Sans élaborer un bilan supplémentaire de l’année écoulée, on peut néanmoins déclarer que la collection NEO NOIR de Gallmeister a été le grand succès critique de 2015 et j’ose espérer que l’engouement public a été similaire. Parrainée par un Benjamin Whitmer à qui ,avec « Pike »en 2013, on doit l’arrivée de polars propulsés par la meth dans une maison plutôt spécialisée jusqu’alors dans le Nature Writing. Caractérisé par des épisodes particulièrement violents mettant en scène les pire penchants des pire individus blancs péquenauds du Midwest ou du Deep South se distinguant très souvent dans de piteuses histoires de braquages et de dope et par un humour noir assez ravageur si on arrive à supporter certaines scènes de barbarie,Neo NOIR fait le job et plutôt deux fois qu’une.

Alors, il serait finalement assez déplacé de mettre dans le même sac tous ces auteurs qui profitent finalement d’une mode un peu longuette, à force, des polars ruraux privilégiant des histoires où les pire atrocités commises semblent être le fait de la connerie congénitale,de la misère sociale et de la consommation et du trafic de meth. J’ai déjà écrit plusieurs fois mon admiration pour la prose de Whitmer et bien sûr le poignant « Cry father » malgré un cadre quasiment identique ne peut pas être comparé à « Frank Sinatra dans un mixeur » comédie gore écrite et revendiquée par Matthew McBride dont le prochain roman sera d’ailleurs beaucoup plus grave et, hélas aussi sans l’inénarrable Nick Valentine et son ersatz de chien (un yorkshire ressemble,de loin,à un chien mais ce n’est pas un chien!).

Pour cette dernière sortie de l’année, Les trouducs ricains,toujours,mais aussi deux histoires possibles:façon Larry Brown misère,violence,douleur de l’absence et du deuil mais aussi compassion,respect de l’individu et rédemption ou à la manière de Frank Bill misère,drogues,violence et crises de rire parfois un peu coupables.

A sa sortie, le résumé parlant de braquage,de trahison,de butin et de fraternité aryenne auquel on peut ajouter la présence de deux éclairs de triste mémoire sur la couverture m’avaient convaincu que j’avais lu suffisamment d’histoires de ce genre pour le moment et j’ai eu tort et il temps pour moi de tenter de réparer cet oubli.

« Pour Charlie,ce ne devait être rien d’autre qu’une banale journée de travail à la banque. Pour Hicklin, ce ne devait être qu’un casse de plus. Histoire de se refaire un peu à sa sortie de prison. Pour sa petite amie accro au crack, peu importe, puisque de toute façon rien ne se passe jamais comme prévu. Surtout si, dès le départ, on tente de doubler ses partenaires de la Fraternité aryenne. Et puis pourquoi prendre le jeune guichetier en otage ? Maintenant, combien de temps faudra-t-il aux flics et aux membres du gang pour les retrouver ? »

Passionnant roman avec des personnages particulièrement mauvais et déterminés et des victimes qui sont forcément nées sous une mauvaise étoile en plus de vivre au mauvais endroit,la lecture se fait d’une traite jusqu’à la moitié d’un bouquin qui s’apparente presque, ,j’ai dit presque, à une sympathique série B et puis boum,une énorme surprise nous expédie vers un autre univers classique de la littérature américaine, la relation entre parents et enfants,la recherche d’un lien qui n’a jusque là jamais existé. Et si le cocktail sur-vitaminé;coups,torture,meurtre,viol,séquestration,flingues continue à faire efficacement son effet,il y a une toute autre histoire en cours qui crée une incertitude quant aux agissements d’un Hicklin jusqu’alors très prévisibles.

Cette belle surprise,au milieu de nombreux rebondissements violents, incite,par la suite, à une lecture beaucoup plus lente,plus réfléchie, mais non moins tendue et crée au final un roman hautement recommandable dans ce genre et nul doute que le retour de Farris est maintenant très attendu après cette histoire bien rude qui pue la peur,la testostérone,le sang et la poudre.

Wollanup.

PS:extrait de la carrière de Peter Farris dans le rock au sein de son groupe CABLE.Perso, je préfère quand il écrit…