Chroniques noires et partisanes

Étiquette : paola barbato

BON A TUER de Paola Barbato / Denoël.

Traduction: Anaïs Bouteille-Bokobza

La fébrilité est réflexe à l’annonce d’un nouvel effort de l’auteur transalpine. En effet, son premier roman, paru dans l’hexagone sous le titre « A Mains Nues », m’avait littéralement soufflé. Son propos, et sa forme, de cette parution chez ce même éditeur en 2014, se présentaient, ou se voulaient, plutôt clivants. Pour les uns, il n’était que violence pour la violence, Pour les autres, dont je faisais donc partie, la Milanaise, parallèlement scénariste TV et BD, nous percutait dans un combat sur un ring sans règles ni cordes, tant au sens littéral que figuré. La romancière a ce don du frisson, de l’impact indélébile des sens. J’avais donc hâte de me plonger dans ce nouvel écrit qui prenait ses quartiers dans le monde de l’édition.

«Corrado De Angelis et Roberto Palmieri sont deux écrivains que tout oppose. Le premier, neurochirurgien, doit son succès à la qualité de ses textes qui ont su redonner au roman policier ses lettres de noblesse. Palmieri est quant à lui un auteur vedette qui ne rate pas une occasion de faire le buzz et passe son temps sur les plateaux de télévision pour le plus grand plaisir de ses milliers de fans, et ce malgré la piètre qualité de ses romans. Les maisons d’édition de De Angelis et de Palmieri ont passé un accord diabolique : les deux auteurs sortiront leur nouveau polar le même jour à la même heure, et un prix sera décerné à qui vendra le plus de livres. La compétition sera lancée en direct à la télévision. Mais, le grand soir, rien ne se passe comme prévu, et De Angelis disparaît quelques minutes après avoir quitté le plateau. Le mystère s’épaissit lorsque débute une série de meurtres imitant à la lettre les crimes des thrillers de l’écrivain disparu. Une véritable chasse à l’homme commence alors, car tout porte à croire que Palmieri, jaloux et souffrant d’un indéniable complexe d’infériorité, est coupable. Mais la réalité est bien différente et, comme dans chaque roman de Paola Barbato, insoupçonnable. »

Le synopsis de base s’appuie sur un affrontement entre deux écrivains, aux profils antagonistes, sur une idée promotionnelle novatrice de leur maison d’édition respective, en s’appuyant sur le vecteur médiatique télévisuel. Le face à face vire au drame. Dans ce contexte, le déroulé empruntera les voies hypothétiques des instants suivant le clash. Un certain nombre de protagonistes directs et indirects s’accumulent, densifiant le propos, impliquant une certaine inertie. Sur ce point, j’ai trouvé justement que le récit se complexifiait, devenait flou. Le cadre devenait instable, mouvant, imprécis. Je me suis quelque peu perdu dans son fil directeur.

Les atouts sont bel et bien là, pourtant, écriture, style, faculté à engendrer l’addiction. La preuve de base du roman ayant atteint son objectif reste bien l’excitation à reprendre l’objet livre avec délectation. Or, mon ressenti positif global s’est retrouvé amputé par mes errements et les errements de sa génitrice. Un panel de personnages restreint, une avancée plus cohérente et direct auraient permis, à mes yeux, un résultat à la hauteur de la moëlle de conteuse dont est pourvue Paola Barbato. Elle possède un beau jeu de Scopa mais, sur cette mène, les cartes dominantes  dont les carreaux ne sont pas au bout….

Chouchou.

 

 

LE FIL ROUGE de Paola Barbato / Denoël Sueurs Froides.

Traduction: Anaïs Bouteille-Bokobza.

Après le succès de 2014 de « A mains nues », voici le roman suivant de l’auteure lombarde daté, lui, de 2009, c’est à dire un an après le sus-nommé. Scénariste de la série mensuelle BD italienne « Dylan dog » Paola Barbato montre une imagination prodigieuse dans ces 356 pages hallucinées.

« Antonio Lavezzi mène une existence solitaire et monotone depuis le jour où Michela, sa fille de treize ans, a été sauvagement assassinée. Sa femme l’a quitté, et le meurtrier n’a jamais été arrêté. Antonio travaille dans le bâtiment avec un ami d’enfance. Ce dernier lui présente inlassablement de petites amies potentielles qui ne l’intéressent pas. Lorsqu’un corps est découvert sur le chantier dont il est responsable, des éléments troublants amènent Antonio à penser que cette affaire et son histoire personnelle sont liées. Contacté par un homme mystérieux, baptisé l’Assassin, qui lui ordonne d’exécuter des criminels ayant échappé à la justice, Antonio décide d’obéir et va s’extraire peu à peu de sa torpeur et de son silence. L’ Assassin semble savoir qui a tué Michela, et Antonio, pris dans une spirale meurtrière, est plus que déterminé à venger sa fille. »

Vous aimez les thrillers qui vous isolent du monde pendant le temps d’une lecture que vous ne pouvez ni ne voulez interrompre? Vous avez ici le prototype du roman que vous pouvez acheter les yeux fermés si vous avez déjà aimé « A mains nues ». En effet, vous y retrouverez les rapports entre kidnappeurs et otages, la notion de l’éventuelle nature de l’assassin auxquels vont se greffer le vigilantisme et les rapports entre les victimes et bourreaux.

