Chroniques noires et partisanes

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LE TABLEAU DU PEINTRE JUIF de Benoît Séverac / La Manufacture de Livres

 — Très bien. Ainsi tu pourras prendre le tableau.

 J’ai un moment d’hésitation. Ai-je oublié une conversation à propos d’un tableau ?

 — Le tableau ? Quel tableau ?

 — Celui du peintre juif.

 Nouveau temps de réflexion. Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?

 — Quel peintre juif ?

 — Les gens que tes grands-parents ont cachés dans leur grenier pendant l’Occupation. 

 — Grand-papa et grand-maman ? Ils ont caché des Juifs à Génolhac ?

À 50 ans passés Stéphane découvre une histoire vieille de 75 années. Il est marié à Irène et au chômage dans une région à l’écart. Un peu dépassé par la vie aussi. Le tableau arrive et se transforme en pomme de discorde. Le vendre et résoudre les multiples problèmes financiers du couple comme le souhaite Irène, le garder pour ce qu’il représente de courage familial ?
Stéphane, le petit-fils, a l’idée de demander le statut de Justes pour ses grands-parents auprès de Yad Vashem à Jérusalem.
On voit le couple se déchirer. Stéphane se réfugie de plus en plus à l’intérieur de lui-même, dans une histoire familiale dont il aurait souhaité être le héros à défaut de se voir comme un raté. Il ira jusqu’à s’envoler pour Israël à la demande du comité d’attribution du titre de Justes.

 Dans un récit parallèle savamment distillé, Benoît Séverac nous raconte les déboires d’Eli Trudel, l’artiste peintre du titre, et de son épouse Jeanne Fredon, dans le sud de la France puis en Espagne entre 1943 et 1944. 

 Difficile d’en dire plus sans dévoiler l’intrigue. Toujours est-il que ce voyage en Terre Sainte ne se passe pas vraiment bien. Ce pauvre Stéphane se retrouve pris dans un imbroglio avec la police israélienne, l’ambassade de France, et les experts de Yad Vashem. Avec en sus une assignation à résidence dans un appartement proche du taudis.

 “Les doutes qui m’assaillent depuis plusieurs semaines reviennent à la charge, encore plus forts. Qu’est-ce qu’il va m’arriver si je n’obtiens pas la reconnaissance que j’espère pour mes grands-parents ? Cela n’empêchera pas que ce qu’ils ont fait était grand et beau. Cela n’empêchera pas que ce sont eux qui l’ont fait, et pas moi. Donc qu’ils soient reconnus comme Justes ou pas ne changera rien à ma faillite et à mon incapacité à rebondir.”

L’écriture de Benoît Séverac est précise, on sent que chaque mot est à sa place. Se dégage aussi une certaine ferveur de la part de l’auteur pour cette histoire.
 Le Tableau du peintre juif  est sérieusement documenté, les remerciements détaillés sont à ce titre éclairants, c’est rare et mérite d’être souligné. Ce n’est pas un roman policier, plus un roman noir, ou plutôt gris anthracite, une énigme où l’enquête prévaut sur le reste. Quelle est l’histoire de ce tableau coincé dans les plis de l’Histoire ? Qui sont vraiment Eli et Jeanne Trudel ? Quel est le but de leur fuite vers l’Espagne ? Voilà ce à quoi Stéphane devra répondre s’il veut retrouver tout ce qu’il a perdu lors du premier tiers du roman.

 Stéphane, voilà un personnage ambivalent, on ne sait jamais s’il est idéaliste ou superbement naïf tant il fait preuve d’une obstination sans bornes pour un projet qui est au choix tout à fait honorable ou carrément catastrophique. On le voit se perdre, se tromper lui-même avec acharnement. Est-il attendrissant ou simplement détestable ? Son entêtement le mènera pourtant bien vers le bout d’un chemin. C’est une véritable odyssée qui lui permettra de découvrir sa vérité, d’évacuer ses peurs, ses fautes, et enfin de faire face à ses contradictions.

NicoTag

ENNEMI PUBLIC N°1 d’ Alvin Karpis / La manufacture de livres.

Public Enemy Number One, The Alvin Karpis Story

Traduction: Eric Balmont

Avertissement: ENNEMI PUBLIC N°1 est la version poche de GANGSTER paru en juin 2018 à la Manu. Et donc un copier/coller plus tard, on vous remet la belle et très complète chronique de Paotrsaout à l’époque.

Publié cet été dans la partie Documents du catalogue de la Manufacture des Livres, le récit d’Alvin Karpis en rejoint d’autres consacrés au monde criminel. C’est une traduction de son autobiographie datée de 1971, Public Enemy Number One, The Alvin Karpis Story qui revient sur sa trajectoire de braqueur de haut vol dans l’Amérique de la Prohibition et de la Dépression, au sein du célèbre gang Karpis-Barker.

