Traduction: Fabrice Pointeau.

Les auteurs de polars sont-ils des personnes recommandables ? Est-ce leur goût pour le morbide, leur imagination débordante voire même leurs expériences qui les poussent à écrire des histoires de crimes ?

Dans “Ne fais confiance à personne”, Paul Cleave se pose cette question au travers d’un auteur de thriller, Jerry Grey, atteint de la maladie d’Alzheimer. La démence pousse cet homme à avouer des crimes ressemblant étrangement à ses personnages de romans. Mais où est la vérité ? La maladie lui fait confondre la réalité et la fiction, mais lorsque de vrais meurtres de femmes font la une des faits divers, qu’est-ce qui est réel ? La maxime du héros « Ecris ce que tu sais, fais semblant pour le reste » résonne étrangement : sa maladie, Le capitaine A, lui fait-il oublier ses crimes ?

Le roman est écrit avec une alternance entre un chapitre sur la vie présente de Jerry dans un centre de soins, et un chapitre flashback sur sa vie au moment de la découverte de son Alzheimer.

Ces retours en arrière permettent de découvrir le Jerry d’avant, tant qu’il avait encore de longues périodes de lucidité. Ce sont ces chapitres qui construisent le roman et nous font nous attacher à lui. Il habite avec sa femme dans un quartier résidentiel de Christchurch, une maison avec jardin, avec de bonnes relations avec son voisinage.

On aime le personnage principal, on a de l’affection pour lui, qui sombre peu à peu dans la folie, on ressent ses émotions face à sa famille qui ne sait pas comment faire face.

Et en même temps on s’interroge, et s’il commettait réellement ses crimes ? Est-ce réellement un homme bien, un homme que l’on peut aimer, ou est-ce un psychopathe, dont la maladie lui fait tout oublier ? On rit aussi, devant des scènes cocasses que le Capitaine A lui fait faire, et qu’il oublie très vite. Alzheimer fait ressortir le pire en Jerry, il n’a plus aucun filtre, aucun savoir vivre. Nous sommes totalement immergés dans sa vie et dans sa maladie. Toute l’histoire est racontée par lui-même sous forme de cahier de la folie qu’il écrit pour se souvenir.

Les chapitres courts, les phrases sans fioritures facilitent la lecture. On se prend vite au jeu, le roman devenant ainsi un « page-turner », où l’on veut savoir la suite, Jerry a-t-il tué ces femmes, que va-t-il lui arriver ?

Ce thriller, sans révolutionner le genre, vous fait passer un très agréable moment. Son écriture fluide, les scènes oscillant entre humour et noirceur, au ton très caustique vous transporte dans cette ville de Christchurch, dans cette maison de santé et dans la vie de Jerry Grey. Je vous le recommande fortement, c’est une histoire qui tient en haleine, et qui vous permettra de rire et de frémir, que demander de plus à un thriller ?

Marie-Laure.