« Maison d’édition indépendante, Asphalte publie depuis 2010 des fictions urbaines et cosmopolites. Attachée à la ville et à ses marges, elle défend une littérature à la frontière des genres, nourrie de pop-culture, de voyages et de musique. » tel est le slogan de la maison maintes fois vérifié par de grands romans noirs souvent sud-américains qui ont fait découvrir de grands auteurs traitant la ville jusqu’ici inconnus en France. Je citerai ceux qui m’ont particulièrement séduit, surpris, comblé: le Chilien Quercia, l’Argentin Saccommano, l’Australien Knox, l’Américain Larson, l’Espagnol Zanon…

Mais Asphalte sait aussi donner sa chance à des auteurs français s’intéressant à la ville dans ses multiples dimensions sociologiques, économiques, politiques, voire poétiques ou utopiques puisqu’ après « Prague, faubourgs est » de Thimothée Demeillers » en 2014, c’est au tour d ‘Emmanuel Villin de nous présenter, dans un premier roman, sa version d’une ville bien réelle mais qui ne sera jamais nommée afin d’éviter les clichés inhérents à cette grande capitale méditerranéenne au croisement de l’Occident et de l’Orient ayant connu des décennies de guerre .

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Le narrateur de « Sporting Club » arrive dans la ville pour une série d’entretiens avec Camille grand réalisateur de cinéma. Il s’y installe fiévreux de commencer le travail mais peu à peu s’aperçoit qu’il n’est pas vraiment le bienvenu. Si Camille accepte bien de le rencontrer, il fuit par contre les entretiens préférant promener le narrateur, lui assignant des tâches de collaborateur, l’emmenant au gré de ses humeurs se baigner ou déjeuner mais toujours avec le même fuite concernant sa vie. Ainsi, le narrateur passe ses journées au Sporting Club, une piscine au bord de mer qui semble avoir connu des jours meilleurs et où le temps semble s’être arrêté au milieu des années 70… avant la guerre. Le narrateur se morfond, progresse en natation et surtout observe cette ville au début des années 2000 en proie à de profondes transformations frénétiques.

Le narrateur nous montre cette ville mais s’attache surtout à cet hypothétique âge d’or d’avant le conflit. Emmanuel Villin truffe son récit de références architecturales et culturelles ancrées pour les plus récentes au milieu des années 70. On évoque « la panthère rose », devine « Casino Royale », roule en Fiat 124, visionne du Super 8, raconte le naufrage du Champollion en 1952, décrit le vieux phare devenu obsolète avec les constructions modernes le dépassant, boit des Martini dry au Palace Café, fume des gros cigares au bord de la piscine, s’imagine voir voler des Super Constellation, rencontre des alter égos du Peter Sellers de « the party », parle d’Alphaville et de Brasilia, écoute du Neil Young daté de 1974…

Seul lien réellement tangible avec le présent, les longs courriers qui passent au-dessus de la piscine où notre héros rêve, imagine, réfléchit aux décisions qu’il va devoir prendre pour son avenir et… progresse en natation.

Emmanuel Villin avec un côté dandy évoque avec charme et références classy un monde désuet et dont il tente de retrouver les traces en les créant, les imaginant, les fantasmant. Un portrait très attachant d’une ville, d’un art de vivre précieux aujourd’hui disparu à jamais.

Dilettante.

Wollanup.