Né Karpowicz à Montréal en 1907, dans une famille d’immigrants d’origine lituanienne, le jeune Alvin grandit au Kansas, où sa famille a fini par arriver. Il l’avoue ou s’en vante soixante ans plus tard : dès l’âge de 10 ans, Karpis décide de faire carrière dans le crime, fasciné par les truands, putains, macs et flambeurs de son voisinage. Adolescent, il se lance dans le cambriolage et le vol : il aime le fric, l’action, l’adrénaline et le mouvement. A 18 ans, il est condamné « de 5 ans à 10 ans » de pénitencier. Il entre véritablement à l’école des bandits dont les braqueurs étaient à l’époque la haute caste.  Il s’évade en compagnie de DeVol, un braqueur en 1929, et pendant plusieurs mois, plonge dans la vie erratique des truands. Toujours en mouvement, toujours à l’affût de coups qu’il faut soigneusement monter, toujours sur ses gardes.

Karpis, comme les autres gangsters, adore les voitures. Ce sera une constante de son récit : les déplacements automobiles y sont incroyables. Des centaines, des milliers de kilomètres régulièrement parcourus, dans le Midwest : Kansas, Oklahoma, Arkansas, jusqu’à plus au nord, Minnesota et Illinois. Karpis déclare ne pas aimer plus que ça la violence et la sang mais être lourdement armé rassure le braqueur qui en cas de pépin pourra s’ouvrir le chemin de la fuite. Et cela paraît presque facile dans ses bourgades paisibles, aux hommes de loi et citoyens armés fébriles, face à la détermination, la vitesse et la brutalité des braqueurs. Ces hommes sont en quelque sorte les héritiers des bandits à cheval du siècle dernier, jouant à fond de la géographie et de l’émiettement juridique du pays pour échapper à leurs poursuivants.

Cette première cavale prend fin en 1930. Karpis retourne en prison où il se lie d’amitié avec Freddie Barker, membre aguerri d’une fratrie de braqueurs, avec ses frères Herman et Doc. Quand ils se retrouvent libres, en 1931 les deux hommes montent le premier d’une série de coups ensemble et c’est ce qui va véritablement lancer Karpis, au point que l’on parlera bientôt d’un gang « Karpis-Barker ».

C’est à cet instant quand nous découvrons le caractère incroyable du récit qui concerne la très courte période, cinq années, 1931-1936, pendant lesquelles le gang – en fait une association mouvante de comparses autour de Karpis et de Barker selon les coups – va agir, monter en audace et en puissance ou lamentablement se louper par moments. L’accumulation de kilomètres, de déménagements, de préparations, d’actions est proprement ahurissante. A l’époque, d’autres braqueurs violents font parler d’eux, qui s’inscriront pour certains dans la légende : Dillinger, Bonnie & Clyde, « Baby Face » Nelson…  A leurs trousses, le jeune Edgar J. Hoover à la tête du FBI dont il a fait sa créature cherche à accroître l’efficacité encore balbutiante de l’organisme fédéral chargé du crime organisé ou des crimes qui impliquent le franchissement d’une frontière entre les Etats (et les braquages avec fuite vers une planque transfrontalière ou écoulement lointain de butin en font partie).

Sans arrogance presque, sans complaisance en tout cas, Karpis égrène minutieusement les détails de sa vie frénétique, sur le fil du rasoir. Il y a presque une monotonie de celle-ci. Les coups s’enchaînent, les cadavres s’empilent. Les comparses de Karpis sont beaucoup plus sensibles de la queue de détente que lui. Les pérégrinations sans fin du gang l’amènent plus proche de Saint-Paul, Chicago, Toledo, grands centres urbains du nord où la pègre est florissante. Quelque chose déjà trouble l’esprit de Karpis, presque une nostalgie des braquages dans l’Amérique profonde, des cavales sur des routes non goudronnées dans des cambrousses paumées. Autour d’eux la pression monte, les Fédéraux, le Syndicat du Crime, qui souhaite éloigner l’agitation que ces braqueurs apportent… Mais ils continuent, se diversifient même, dans le kidnapping, et parfois, les poches pleines, ont le loisir de profiter d’un moment de détente et de flambe, de courte durée.

C’est ainsi que Karpis, Freddie et Doc Barker se retrouvent sur les affiches des truands les plus recherchés des Etats-Unis, les Ennemis publics Numéro Un, en compagnie de Dillinger et son lieutenant Van Meter, « Baby Face » Nelson et « Pretty Boy » Floyd. Mais en quelques mois en 1934, ce sera l’hécatombe, le FBI ne fera pas de détails, peut-être pour faire oublier des déboires. La course météoritique de Karpis s’achèvera en 1936, par un coup de chance : il ne sera pas descendu mais arrêté et jugé. Il prendra perpète, séjournera 25 ans à Alcatraz (un record), sera libéré en 1969 puis expulsé vers le Canada. Il décèdera dans des circonstances troubles en 1979, en Espagne, en exil, non sans avoir livré ce récit haletant, extraordinaire de détails, de figures et de rebondissements où jusqu’à la fin la haine du FBI transpire.

