Ce que Fanny Wallendorf fait de Richard Fosbury et de ses débuts dans la carrière sportive s’appelle un petit miracle : je m’entends, on pourrait facilement poser le livre après avoir lu distraitement la quatrième de couverture. Non pas qu’elle serait mal réalisée, cette quatrième, mais parce qu’on peut très bien se dire – et moi la première – une histoire de sportif, oui, pourquoi pas, finalement non.

Laissez-moi vous dire que ce serait une grossière erreur que de passer à côté de ce récit, tellement il est délicat, passionnant et, certainement, inoubliable. Parce qu’il y a une douceur, une tendresse dans l’écriture de Fanny Wallendorf qui a l’air de couver des yeux non seulement son personnage principal, Richard, mais aussi tous les autres, importants ou anecdotiques, qui est extrêmement touchante. Parce que une fois installés dans le récit vous y serez bien. Vous y serez sereins. Vous ne voudrez plus en sortir.

A quatorze ans Richard n’arrive pas à progresser au saut en hauteur. D’ailleurs, si cela ne tenait qu’à lui, il pourrait plafonner à 1,62 mètre éternellement. Ce qu’il préfère dans ses entraînements ce sont les copains et le trajet entre le gymnase et la maison. Le trajet qu’il appellera un jour Jack’s Path d’après le nom d’un labrador qu’il ne manquait jamais de saluer en passant.

« Le trajet entre le gymnase et chez lui, effectué chaque jour de la semaine dans un sens puis dans l’autre, est ce qu’il préfère dans l’entraînement. Il en aime tous les détails, inépuisables, il guette leurs variations dans les lumières des saisons. C’est comme une immense chasse au trésor, sans qu’il sache après quel butin il court. Il en ressort invariablement avec une sensation de récompense, de gratification, de confirmation d’une joie obscure en lui. »

Richard est une nature heureuse et contemplative. La compétition ne l’intéresse pas. La découverte si, la nouveauté, l’expérimentation. Son corps, dégingandé, qui paraissait l’empêcher de progresser dans sa discipline sportive, devient par un pur hasard son meilleur allié. Et tout change.

L’Appel n’est pas que l’histoire imaginée de Richard Fosbury, c’est aussi un superbe coming of age solaire, doux et touchant, une histoire d’amour belle comme les premiers amours savent l’être, le passage d’un jeune garçon à l’âge de l’homme.

La découverte du saut dorsal, faite en solitaire lors de ses entraînements, met Richard sur Sa voie : désormais il cherchera par tous les moyens d’améliorer ce saut, contre vents et marées, non pas tant pour prouver quelque chose aux autres mais pour mieux approfondir ces instants où il est littéralement habité par le saut. Son corps, son outil, il le fait plier à coups de concentration et travail.

J’ai refermé L’Appel un grand sourire aux lèvres : et je souris maintenant à chaque fois que j’y pense.

Monica.