ce massacre ? S’agit-t’il d’un complot fomenté par des barbouzes ou des membres du SAC ?) donne à réfléchir sur les rapports que nous entretenons avec cette ville que nous voyons sous le spectre de la violence digne des tragédies antiques qui la déchire parfois. »

La ligne brisée d’une âme  sèche et coupable d’addictions délétères renferme notre personnage central dans une morne plaine de sa vie sociale limitée, répétitive, marquée par le sceau de l’échec. Embourbé mais, pour une fois, déterminé dans sa quête d’une vérité, de la vérité il s’évertuera à prendre le pouls d’une ville tentaculaire dans sa géographie que par son organisation « sociale ». Aux prises avec les poncifs séculaires de la polis portuaire, le yo-yo, le va et vient avec forces de police et pions de l’échiquier du « milieu » emmèneront le scribouillard sur les traces morses d’un flic-auteur passé à trépas.

 Dans ce court récit, qui remplit de manière juste les lignes, des passages dédiés à la région natale de notre protagoniste sont d’une beauté d’estampes et d’émotions lyriques sincères. Bien que condensé, l’auteur mêle des faits intriqués, comme l’évocation du juge Michel, un salon Polar, un éditeur spécialisé dans le noir marseillais, pour un résultat où l’on ressent comme dans une partie de tarot que le directeur de notre lecture tente d’emmener au bout le « petit ».

 

 

Chouchou.