Deux chapitres ont retenu mon attention en particulier : celui où Karpis évoque la vie des femmes dont les braqueurs s’entouraient, épouses, maîtresses, putains, toutes plus au moins liées, ne serait-ce que par endogamie sociale, au Milieu mais dont la condition n’avait rien d’enviable. Entraînées dans les cavales, recluses pendant des mois, ou tout simplement abandonnées quand il s’agit que les hommes échappent à la traque ou l’embuscade et devant faire face seules ensuite à des poursuites judiciaires. Celui aussi où Karpis décrit une corruption rampante qui, à tous les niveaux, judiciaires et municipaux notamment, autorisait les malfrats à échapper aux poursuites, raccourcirent leur peine, voire à entrer dans un jeu de poids et contre-poids profitable avec des officiels. Un triste tableau de l’Amérique de cette période.

Un atlas routier et criminel du Midwest des Thirties et 250 pages d’un récit, certes subjectif, mais trépidant et gorgé d’adrénaline, qui mitraille de tous les côtés flics, indics, gangsters eux-mêmes, simples citoyens au mauvais endroit au mauvais moment, ou alors, sur un autre plan, la version de l’Histoire qui n’est pas celle de Karpis.

« – Assez déçu, je suis allé à Joplin, dans le Missouri, où je suis tombé sur une drôle de situation en allant rendre visite à un vieil ami nommé Herb Farmer. Farmer était un type très accueillant et j’ai été surpris en constatant qu’il hésitait à me faire entrer chez lui. Il y avait trois personnes assises dans le living-room, un couple que je n’ai pas reconnu et Mickey Carey, un gars de ma connaissance qui avait tiré pas mal de temps à Leavenworth pour trafic de stupéfiants. Quant au couple, ils avaient l’air d’ouvriers agricoles. Le gars était tout jeune, un petit aux cheveux brun clair. La fille, elle, était toute menue,  pas plus de 50 kg toute mouillée, à mon avis, et elle louchait horriblement. Ils avaient tous les deux des visages totalement inexpressifs, comme les gens qu’on voit assis sur le pas de leur porte dans les campagnes reculées du Texas et de l’Oklahoma.

– Ces deux-là, m’a dit Carey en désignant le couple, ils ont des carabines automatiques Browning et ils voudraient savoir s’il y a des amateurs pour les acheter.

-Qu’est-ce que je peux bien faire avec des engins pareils ? j’ai demandé.

-Ils sont drôlement chouettes si on veut sauter d’une bagnole et se lancer dans une bagarre, a dit Carey.

Le couple n’a pas prononcé un mot. Ils continuaient à me regarder fixement.

-Ma foi, ça peut être utile si on se trouve coincé dans un immeuble, j’ai dit. Mais si on se met à courir avec ça à la main, on risque de se transformer soi-même en passoire.

Le couple me fixait toujours, sans même me voir, semblait-il. Là-dessus, Carey a annoncé qu’ils s’en allaient et ils sont sortis tous les trois.

-Des vrais dingues, ces foutus Texans, a dit Farmer, après le départ de leur voiture.

Je lui ai demandé qui était ce couple de cinglés.

-Clyde Barrow et sa nana, Bonnie Parker. Ils ont loué une maison à Joplin et tu peux être sûr qu’ils vont se mettre à braquer tous les drugstores et toutes les boutiques du coin. Ça me dit rien qui vaille.

J’avais entendu parler de Bonnie et Clyde et pas en bien. Barrow était un produit des camps de forçats du Sud et était recherché pour meurtres de flics dans tout le Sud-Ouest.

Une chose était sûre : quand Barrow et Parker s’amenaient quelque part, les ennuis n’étaient pas loin derrière. »

Paotrsaout

MAUVAISE GRAINE de Nicolas Jaillet / La Manufacture de livres.

Dans Mauvaise graine, Nicolas Jaillet nous conte l’histoire de Julie, trentenaire, institutrice, en apparence bien dans sa peau et dans son époque. C’est une maîtresse moderne, qui une fois la porte de sa classe fermée, retrouve ses copines, fait la fête, boit jusqu’à ne plus se souvenir de sa soirée, bref, qui n’a de compte à rendre à personne et le vit très bien. Jusqu’au jour où …

Où elle se retrouve enceinte. Mais de qui ? C’est LA question, car elle a beau être libre, et passer des soirées arrosées, dans son souvenir, il y a bien longtemps qu’elle n’a pas fini sa nuit avec un homme. Et de là, on attaque un second roman, complètement barré où tout part en cacahouète ! Le bandeau de couverture fait référence à Kill Bill, héroïne féminine qui se bat par vengeance. S’il faut une référence à Tarantino, je partirai davantage sur Une nuit en enfer dont il est co-scénariste, et pour lequel, à un instant du film, tout bascule. 

De la même façon, on se retrouve dans un univers parallèle où notre héroïne se découvre de supers pouvoirs et va s’en servir pour comprendre ce qui lui arrive et donner une nouvelle orientation à sa vie.

