Matthew Klein, auteur déjà publié par le Seuil il y a quelques années, se consacre à l’écriture dans le Westchester (l’heureux homme!) où il vit avec femme et enfants après avoir passé des années en Californie dans la Silicon Valley où il avait fondé plusieurs start-up. Si son passé de dirigeant d’entreprise lui a certainement servi pour une partie de l’intrigue, on peut par contre se demander quelles sont les addictions de Klein qui rendent son cerveau aussi dérangé pour commettre une telle intrigue furieuse.

« Chaque fois que Jimmy Thane a été confronté à un choix, il a pris la mauvaise décision. Après des années d’alcoolisme et d’incartades amoureuses, on lui donne une dernière chance de sauver sa carrière et son mariage : il a sept semaines pour redresser une entreprise en difficulté. Mais il pressent vite que quelque chose ne va pas. Quand la police vient enquêter sur la disparition du précédent directeur, et que Jimmy découvre du matériel de surveillance dans la maison de son voisin, il se demande dans quel guêpier il s’est fourré. »

 

Le roman se compose de deux parties qu’on croirait issues de deux romans différents. Après un incipit absolument choquant laissant présager les moments difficiles à venir, l’histoire ressemble à un roman sociétal décrivant la vie d’une entreprise en déroute: les employés déprimés, absents y compris quand ils sont présents, les cadres imbus de leur statut et de leurs privilèges, les dépenses inutiles, le laisser-aller général, les projets foireux, les contrats perdus, un triste constat d’échec que Jimmy Thane découvre à son arrivée et qu’il doit révolutionner pour sauver l’entreprise mais aussi sa propre carrière ainsi que sa vie avec Libby son épouse, dans une Floride inconnue si loin de la Californie. C’est la dernière chance pour Jimmy alors pas de sentiment. Et puis il y a le mystère de la disparition de son prédécesseur, un flic du FBI qui rôde, des anomalies dans la comptabilité. C’est vif, emballé, emballant, empli d’enseignements pour les gens qui ne connaissent pas ce monde charmant dans sa version ricaine.

Petit à petit, Jimmy furète et découvre pas mal de choses bien dérangeantes, commence à comprendre son rôle, voit le danger et puis c’est l’explosion d’une deuxième partie concentrée sur un Jimmy aux abois et le mot est faible. Le danger bien tangible est pourtant anonyme, semble venir d’une mafia russe ou tchétchène voire ukrainienne. (Petite parenthèse: là, les anti-Américains primaires pourront hurler une fois de plus que les Américains sont des ploucs comme je l’ai vu tristement écrit encore dernièrement sur facebook mais qu’ils aillent demander aussi au Français moyen la différence entre le Kansas, l’Arizona et le Wisconsin).

Comme Jimmy, on sombre dans la paranoïa jusqu’à un déferlement de violence dont la provenance n’est jamais réellement identifiée, totalement insaisissable mais extrêmement meurtrière qui rappelle un célèbre bon film que je tairai tout en laissant néanmoins un petit indice.

Le rythme de l’intrigue suit un crescendo infernal jusqu’aux révélations finales qui vous étonneront sans aucun doute à défaut de totalement vous convaincre. Alors les cartésiens trouveront sûrement à redire, les adeptes de la rationalité auront peut être quelques griefs mais les amateurs de bon polars bien construits, de thrillers vraiment surprenants y trouveront, à l’aise, leur compte.

Efficace.

Wollanup.