Les courts et nombreux chapitres de Capitaine Vertu sont tous nommés de façon lapidaire : 1848, Sans suite, Refus , etc. Jusqu’à l’ultime Aurore . On entre dans ce livre comme on se retrouve enveloppé par le brouillard, quelles sont les parts de rêve et de réalité ?
Tout au plus, on trouve bien quelques échos à une actualité récente, aux mécontentements populaires et à ses répressions.
Le capitaine Vertu, nous confia un jour le lieutenant Blanc qui avait servi sous ses ordes pendant près de dix ans, croyait en quelque sorte que chaque enquête qu’elle devait résoudre était la pièce d’un puzzle, et qu’une fois toutes les enquêtes résolues elle obtiendrait une réponse, une image claire et précise de trafics en apparence disparates et pourtant tous liés, une radiographie profonde du mal, qui lui dirait comment poursuivre la lutte, qui lui permettrait d’atteindre ce qui devait être son horizon ultime et inaccessible, le démantèlement des réseaux en cours et à venir, la chute définitive de ceux qui se trouvaient au sommet des hiérarchies multiples et ramifiées du crime.
Alors le personnage qui donne son titre au roman de Lucie Taïeb, la capitaine Vertu, arrive telle une légende. On la découvre taciturne, pugnace, solitaire, sans aspérités, sans goût pour les relations sociales.
Sa vie est racontée par d’autres, à contre-jour. Le récit s’éclaire au fur et à mesure des affaires résolues par la capitaine jusqu’à son départ soudain de la police et sa disparition.
Commence alors un autre récit, celui de sa vie et de ses naissances ; puis apparaissent les raisons intimes et entremêlées qui la font entrer puis sortir de la police. Parallèlement, on sent poindre chez Vertu plusieurs formes de culpabilité en relation avec son métier.
Lors de ma lecture, j’ai repensé à Fausse Balle , le premier roman de Paul Auster publié à la Série Noire sous le pseudo de Paul Benjamin. Capitaine Vertu est tout aussi âpre, on y avance dans une brume épaisse en se cognant aux chapitres, l’écriture assez froide semble souvent nous tenir à distance. Toutefois, ce serait dommage de ne pas s’y atteler, car d’une part il est court donc sa lecture ne se transforme pas en épreuve, et d’autre part, Lucie Taïeb instille un climat qui happe dès les premières pages.
NicoTag
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