Alors, je ne suis pas très friand des romans traitant de l’auto-justice reconnaissant néanmoins n’avoir jamais été confronté, heureusement, à pareil cas de figure et ne voulant donc pas juger des comportements en la matière. Paola Barbota a magnifiquement traité le sujet en mettant bien en avant l’extrême douleur des victimes, des vies foutues des proches des personnes assassinées et dont les crimes sont restés impunis en se centrant sur ce pauvre Antonio Lavezzi qui vit tel un zombie depuis la tragédie. L’auteure montre bien la douleur, l’égarement, la détresse comme la colère en décrivant la psychologie du personnage principal Antonio Lavezzi.

Mais je dois dire que je n’ai vraiment pas tellement cru à cette « entreprise » de l’Assassin qui semble être plus un être surnaturel qu’un simple humain tant il est doué pour la duplicité et se montre tellement plus fort que toutes les pauvres polices italiennes pour résoudre des meurtres non élucidés. Pareillement, il me semble vraiment trop facilement convaincant pour embrigader des gens qui, il est vrai, sont désarmés, aveuglés par la peine qui est leur et qui deviennent rapidement des complices d’assassinats sans réellement avoir la preuve de la culpabilité. Néanmoins on peut aussi occulter cet aspect, abandonner un certain pragmatisme et ainsi apprécier totalement le roman.

Alors, il est évident que la lecture des recensions de meurtres non élucidés comme la narration des meurtres perpétrés par l’ Assassin peut s’avérer lourde, pénible, violente mais malgré tout Paola Barbato ne tombe pas dans le gore et fait monter le suspense tout au long du roman avec la promesse d’un final étourdissant entre Antonio et le meurtrier de sa fille.

Paola Barbato réussit parfaitement son coup, offrant des révélations très surprenantes, des passages à briser le coeur et d’autres à vous filer mal au ventre. Et je le répète, il est très difficile de lâcher le livre, même si sa lecture donne un petit côté voyeur et réveille des instincts mauvais, primaires, enfouis, cachés au plus profond de nous tout en amenant à une certaine réflexion sur la douleur de ceux qui restent.

Les fans de Dexter jubileront.

Eprouvant.

Wollanup.

A MAINS NUES de Paola Barbato/Denoël

 

 

« Il a seize ans, une gueule d’ange, un avenir tout tracé. Un jour, il se rend compte qu’il peut tuer sans le moindre scrupule. Un monde nouveau s’offre à lui…

Davide a eu une enfance choyée et sans histoires. Un soir, lors d’une fête, il est kidnappé et enfermé à l’arrière d’un camion. Tapi dans le noir, un inconnu lui saute dessus et tente de le massacrer. Terrorisé, Davide agit par réflexe et tue son adversaire. Il est alors conduit dans une cave, où il rejoint d’autres prisonniers. Comme lui, ils sont là pour s’entraîner à combattre et intégrer un jour l’élite des tueurs. Abasourdi, Davide comprend que son seul moyen de survie est de tuer. Il remporte chacun de ses combats. Un jour il décide de s’enfuir, mais l’organisation ne l’entend pas de cette oreille…
Naît-on assassin? C’est la question que se pose Davide tout au long du roman lorsqu’il découvre qu’il peut tuer avec ses poings sans le moindre scrupule.

C’est la question que se pose Davide tout au long du roman lorsqu’il découvre qu’il peut tuer avec ses poings sans le moindre scrupule. »

Si l’auteure s’ingénie à tremper sa plume dans le fiel ses esquisses pugilistiques létales ne cherchent pas à nous rebuter. Elle nous laisse maîtres de nos émotions, de nos images sans inférer sur nos esprits.

Cette qualité nous invitant à diriger notre lecture en disposant d’anfractuosités, de pitons pour assurer nos appuis. La navigation dans cet écrit limpide nous réconforte à cette littérature noire qui ne se veut ni moralisatrice ni interventionniste. On peut alors classer Barbato dans le camp des Behavioriste.

Le bouquin scindé en trois volets nous projette violemment dans la destinée et la furie d’un ange vengeur, où la filation forcée de Davide et Minuto sert d’alibi à une quête euristique d’identité tapie dans un subconscient .

Ecrit vénéneux, lourd par son fond, mais un réel plaisir littéraire. Attention à ne pas mettre dans tout les métacarpes !

Chouchou.

 

 

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