C’est l’histoire d’une jeune femme de notre époque, qui doit répondre à certaines contraintes, à certains diktats de notre société envers les femmes. Sa jeunesse lui permettait jusque-là de s’en affranchir et de laisser libre court à sa fantaisie et sa liberté. Pour autant, l’histoire la rattrape et elle doit faire des choix : rentrer dans le cadre défini pour elle ou s’assumer et reprendre en main sa vie et ses opportunités.

L’écriture va tout à fait avec l’histoire. Ce sont des phrases courtes qui construisent des chapitres brefs, ce qui permet de donner un certain rythme à l‘histoire. Le tempo est là, agrémenté d’un humour féroce mais présent tout du long. Tout comme au cinéma, nous sommes plongés dans la bataille. Julie nous communique son énergie, des bagarres aux scènes de sexe, rien ne nous est épargné, tout est minutieusement détaillé pour nous jeter au cœur de l’action.

Grinçant, et ça fait du bien !

Marie-Laure !

AUX VAGABONDS L’IMMENSITÉ de Pierre Hanot / La Manufacture de livres.

L’auteur lorrain Pierre Hanot après le récit romancé Gueule de fer (La Manufacture des livres, 2017) nous revient avec un roman noir et social inspiré de faits réels qui, tel un scopitone, projette des pastilles, instants de vie de ses personnages, pris dans la tourmente des événements de juillet 1961, au cœur de la ville de Metz.

En 1961, la guerre d’Algérie a profondément fracturé les sociétés française et algérienne. Après le Putsch des généraux avorté (avril), le 1er Régiment Chasseur Parachutiste qui s’est rangé du côté des mutins a été rapatrié d’Alger et encaserné en Lorraine. Les paras rongent leur frein et macèrent dans leur désir de revanche. La communauté nord-africaine, installée dans la vieille ville messine, essaie de faire profil bas. La plupart de ses membres a pour priorité de travailler et de joindre les deux bouts. En son sein, toutefois, les diverses factions politiques algériennes essaient de marquer des points, d’enrôler plus de soutiens et de prélever l’impôt révolutionnaire, quitte à tordre des bras. A ce jeu, le FLN est le plus puissant. Il n’entend pas non plus se laisser faire face aux brimades ou agressions racistes. Pour lui, la guerre se joue aussi sur le sol français. Les Messins s’inquiètent de la présence des Nord-Africains, la méfiance domine quand ce n’est pas la haine. Somme toute, Lorrains et Nord-Africains doivent vivre, travailler, se distraire côte à côte et, l’humain étant ainsi fait, ils y parviennent plus ou moins. Tout bascule la nuit du 23 juillet 1961, la « Nuit des paras ». Pendant quelques heures, Metz est à feu et à sang. Une escarmouche dans un bal, des représailles et les paras, tels des chiens lâchés, sortent des casernes pour ratisser la ville. Il y aura des morts.

Pierre Hanot raconte ainsi quelques jours en juillet à travers les instantanés d’anonymes, à la vie à jamais bouleversée par les « coups de l’Histoire ». Ils sont petit commerçant, militant FLN, journaliste stagiaire, jeune ouvrière d’usine, militaire ou employé de dancing… Pierre Hanot nous parle de leurs rêves, de leurs joies, de leurs doutes, de leurs déveines et de leurs blessures. Et puis ce qu’il restera abruptement d’une nuit barbare : amertume, honte, sang, trou noir de l’oubli… 

L’écriture de Pierre Hanot a ce côté décharné et efficace que lui envierait tout songwriter à la recherche de lignes éloquentes. Comme l’auteur a choisi un texte mosaïque, les courts chapitres rappellent un travail photographique, en noir et blanc il va de soi, quelque part entre Raymond Depardon pour l’aspect documentaire et Robert Doisneau pour l’aspect humain.  Vivant et authentique, le roman parvient, à partir d’événements locaux et de personnages ordinaires, à dézoomer pour offrir le portrait d’une France populaire, provinciale, à la fois crispée et désireuse de prospérer au tout début des années 1960. Pierre Hanot fait travail d’histoire en replaçant ses les violences de Metz dans la triste chronologie des ratonnades sur le sol français. Elles préfigurent celles qui, quelques mois plus tard, en octobre, se déchaîneront dans les rues de Paris et sur les berges de la Seine, sur commande cette fois et à plus grande échelle encore.

Un texte simple et juste mais c’est tout un travail de faire de la bonne littérature sociale sans tromperie.

Paotrsaout

AU NOM DU JAPON de Hiro Onoda / La manufacture des livres.

Waga Rubantō no sanjūnen sensō. [Guerre de 30 ans sur l’île de Lubang]

Traduction : Sébastien Raizer

On les appelle au Japon littéralement les « soldats japonais restant », stragglers (traînards) en anglais. Ce sont des soldats de l’armée impériale japonaise de la guerre du Pacifique qui, après la capitulation du Japon en septembre 1945 qui marque la fin de la Seconde Guerre mondiale, ont continué à se battre. Leurs raisons ? Soit un fort dogmatisme ou des principes militaires qui les ont empêchés de croire en une défaite, soit une ignorance de la fin de la guerre à cause de communications entre ces soldats et le Japon coupées lors de la stratégie du saute-mouton, d’île en en île, utilisée par les États-Unis.

