Chroniques noires et partisanes

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LA NOIRE ET LA SÉRIE NOIRE EN 2023 / Toutes les sorties françaises

Lundi 21 novembre à 10 heures, au 7 de la rue Gallimard à Paris, ont été présentés aux libraires parisiens, les percutants programmes de la Série Noire et de la Noire pour l’année 2023. Un bien bel endroit à l’ambiance feutrée, un haut-lieu de la littérature française.

Stéfanie Delestré et Marie Caroline Aubert, éditrices des collections étaient présentes : Stéfanie Delestré était accompagnée par tous les auteurs français qui ont dévoilé leurs nouveaux romans dans un exposé d’une dizaine de minutes chacun, l’éditrice ajoutant, par ailleurs ses propres commentaires. Marie-Caroline Aubert a introduit avec talent et humour les auteurs étrangers qui seront au catalogue, on salive déjà mais on en reparlera plus tard avec elle, elle a promis !

Concernant les auteurs français, en 2023, la SN sort l’artillerie lourde… que des quinquas expérimentés qui ont déjà montré leur valeur… Manquent peut-être quelques plumes féminines. Néanmoins, ça a méchamment de la gueule :

Thomas Cantaloube, Marin Ledun, Caryl Ferey, Antoine Chainas, DOA, Olivier Barde-Cabuçon, Jacques Moulins, Sébastien Gendron et Pierre Pelot (absent mais ayant laissé un message de présentation). 

Bien sûr, on vous reparlera de ces romans au moment de leur sortie, mais voici déjà quelques mots sur chacun d’entre eux, quelques notes griffonnées à partir des dires des auteurs. 

Par ordre de sortie dans l’année et sans commentaires partisans malgré l’envie qui tenaille.

 BOIS-AUX-RENARDS (contes, légendes et mythes) de Antoine Chainas

Roman situé dans la vallée de la Roya en 1986, aux débuts de la consommation de masse. Un couple tue des femmes pour ses loisirs mais une gamine est témoin d’un des meurtres. Un roman noir teinté de fantastique (mythes et contes). 

Par l’auteur de Empire des chimères

RÉTIAIRES de D.O.A.

Roman sur la lutte contre le trafic de stups et très proche d’un roman procédural avec une lutte entre les services de police. Roman familial, les liens du sang et les thèmes de la vengeance et de la responsabilité. 

Par l’auteur de Pukhtu.

MENACES ITALIENNES de Jacques Moulins.

A EUROPOL, un fonctionnaire cherche à faire reconnaître le terrorisme d’extrême-droite, inquiet sur ce qu’est en train de devenir l’Europe braquée sur la menace islamique, oubliant la lente et sûre montée de l’extrème droite. Dans le viseur, l’Italie.

Par l’auteur de Retour à Berlin.

HOLLYWOOD S’EN VA EN GUERRE de Olivier Barde-Cabuçon.

1941, Charles Lindbergh, l’engagement de Hollywood pour l’entrée en guerre des USA. Un hommage au cinéma noir et blanc et à Chandler avec une détective de choc Vicky Malone.

Par l’auteur de Le cercle des rêveurs éveillés.

FREE QUEENS de Marin Ledun

Roman proche des Visages écrasés sur les techniques de vente et de consommation mais dans le contexte nigérian. Par l’enquête sur l’assassinat de deux jeunes prostituées, on découvre le Nigéria et les expérimentations que peuvent se permettre les grandes firmes internationales pour vendre leurs produits, et en l’occurence ici, de la bière.

Par l’auteur de Leur âme au diable.

MAI 67 de Nicolas Cantaloube.

On retrouve les trois personnages de sa série sur les années 60 et on fait un bond de cinq ans dans le temps pour se rendre en Guadeloupe où le département d’outre mer ressemble plus à une colonie qu’à un territoire de la république. Une manifestation contre la vie chère est réprimée dans le sang.

Par l’auteur de Frakas.

OKAVANGO de Caryl Ferey

Entre Rwanda, Namibie et Angola, Caryl Ferey raconte une histoire sur une des plaies africaines : le trafic d’animaux.

Par l’auteur de Paz.

LOIN EN AMONT DU CIEL de Pierre Pelot.

L’auteur de plus de deux cents romans dont “l’été en pente douce” revient à ses premières amours, le western. 

A la fin de la guerre de sécession, quatre sœurs sont victimes d’une bande de hors-la-loi.L’une meurt et les trois autres vont arpenter l’Arkansas et le Missouri pour se venger. Roman très violent.

