Traduction : Laura Derajinski.

 

Originaire du Texas où il vit actuellement, Larry McMurtry est un grand écrivain américain qui a écrit plus de 40 livres, romans et essais. Il participe également à la rédaction de scénarii pour le cinéma et a obtenu un oscar pour celui de « Le secret de Brokeback mountain ». Il a obtenu le prix Pulitzer en 1986 pour « Lonesome Dove » et en a écrit deux prequels ensuite.  « La marche du mort » est le premier des deux, celui où on assiste à la rencontre entre les deux héros, Woodrow Call et Augustus McCrae, à peine sortis de l’adolescence. Le deuxième « Comanche moon » ainsi que la suite « Streets of Laredo » sont encore inédits en France. Espérons que leurs traductions soient dans les projets de Gallmeister…

« Aux confins d’un Texas encore sauvage, les jeunes Augustus McCrae et Woodrow Call viennent de s’engager pour faire régner un semblant d’ordre dans ce pays en devenir. Sous-équipés, piètrement entraînés et mal dirigés, ils s’apprêtent à traverser une série d’expéditions et d’aventures plus dangereuses les unes que les autres. Tour à tour poursuivis par des Indiens, l’armée mexicaine ou des ours, ils devront se battre au milieu d’une nature hostile. Heureusement que les femmes sont là pour les laisser rêver à des jours meilleurs. »

Augustus McCrae et Woodrow Call donc : ils sont tout jeunes, dix-huit ans à peine et s’ils sont carrément différents l’un de l’autre, Gus écervelé, ne pensant qu’aux putains, Call plus sérieux, plus rigide mais pouvant exploser gravement si on lui cherche des noises, leur amitié va devenir leur point d’ancrage. Ils cherchent tous deux l’aventure avec une solde à la clé et s’engagent dans les Texas rangers, pleins de rêves de bravoure et de gloire. Ce roman est celui de leur initiation à la dure vie de cow-boys.

C’est donc un western en bonne et due forme : les paysages grandioses de l’Ouest américain, les Indiens, les poursuites, les batailles…  Les Texas rangers partent d’abord pour établir une route sûre pour les diligences en territoire indien puis pour conquérir Santa Fe. Cette deuxième expédition représente la majeure partie du bouquin et s’inspire d’une expédition réelle qui eut lieu en 1841 et se termina par un désastre, elle s’en inspire seulement car c’est bien d’un roman qu’il s’agit ici.

Chariot retrouvé au fond d’un lac desséché.

Un roman bien noir, on est loin des clichés des westerns classiques avec de vaillants héros sans peur et sans reproche. Ces rangers sont de pauvres types qui n’ont rien, ni ici ni ailleurs, plus ou moins sympathiques, abrutis, cruels…. Ils sont recrutés en trois secondes, équipés à la va vite et pas formés du tout. La troupe des Texas rangers se compose de toute une série de personnages hétéroclites hauts en couleurs que Larry McMurtry nous décrit avec humour parfois car certains sont vraiment gratinés, mais toujours avec humanité. Loin d’être héroïques, ils tremblent  de peur, de froid, de faim, pètent les plombs, affrontent le danger parce qu’ils n’ont pas le choix et y survivent rarement.  Ce groupe est accompagné par Matilda, personnage magnifique de putain au grand cœur qui finit par prendre sous son aile les deux « jeunes chiots » Gus et Call.

Larry McMurtry s’intéresse à beaucoup de personnages, certains meurent au bout de quelques pages, d’autres tiennent un peu plus longtemps, mais il fait ainsi ressentir au lecteur les pertes, les deuils et l’angoisse de cette troupe qui va s’amenuisant. Car les expéditions sont des catastrophes prévisibles, menées par des chefs auto-proclamés, incompétents mais assez brutaux pour s’imposer comme chefs (plus chefs de gangs que chefs militaires). Et bien sûr ils sont en territoire inconnu, contrairement aux Indiens qui savent survivre dans ces déserts et tendent des pièges dans lesquels nos pauvres rangers pas trop futés se précipitent. Larry McMurtry, lui, connaît bien le Texas et il décrit magnifiquement ces terres sauvages et les dangers rencontrés : les éléments qui se déchainent, les animaux féroces…

Un western violent et sanglant et il n’y a pas que pour la troupe que la violence règne !  Larry McMurtry nous raconte une épopée peu glorieuse de la conquête de l’Ouest, un assaut par une bande de bras cassés qui nous rappelle que ces pionniers étaient des misérables, affamés et crasseux.

Un grand roman !

Raccoon