Hiro Onoda, mort au Japon en 2014 à l’âge de 91 ans, était un des plus célèbres des soldats japonais restant. En décembre 1944, jeune officier formé aux techniques de guérilla, il est affecté sur l’île de Lubang aux Philippines. Quelques mois plus tard, l’offensive générale américaine passe à Lubang, les combats sont brefs. La guerre bientôt sera terminée, l’armistice signé. Mais à ce moment précis, le sous-lieutenant Hiro Onoda, est au coeur de la jungle. Avec trois autres hommes, il s’est retrouvé isolé des troupes à l’issue des combats. Toute communication avec le reste du monde est coupée, les quatre Japonais sont cachés, prêts à se battre sans savoir que la paix est signée. Au fil des années, les compagnons d’Hiro Onoda disparaîtront et il demeurera, seul, guérillero isolé en territoire philippin, incapable d’accepter l’idée inconcevable que les Japonais se soient rendus. Pendant 29 ans, il survit dans la jungle. Pendant 29 ans il attend les ordres et il garde sa position. Pendant 29 ans, il mène sa guerre, au nom du Japon.

Le récit qu’avait publié peu de temps après la fin de son incroyable expérience Hiro Onoda n’avait connu jusque-là qu’une traduction en anglais. Sébastien Raizer, écrivain et traducteur installé au Japon nous en donne aujourd’hui une version française.  Le texte est sans fioritures, le récit presque mécanique au départ quand Hiro Onoda raconte des éléments de son enfance et de sa jeunesse, son parcours de soldat. Ce n’est réellement que dans un deuxième temps que le vertige va s’installer face à ce qui relève d’une uchronie, d’une dystopie ou d’une étude sur la folie humaine. Hiro Onoda s’est véritablement enfui dans un autre espace-temps pendant presque 30 années. Son entraînement et son conditionnement à la guérilla lui ont permis de survivre mais l’ont également enfermé dans des convictions démentielles. Dans son esprit, les multiples missions de recherche dirigées vers les soldats égarés au fil des années ne pouvaient être que des leurres (même si des membres de sa famille y participaient) ou émettaient des signaux secrets qui ordonnaient qu’il ne fallait pas se montrer et continuer la mission. De toute façon, fidèle à son pays et sa hiérarchie, Hiro Onoda avait reçu l’ordre de mener ses actions jusqu’au retour de l’armée japonaise victorieuse sur l’île. Il avait l’interdiction de se sacrifier. Le déni de réalité a été une constante pendant toutes ces années. Les raids pour razzier ou terroriser les habitants ont fait une trentaine de morts en tout. La guerre continuait et c’est elle qui a eu raison de ses camarades, tués par les forces de police locales. A partir du moment où Hiro Onoda s’est retrouvé seul en 1972, ses convictions se sont fissurées petit à petit. Un globe-trotter japonais parvient à l’approcher. Il décide de se rendre finalement, son officier supérieur est venu le lui ordonner. En quelques heures, ce qui faisait son existence depuis trois décennies s’efface comme un mauvais rêve. 

Un effarant récit sur la fidélité à des valeurs, sur l’engagement sans limite, aux frontières de la folie.

Paotrsaout



TERRE PROMISE de Marc Villard / La Manufacture De Livres.

Marc Villard met le feu et ses escarbilles emportent l’hôtel Nadir, miteux et enkysté rue de la Charbonnière, Barbès DC. Autrement dit, l’auteur de Rebelles de la nuit, La Porte de derrière ou Quand la ville mord (récemment réunis à la Série Noire en une magnifique Barbès Trilogie écorchée) est de retour sur ses terres de prédilection. Alors forcément, ça cogne vite et juste.

À dix-sept ans, Jeremy et Estelle ont eux aussi réduit en cendres le peu que la loterie de la vie leur avait attribué. La mère nigériane de l’un vient de mourir dans l’incendie du bouge, celle alsacienne de l’autre macère dans son jus à douze degrés, quelque part à l’Est de nulle part. Alors, pour conjurer le sort et rêver d’un lendemain un brin ensoleillé, ils acceptent de faire la mule entre Paris et Londres, l’estomac tapissé d’héro. Pas sûr que le jeu en vaille une chandelle qui, selon l’expression, ne manquera pas de brûler elle aussi par tous les bouts.

On l’aura donc compris, ce court texte de 125 pages se consume ventre à terre et calcine tout sur son passage. De fait la teinte noire du carbone domine, mais comme toujours chez Marc Villard chantent les rythmes d’une écriture à la fois souple et mitraillée. On le sait, le clavier de l’auteur est celui d’un piano. Et, cette fois, ce sont la voix et le saxophone de Fela Kuti, le Black President, qui accompagnent son staccato soutenu, ce magistral équilibre de poésie brute et d’humanité de traviole.