Par l’auteur de Les jardins d’Eden.

Chevreuil de Sébastien Gendron.

Un citoyen britannique s’installe en Charente Maritime orientale. Les relations avec les autochtones et notamment les chasseurs vont vite se détériorer.

Par l’auteur de Chez Paradis.

***

Fin de la réunion vers 13 heures.

Clete.

PS: De grands remerciements à Antoine Gallimard, Marie-Caroline Aubert, Stéfanie Delestré et Christelle Mata.

RETOUR A BERLIN de Jacques Moulins / Série Noire

“À Berlin, Deniz Salvère dirige une unité européenne antiterroriste qui a récemment mis hors d’état de nuire un groupe de pirates informatiques liés à l’extrême droite slovaque. Quelques mois plus tard, trois individus impliqués dans cette affaire trouvent la mort. Un cahier découvert chez l’une des victimes lance son équipe aux quatre coins de l’Europe pour déterrer d’autres indices et remonter jusqu’aux commanditaires, car les identifier, c’est aussi mettre au jour les méthodes utilisées par l’ultra-droite pour déployer ses tentacules sur le Vieux Continent…”

“Retour à Berlin” est la suite de “ Le réveil de la bête” paru également à la SN en septembre 2020 et qui vient de sortir en folio. On peut très bien ignorer le premier volume et se lancer dans cette nouvelle enquête de cette équipe d’ Europol dirigée par Deniz Salvère vu que de nombreuses pages au début rappellent le passé des personnages mais il me semble qu’il serait plus judicieux de démarrer au début pour être bien accoutumé aux méthodes et à la vie de ces flics de l’ombre qui progressent difficilement, freinés voire bloqués par les législations européennes et les réserves des gouvernements et des polices des états européens incriminés.

“Retour à Berlin » n’est pas une lecture confortable, n’offre pas de péripéties sanglantes ou spectaculaires mais propose une enquête minutieuse où le suspense est toujours présent de manière très pointue. Dans un entretien qu’il nous avait accordé l’an dernier, Jacques Moulins, l’auteur, journaliste, spécialiste des affaires européennes, avait déclaré: “Je m’appuie sur une réalité d’Europol en rajoutant une part de fiction, ainsi que les relations entre ses fonctionnaires et les responsables politiques. J’ai voulu traiter ce sujet car il est d’actualité, relater la relation France-Allemagne, les difficultés de l’Europe en termes de politique et la montée de l’extrême droite… C’est une forme d’avertissement !

Jacques Moulins en remet donc une couche. Il y a un an, peut-être que certains n’avaient pas vu l’actualité, le caractère pertinent d’un tel roman pour la politique de notre pays. Le racket, le chantage, les extorsions, les menaces, les intimidations, la cybercriminalité et les assassinats présents dans cet ouvrage devraient avoir plus d’écho ce coup-ci à quelques mois d’une élection présidentielle en France où l’exemple slovaque des agissements de la Bête dans le roman semblent transposables à la situation française dans un scénario catastrophe.

Nul doute que les résultats du scrutin français nous entuberont une fois de plus mais, au moins, grâce à ce roman, vous saurez, à un moment où les fachos, par deux voix différentes mais par une union dans la doctrine, caracolent dans les sondages comment travaillent les nuisibles et quelles sont leurs stratégies, leurs alliés pour prendre le pouvoir par des voies dites démocratiques.

Urgent et important.

Clete.

ENTRETIEN EXPRESS avec Jacques Moulins pour « Le réveil de la bête » / Série Noire.

Après avoir lu et chroniqué « Le réveil de la bête » qui m’a vraiment emballé, j’ai eu le privilège de m’entretenir avec l’auteur Jacques MOULINS. Le contact s’est fait en toute simplicité par téléphone, questions-réponses en direct, spontanéité et bon moment en prime.

Parlez-moi de vous :

Je suis journaliste…pour le reste je suis discret et tiens à le rester. 

Ok, très bien et l’écriture, pourquoi, depuis quand ?

C’est une réelle passion, j’écris depuis l’âge de 13 ans, j’ai commencé par des poèmes.

Puis j’ai pensé à écrire un roman historique mais cela me laissait moins de place à l’imaginaire et à la fiction. Je me suis donc tourné vers le roman policier.

Pourquoi ce thème ?

Je m’appuie sur une réalité d’Europol en rajoutant une part de fiction, ainsi que les relations entre ses fonctionnaires et les responsables politiques. J’ai voulu traiter ce sujet car il est d’actualité, relater la relation France-Allemagne, les difficultés de l’Europe en terme de politique et la montée de l’extrême droite… C’est une forme d’avertissement !

