Traduction : Marthe Picard.

« Arjun Clarkson est le rêve américain incarné : cet orphelin indien issu d’une basse caste, complexé et peu sûr de lui, a immigré à New York où il connaît une brillante carrière dans la publicité. Jusqu’au jour où, dans un accès de folie, il poignarde une ancienne collègue…
Pour brouiller les pistes, Arjun décide de faire croire à l’existence d’un tueur en série chassant ses proies sur le plus populaire des réseaux sociaux : MyFace. Certes, cela implique de commettre d’autres assassinats, mais n’est-ce pas l’occasion rêvée de se venger de tous ceux qui se sont moqués de lui ?
Au fil des meurtres, la rumeur de ce « tueur de MyFace » s’amplifie et sème la panique sur la toile, car Arjun est un excellent publicitaire. Sa distraction, en revanche, risque de compromettre sa carrière de serial killer… »

A propos de l’auteur Arun Krishnan, Asphalte dit : « Arun Krishnan est né en Inde et vit désormais aux États-Unis. Professionnel du marketing et de la communication, il travaille pour de nombreuses entreprises technologiques et organisations non gouvernementales. » et c’est sans nul doute pour cela que le discours de l’auteur sur les réseaux sociaux est si pertinent. Krishnan analyse les comportements, les codes, les règles d’un réseau social nommé Myface, composé à partir de Myspace et facebook, vous aviez sûrement reconnu et c’est passionnant, très mordant et souvent très drôle et parfois un peu moins hilarant quand on retrouve ses propres travers. Je vous ferai grâce de mon état d’esprit quand apparaît sur mon actu la premier dent de la petite dernière, les poses du chat, le contenu de l’assiette du repas au restau, des groupes hilares par forte addiction alcoolisée, les pieds et les jambes de la copine terminés par ses doigts de pied en éventail devant la mer turquoise, des selfies dégueu, des photos déplacées, des analyses politiques du café du commerce, la directrice de collection en maillot de bain…tous ces trucs qu’on reçoit qui nous gonflent mais qu’on aime bien balancer par ailleurs ! Ayant créé mon profil pour le site, je ne vais pas non plus cracher dans la soupe mais chacun risque d’y retrouver ses propres erreurs, les manifestations de son égocentrisme, l’exposition de son narcissisme ainsi que sa subordination à la mode ou au message bien-pensant dans des pages particulièrement mordantes.

Forcément se dégage un portrait terriblement féroce d’une élite newyorkaise qui bosse à Manhattan mais vit dans des placards à Queen’s. Une classe dirigeante, branchée, blanche, WASP avec une moralité Nouvelle Angleterre très austère qui codifie tous les rapports entre les individus y compris et surtout les rapports sentimentaux.

Toute personne ayant vécu à New York, verra rapidement la justesse de la description et s’apercevra que les goûts, les choix, les snobismes, les tropismes présentés dans le roman font montre d’une connaissance très pointue de ce petit monde où à la première rencontre, avant de voir si on pourrait se plaire, on annonce combien on gagne et donc si on appartient au même monde.

Enfin, « Indian Psycho » est un bon thriller mais que l’on devrait plutôt aborder comme un conte cruel dans le théâtre extraordinaire de Manhattan parce que si Arjun exploite les failles laissées par ses victimes sur les réseaux sociaux, le gouffre, c’est quand même du côté de l’enquête qu’il est le plus béant favorisant cette grande boucherie que nous allons vivre dans la peau de l’assassin.

Non par le ton mais par certains points comme le cadre, le milieu évoqué,  on pourra rapprocher le roman de celui de Brett Easton Ellis  » American psycho » et en partie pour les difficultés d’intégration au très réussi « Indian Killer » de Sherman Alexie où on parle d’Amérindiens.

« Indian Psycho » s’avère très rythmé et le ton est particulièrement drôle et, malheur, on finit presque par s’attacher à ce grand malade qu’est Arjun. Au fur et à mesure que le roman avance, on sent que le filet se resserre, que la fin est proche mais ceci dit, l’auteur ayant pris quelques libertés avec l’authenticité dans l’intrigue, on peut aussi aisément penser qu’il pourrait tout aussi bien surprendre dans l’épilogue.

Pointu et acéré.

Wollanup.