En contrepoint d’une histoire sombre, on notera les traits au pastel des personnages, premiers rôles ou figurants fugaces, tortionnaires cupides ou passants hors-champ, tous unis par la mélancolie d’un barnum déliquescent. Des blanches, des noirs, leurs soupirs, leurs anicroches en guise de doubles croches, les bémols de l’existence, des points d’orgue aussi : encore de la musique en somme, on y revient toujours. Car, si la structure en toboggan de Terre promise se conforme à des chartes classiques du roman noir, son groove nous harponne de toute l’élégante simplicité de ses mélodies omniprésentes. De là à parler de mini-LP plutôt que de novella, il n’y a qu’un pas que nous franchissons allegro.

JLM


L’ Artiste d’ Antonin Varenne / La Manufacture de livres.

Allez, je ne vais pas y aller par quatre chemins ce texte est poignant. L’auteur nous a habitués à la qualité dans ses précédents romans et en se plongeant dans un polar au sens littéral du terme, il ne se perd pas. D’ailleurs y’a t-il un consensus pour la définition du terme polar? En tous les cas, Antonin en connaît les codes, il maîtrise le rythme et façonne des personnages qui permettent de cadrer son noir récit. L’apanage des grands auteurs, c’est aussi maîtriser un style sans y paraître, se l’approprier sans que le lecteur n’est conscience des efforts consentis. A n’en pas douter, l’auteur domine son sujet et nous ravit d’une lecture qui accapare, où le plaisir reste si fort qu’on la fait traîner en longueur. Car il faut dire, aussi, que les protagonistes croqués permettent inévitablement à s’identifier ou à ressentir une réelle bienveillance, compassion.

« 2001. Les nuits parisiennes voient naître un nouveau monstre. Un serial killer s’en prend aux artistes, transformant chacune de ses scènes de crime en oeuvre mêlant esthétisme et barbarie. L’inspecteur Heckmann, flic vedette du moment, se retrouve en charge de cette très médiatique affaire et se lance dans la traque. Mais bientôt il lui semble que tous ces crimes ne sont qu’un moyen pour le tueur de jouer avec lui… Avec ce roman policier, Antonin Varenne révèle une fois de plus son incroyable talent à nous entraîner dans une course infernale où ses personnages doivent lutter contre leurs propres démons autant que contre le fracas du monde. »

On est à Paris en 2001 et le premier de la classe de la Police Judiciaire est aux prises avec une série de meurtres dans le milieu de l’Art. L’esthétique se mêle au sordide et à l’innommable. Or l’homme de loi présente ses anfractuosités, ses fêlures et dans son isolement, quasi pathologique, il trouvera des alliés de circonstances pour le moins surprenants et contrastés. L’auteur prend le temps de décrire les différents profils et leur associer leur propre histoire sans, pour autant, nuire au rythme romanesque. Et, cette petite musique nous envahit sans prévenir avec force, persuasion et finesse. Elle nous trotte dans la tête et ne nous lâche pas. Addictive, on est perpétuellement poussé à rouvrir le livre pour connaître la suite. Mais, comme précisé ultérieurement, on laisse infuser et on se plaît à disséquer les pages afin de prolonger le contentement. Antonin Varenne manie la plume avec aisance et peut se targuer d’y inclure une dose poétique. Qui peut aborder les écrits de Saint Augustin tout en faisant sens à la trame criminelle? 

Mais il aborde, plus prosaïquement, des thèmes du quotidien tel l’héritage, la parentalité, l’amitié, le couple pour se fondre dans un tableau noir et sang. De part ce parti pris, il humanise avec sincérité et sensibilité le paradoxe d’une série d’homicides qui graviront les marches une à une de l’horreur à l’état brut. Sans déflorer la chute du roman, je peux me poser résolument la question si Antonin Varenne apprécie le cinéma américain de base adepte des happy-end? Quoique…

C’est ragaillardi et rasséréné que je referme ce livre en ayant pleinement conscience d’avoir lu un ouvrage de qualité par un auteur brillant qui sait mêler sa belle plume aux desseins pourtant sombres.

Antonin Varenne est un artiste!

Chouchou.


L’ EXTRAVAGANT MONSIEUR PARKER de Luc Baranger / La Manufacture de livres.

Billy The Kid (1859-1881) est pour tous désormais entré dans la légende de l’Old West américain. Dans sa violente et fulgurante carrière d’outlaw, il aurait descendu autant de types qu’il aurait vécu d’années, soit 21. De nombreux éléments de sa vie et de sa mort sont toutefois sujets à précaution, controversés et obscurs car tirés de récits romancés, de biographies contradictoires ou de témoignages fumeux. La littérature et le cinéma ne sont pas privés en tout cas d’apporter leur contribution à l’élaboration du mille-feuille mythique. Luc Baranger, citoyen canadien né à Trélazé (Maine-et-Loire) est le dernier en date à nous raconter quelque chose de Billy The Kid. Auteur de polars, traducteur, féru de blues et d’histoire américaine (ce qui transpire dans ces publications, citons le très bon Tupelo Mississipi Flash en 2004), il n’avait pas publié directement en France depuis une dizaine d’années.

