La Roberval nous sert d’étalon dans l’opposition de ses plateaux où se font face les poids de la reconstruction et du passé. Les lests font ployer les déterminations, font fléchir les prises d’élans promptes au renouveau, aux projets de table rase. La rugosité de la Lozère irise le tableau des landes d’une caligineuse torpeur, enserrant le cou et réduisant notre capacité à capter l’oxygène nourricier.

« Esther, institutrice, décide de quitter Paris pour s’installer dans un village en Lozère avec sa fille. Un jour, Vanessa, une de ses anciennes connaissances, refait surface et lui demande son aide. Vanessa est mêlée à un trafic de drogue et deux dealers sont à sa poursuite. Les habitants du village font tout pour protéger Esther. »

Laurence Biberfeld a connu la ville et la rue, elle connaît le Causse et la profession d’institutrice s’inscrivant dans ce roman. Celui-ci respire le vécu…

Une jeune mère accompagnée de sa fille espiègle et délurée veulent jouir de la campagne profonde pour fuir les turpitudes citadines. L’acclimatation  coule d’une source revigorante, minérale et phagocytées par des autochtones bienveillants, leurs épanouissements semblent se fonder sans heurts. Son poste d’institutrice invoque le respect. Mais la lumière se voile quand le passé resurgit de pleine face, le froid transit les consciences, les viscères. Elle ne peut qu’ affronter, assumer ! Dans ce déferlement de violence typique de la cité , étranger de la ruralité, s’oppose une lutte contradictoire afin de conserver un équilibre dans ce hameau à la population famélique.

Articulé sur différentes périodes clés, le récit se veut donc un triptyque pictural où cohabitent des contrastes d’existences, des asymétries de pensées régies par des profils culturels assujettis aux différences campagne/ ville. Les valeurs propres, singulières se bousculent, se frictionnent. L’abrasion au contact est profonde. Néanmoins, il y a un moment où l’universalité humaine point et, cadré par un style tout autant lumineux, chatoyant et figuratif, la descente du cours d’eau, la progression de l’histoire reste donc enveloppées d’une prose revigorante. La naturalité prépondérante enrubanne le tout d’une nécessaire et salvatrice acmé.

Pays où sous la rocaille grandissent des cœurs, se fortifient des vies. Tension filaire où la moindre traction rompt l’équilibre des êtres.

Apre contrée, âpre récit mais histoire pyrétique où la poésie érode les angles saillants !

Chouchou.