Après une période plus prolifique en littérature jeunesse, le Brestois d’origine Claude Bathany (membre fondateur de Calibre 35, collectif des auteurs rennais de roman noir) publie cet automne chez Goater noir un recueil de 14 nouvelles. Une décennie a passé déjà depuis qu’il nous avait séduits avec la drôlerie et le vif de ces romans noirs finistériens, Last exit to Brest et un étonnant Country Blues, sis dans les Mont d’Arrée.
Les nouvelles dessinent des portraits de personnages plongés dans leurs turpitudes, par exemple, comme l’annonce la 4e de couv’, « un écrivain phagocyté par sa doublure, un autre manipulé par son futur éditeur, un patient hanté par sa transparence sociale, un employé modèle, carpette idéale de sa hiérarchie, un chômeur martyrisant sa mère par haine de soi, un accordéoniste rêvant d’une gloire cantonnée à sa boîte crânienne, un agent de sécurité d’une bêtise jusqu’au-boutiste… ».
C’est sous l’angle de la psychologie minutieuse qu’il nous est permis d’approcher et d’accompagner les représentants de cette triste humanité. Claude Bathany décortique les affres, les angoisses, les élans, les patatras !, parfois les coups de talon pour se rétablir d’une situation difficile de ces êtres falots ou salauds. Personne n’est à envier ou admirer dans les nouvelles. « Que ceux qui ne s’y reconnaissent pas leur logent la première balle » avertit d’ailleurs la présentation éditeur.
Si Claude Bathany maîtrise l’exercice, on espère voir saillir quelque chose de plus saignant dans cette farandole monocorde. Et cela est possible : quand éclatent soudain l’outrance et la férocité d’Eternelle solitude, l’histoire d’un chômeur tortionnaire, queutard, qui ne s’encombre pas de la décence, on jubile. Une âme, il y aurait à discuter, déglinguée, sans conteste. Plus loin, le triangle amoureux de Mozo de Espadas, dans les milieux de la tauromachie, a la délicatesse et l’estoc d’une épée bien forgée. Puis le recueil renoue avec ses notes désenchantées que l’auteur pianote avec conviction, comme si c’était la seule partition qui trouvait grâce à ses yeux. Au final, on espère que la récurrence du personnage de l’auteur en mal de veine dans ces nouvelles ne soit pas une forme d’autoportrait de la misère.
Paotrsaout
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