Albuquerque, automne 1949. Maureen McLaughlin, douce mère de famille, fait la connaissance de l’intriguant Leroy Parker qu’elle est chargée d’assister dans ses travaux ménagers. Au fil des semaines se noue entre la femme et le vieil homme une solide amitié. Jusqu’à cette journée d’hiver où Leroy révéle à Maureen son secret. Celui qui fit jadis trembler le Sud des États-Unis et que tous ont cru mort, le légendaire Billy the kid, c’est lui.
Commence alors pour Maureen et sa famille, entre incrédulité et fascination, un voyage dans le passé du vieil homme et dans les mythes de l’Ouest américain.

Raconté par Abigail, arrivée elle-même au crépuscule de son existence, le récit revient sur la tendre relation entretenue par un vieil homme (un Billy The Kid pas franchement rangé des camions mais en tout cas retiré de la circulation sous cette appellation) et les membres de la famille dont la mère est devenue son aide à domicile. Il est attachant, ce vieux Monsieur Parker, et diablement fascinant. Avec un plaisir féroce, il va livrer les détails de son existence agitée et les secrets qu’il gardait jusque-là pour lui. Profitant de la faculté de la poussière à ne pas retomber immédiatement après une cavalcade ou une échauffourée, il a, il y a bien longtemps, judicieusement laissé le cadavre de Billy The Kid (soi-disant abattu par Pat Garett) entrer dans la légende et promené sa peau d’homme anonyme en compagnie d’autres mauvais garçons célèbres (Butch Cassidy, The Sundance Kid…) ou d’aventuriers prompts à participer à des entreprises belliqueuses, fût-ce sous le drapeau d’une nation qui prétend agir pour le bon droit. Quand il raconte cela, il a quatre-vingt-douze ans, et il en a vu. Plus que témoin de son temps, il a été acteur d’événements agités, survenus avant et après son décès officiel.

Solidement documenté, le roman nous donne à revivre un pan de l’histoire de l’Ouest, revisité avec une allégresse qui favorise les pistoleros, qui n’auraient pas tous fini sous les balles des shérifs, marshals ou autres agents Pinkerton, comme le voudrait la version officielle qui se prend au passage une belle volée de plomb et d’ironie. Et jusqu’au bout, Monsieur Parker reste un kid facétieux mais sans remords et pas prêt à le se laisser pisser sur les bottes.

Un joli pied de nez à l’Histoire, le genre de conte qu’il faut raconter aux petits comme aux grands, ça leur fera les dents.

« (…) Il m’écrasait de tout son poids quand j’ai pressé la détente. Je dis pas que j’y ai pris du plaisir, mais je l’ai fait sans me poser de questions. C’était lui ou moi. On vivait en permanence avec la violence et la mort. C’était comme ça en ce temps-là.

   Sentant une gêne autour de la table, Parker argumenta.

– La plupart des hommes que je côtoyais quand j’avais dix-sept dix-huit ans, ils avaient combattu pour le Nord ou pour le Sud. Ils avaient été de la plupart des boucheries, comme celles de Bull Run, Shiloh ou de Gettysburg. A Gettysburg, dix-sept mille morts, trente-trois mille estropiés. En trois jours. Vous vous rendez compte ? Y a des chiffres comme ça qu’ont le don de vous donner une drôle d’idée de l’amour du prochain. Les pires rascals que j’ai croisés quand j’ai commencé à vivre du jeu dans les saloons de Silver City et plus tard d’Arizona, ils avaient fait partie des bandes de jaywalkers ou de bushwhackers, avant de changer de nom et de disparaître en Territoire Indien ou au Nouveau-Mexique. Faut tenir compte de ces choses-là pour comprendre ce que j’ai fait. C’était une toute autre époque qu’aujourd’hui où on trouve un policier à chaque coin de rue. J’imagine que c’est pas facile à comprendre, mais dans ces années-là, chaque particulier était la loi. »

Paotrsaout


3 MINUTES, 7 SECONDES de Sébastien Raizer / La manufacture de livres.

“Sébastien Raizer est le cofondateur des Éditions du Camion Blanc, qui ont publié des cargaisons d’ouvrages sur le rock, et de la collection Camion Noir, aliénée aux cultures sombres.Il est l’auteur de la trilogie transréaliste des « Équinoxes » à la Série Noire (L’alignement des équinoxes, Sagittarius, Minuit à contre-jour), ainsi que d’un Petit éloge du zen.Il vit à Kyoto où il pratique le iaido et le zazen.” Présentation de  La manufacture de livres.

Entretien avec l’auteur septembre 2017.

Sébastien Raizer s’est fait connaître du plus grand public par sa trilogie des Equinoxes, oeuvre imposante, impressionnante et très exigeante. Aussi après lecture, est-il curieux de de le voir rompre le silence, rejoindre les rivages occidentaux, les étals des librairies françaises avec uniquement une novella.