Le roman est très précis, très documenté, comment avez-vous procédé ?

Je me suis inspiré de l’actualité, de mon imaginaire, de rencontres et de mon parcours personnel mais une chose est sûre, je ne connais aucun Milosz ! (rires…)

Comment avez-vous écrit et construit votre roman ?

Je l’ai écrit sur plusieurs mois à la main contrairement à ce que je fais en tant que journaliste ou je rédige mes articles sur ordinateur, je tiens à faire un vrai distingo entre les 2. Je l’ai construit en pensant déjà à la suite, tout est déjà en place.

Super nouvelle, il y a donc une suite ! Peut-on en parler sans spoiler quoi que ce soit ?

Bien sûr, vous l’avez-vous-même souligné dans votre chronique, il y aura une suite, le 2ème est déjà bien avancé, on y retrouvera un certain nombre de personnages marquants avec bien entendu des évolutions et un autre contexte.

Et bien j’ai hâte ! Quel est votre état d’esprit à la sortie de votre premier roman, quels sont les retours ?

Pour le moment c’est positif, j’attends encore d’autres retours par GALLIMARD. Le contexte est un peu particulier en raison du COVID, beaucoup d’évènements sont annulés et je reste dans l’attente.

Par curiosité, avez-lu ma chronique sur le site Nyctalopes ?

Bien entendu, j’avais déjà entendu parler du site et vous avez été les premiers à me chroniquer, j’en suis ravi, merci.

Merci à vous, merci pour cet échange et j’espère vous lire très prochainement.

Nikoma

Entretien téléphonique réalisé vendredi 25 septembre.

LE REVEIL DE LA BETE de Jacques Moulins/ Série Noire

C’est un premier roman ? Eh bien, chapeau bas M. Jacques Moulins. Je n’ai malheureusement rien trouvé sur le net pour vous présenter l’auteur et ne connaît donc rien de son univers mais il fait une entrée et/ou une rentrée fracassante.

Pour ce qui est du roman, on suit une enquête palpitante à dimension européenne. Tout débute par le meurtre de Maryam Binébine, une jeune femme retrouvée égorgée dans son appartement parisien. Il s’avère qu’elle avait infiltré via le net un groupe d’ultra nationalistes des pays de l’Est très actif et dangereux. Son activité l’avait conduite à devenir une informatrice de la section antiterroriste d’Europol. Deniz Salvère, en contact avec elle, à la direction du service, se saisit de l’enquête. On découvre alors le fonctionnement plutôt méconnu d’Europol, des enjeux politiques et de l’essor de l’extrême droite en Europe. L’enquête nous fait voyager en passant des Pays-Bas à la France, la Slovaquie ou encore en Allemagne et démontre la fragilité des relations entre l’Europe de l’Ouest et celle de l’Est.

Au fil de l’histoire, on fait la connaissance de beaucoup de personnages, avec chacun leur personnalité et leur histoire et l’auteur réussit avec talent à les rendre marquants. Milosz en fait partie, lui le jeune homme dont la vie cassée et violente l’a poussé à rencontrer Pet, Mattheus, Bor, Gert…sa nouvelle famille. Il bosse pour cette bande d’ultra en devenant naïvement un brillant pirate informatique. Il réussit même avec Lencka, sa petite amie à rêver d’un avenir meilleur et partir loin de cette vie de merde. La violence et l’alcool pour lui, les coups et les viols pour elle.

La cybercriminalité est au cœur du roman et fait froid dans le dos. Elle n’est pas palpable et pourtant, elle permet de se ramifier partout, dans tous les domaines, de propager des idées, de faire gagner des élections et de tuer quand c’est nécessaire. Deniz Salvère et son équipe luttent sur le net comme sur le terrain, cherchant les liens entre les deux, c’est ce qui donne à l’enquête toute sa complexité et sa densité. L’histoire nous plonge dans l’action sans jamais faire de pause, c’est précis, documenté et du coup ça devient flippant de réalisme. Les chapitres sont courts, fixés sur un personnage en général et à chaque chapitre un point de vue, le tout parfaitement lié.

Et cette fin qui nous achève, heureuse pour certains, douloureuse pour d’autres.

On peut rêver à une suite avec les mêmes personnages, ou tout simplement à un deuxième roman rapidement, ce qui est sûr, c’est que c’est excellent du début à la fin.

Nikoma.

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