Classique ? Peut-être. Efficace ? Et comment !

Le dernier Duane Swierczynski a tout simplement la classe : tout d’abord parce que le plus coriace des personnages est à nouveau… une femme (pardonnez ma subjectivité mais ça fait vraiment plaisir).

Par la construction également : quatorze chapitres divisés chacun en trois parties aux temporalités différentes : 1965, 1995 et 2015. Un cold case qui plombe cette famille de flics d’ascendance polonaise, les Walczak, depuis que Stan, le grand-père, s’est fait assassiner aux côtés de son coéquipier, George Wildey dans un bar des quartiers nord de la Philadelphie pendant qu’ils attendaient un indic. Un braquage qui a mal tourné ? Une enquête qui se serait trop avancée là où il ne le fallait pas ? Ou alors le tandem complice constitué par un flic polonais et un policier noir à une époque où le racisme battait son plein aura fini par agacer certains ?

Quoi qu’il en soit, ce double meurtre hantera les Walczak durant des décennies : la force de Swierczynski est de faire avancer en parallèle l’histoire qui aura coûté la vie des deux flics en ‘65 et les enquêtes de Jim – le fils et d’Audrey – la petite fille, des décennies plus tard.

Jim donc, devenu à son tour inspecteur de police, apprend en ’95 que le tueur présumé de son père a été libéré de prison. Il en devient obsédé jusqu’à s’imaginer rendre justice par lui-même. Enfant, il l’avait promis sur la dépouille de Stan : « Je vais trouver l’homme qui a fait ça. Et je vais le faire payer. » Seulement voilà, quelqu’un le devance et le cadavre de Terrill Lee Stanton n’aide Jim pas à baisser sa furieuse consommation d’alcool. Ni à tourner la page.

Vingt ans plus tard, en 2015, la ville de Philadelphie organise une cérémonie de commémoration des deux coéquipiers tués dans l’exercice de leur devoir. Aucun membre de la famille ne peut manquer cet événement, pas même Audrey, la fille cadette de Jim, la brebis galeuse qui carbure au Bloody Mary dès de réveil et qui avait coupé tout lien avec sa famille. Elle n’a pas froid aux yeux, la Audrey, et encore moins lorsqu’il s’agit de replonger dans cette affaire qui aura empoisonné sa famille dès le moment où le corps inanimé de papi Stan avait touché le sol du bar où il sirotait sa bière.

Il y a tout ce qu’il faut dans ce polar : une intrigue serrée comme un nœud marin, une excellente documentation de l’histoire contemporaine de la Philadelphie et de sa police, des personnages cinématographiques qui suintent tous le désespoir, c’est noir et humain à la fois comme un bon morceau de blues.

Monica.