Ceci dit, “ 3 minutes 7 secondes” prolonge cette réflexion personnelle lue précédemment, alimentée par un souffle oriental qu’il respire maintenant tous les jours. Si vous ne connaissez pas Sébastien Raizer, le propos, plus facilement abordable ici, sera certainement une belle manière d’entrer dans l’univers complexe de l’auteur tandis que les aficionados retrouveront certaines thématiques, évolueront dans une certaine paramnésie douce.

“Au crépuscule, le vol MU 729 a quitté Shanghai pour rejoindre Kyoto. Mais tandis que l’appareil survole la mer de Chine, un missile balistique nord-coréen prend le Boeing 777 pour cible. L’information est transmise au pilote. Dans quelques instants, l’appareil sera détruit. Aucune échappatoire.
À bord de l’avion, trois cent seize passagers vivent leurs derniers instants. Il ne leur reste que 3 minutes et 7 secondes pour savoir quel sens donner à ces ultimes moments.”

Le commandant de bord, son second, des membres du  personnel navigant, un photographe hollandais, un jeune Américain, les protagonistes de cette “chronique d’un mort annoncée”. Trois minutes et 7 secondes avant le chaos, le néant .

Plusieurs destins confrontés à la fin, la manière de chacun d’aborder cette issue fatale… On est très loin d’un roman catastrophe. Dans cet avion, les personnes ne sont plus sur Terre mais ne sont pas mortes non plus. C’est ce passage vers le néant, cet état instable et hautement déstabilisant qui  est raconté: les considérations de chacun, les souvenirs, les regrets, les ultimes désirs pour quitter la vie parfois très antagonistes, les cruelles terribles dernières trahisons. C’est du grand art, puissamment troublant !

“Chaque voyage est d’abord un voyage en soi. »

壮大

Wollanup.

 

TUER JUPITER de François Médéline / La manufacture de livres.

A Nyctalopes, on n’a pas eu le droit à “la grande fiction politique de la rentrée” par la Manu. Et ce n’est pas très grave puisque cette rentrée a été particulièrement féconde. Néanmoins, “Curiosity killed the cat”. La promotion depuis le mois de juin, les premiers commentaires dithyrambiques des garants du bon goût en matière de littérature noire ont commencé à faire leur effet inconscient. La sortie tant attendue du roman a enflammé pendant quelques jours les médias nationaux y voyant là une possible relance du feuilleton de l’été Alexandre “Le bienheureux de l’Elysée” Benalla. Après, les blogs amis de l’auteur,( ben ouais, vous croyez quoi, que Nyctalopes serait le seul blog à avoir des amis auteurs donc synonymes de corrompus, subjectifs et putassiers ?), et là les louanges ont évoqué Voltaire et Montaigne, James Ellroy, un grand roman politique et même (Damned!) un éveil à la vie politique pour une personne… Bon, chacun a parfaitement le droit d’écrire ce qu’il veut comme chacun a parfaitement le droit d’éditer ce qu’il veut.

En passant chez mon libraire, je n’ai finalement pas résisté, particulièrement conscient de mon statut de victime du consumérisme. Première surprise, le grand roman politique fait 133 pages et se devra d’être donc particulièrement percutant vu son format ramassé. François Médéline a déjà écrit deux très bons romans.C’est un type intelligent que j’ai rencontré à Mauves en Noir il y a quelques années mais il ne doit en garder aucun souvenir, vif et très provocateur.

Provocateur au point de se foutre de la gueule des lecteurs avec ce “Tuer Jupiter”? Macron est mort empoisonné et Médéline va remonter dans le temps pour expliquer comment on en est arrivé à un tel drame. On remonte et puis tout d’un coup, c’est fini. On vérifie qu’on ne s’est pas fait voler avec une version tronquée, Ali express… mais non. Médéline a un style agressif appréciable et le roman est vite avalé mais quelle banalité.

François Médéline a travaillé dans le milieu des parlementaires et politiques pendant des années, il connaît bien le milieu, sait bien des choses sur ses fauves que le commun des mortels ignore et il s’est contenté d’attaques à deux balles, parfois bien basses sur le physique, de compiler des lieux communs, de conforter le jugement de la majorité, enfonçant le clou sur des clichés sur Trump, sur Macron, sur Poutine et ses deux têtes de turc Larcher et Collomb ou reprenant des infos qu’on trouve toutes les semaines dans “Courrier international”, “le canard enchaîné” ou… “Gala” je suppose.

Après, on peut toujours se marrer de ces fléchettes. On sent aussi parfois, trop brièvement, la colère. Quand on connait un peu le parcours professionnel de François Médéline dans les arcanes du pouvoir, on se demande si ce “Tuer Jupiter”ne serait pas aussi, un peu, “tuer le père”. Peu importe finalement, je regrette juste que François Médéline qui avait une trame pour écrire le grand roman politique qu’on est en droit d’attendre de lui se soit contenté d’une fabulette particulièrement mainstream et people.

Anecdotique.

Wollanup.

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