Chroniques noires et partisanes

Étiquette : deon meyer

CUPIDITÉ de Deon Meyer / Série Noire

Donkerdrif

Traduction: Georges Lory

“Benny Griessel et Vaughn Cupido, ravalés au rang d’enquêteurs de base pour avoir enfreint les ordres de leur hiérarchie, soupçonnent leur punition d’être liée au meurtre en plein jour d’un de leurs collègues et aux lettres anonymes qu’ils ont reçues récemment. Mais ils n’ont pas le loisir d’approfondir la question car on les charge d’élucider la disparition de Callie, brillant étudiant en informatique.

Dans le même temps, Jasper Boonstra, milliardaire et escroc notoire, confie à une agente immobilière accablée de dettes la vente de son prestigieux domaine viticole. Conscient que la commission de trois millions de rands réglerait tous les problèmes de la jeune femme, l’homme d’affaires exerce sur elle un chantage qui la met au pied du mur.

A priori, il n’y a aucun lien entre les deux affaires, sauf le lieu, Stellenbosch, au coeur des vignobles du Cap. Mais lorsqu’elles convergent, la cupidité se révèle être leur moteur commun.”

Je ne suis pas le plus grand fan de l’auteur sud-africain, je tiens à le souligner avant d’être taxé de subjectivité devant les éloges que je pourrais faire sur ce Cupidité qui est de très loin ce que j’ai lu de meilleur chez Deon Meyer. Ce peu d’appétence vient surtout de ces histoires lassantes d’anciens combattants de l’ANC de Mandela et aussi peut-être parce que j’avais deviné beaucoup trop rapidement le coupable dans un de ses premiers romans. C’était un très mauvais signe, étant souvent très crédule dans mes lectures.

Cupidité, par contre, est un excellent thriller combinant deux intrigues dans deux domaines du polar très différents. La première avance assez tranquillement après un départ digne d’un épisode de Fast and furious, technique d’écriture classique du thriller où on en met plein les yeux au lecteur, on le secoue d’emblée pour ensuite dérouler plus tranquillement en commençant par les problèmes professionnels et domestiques de Griessel et Cupido. Si vous êtes des fans de sa doublette de flics, vous pouvez être émus par leur destitution en flics lambda. Même si ces deux gars-là sont sympathiques, ils sont quand même loin affectivement, pour moi, d’un duo Robicheaux/Purcel. Leurs problèmes domestiques un peu plaqués pour montrer leur humanité permettent de reprendre un peu sa respiration: dans le précédent une attente d’accord de prêt pour un achat de bague pour la fiancée d’un des deux (je les confonds un peu), dans celui-ci le régime amaigrissant de l’autre et ne nuisent cependant pas à la qualité d’une superbe intrigue sur une disparition. L’investigation fouillée, minutieuse, patiente mais passionnante se révèle un vrai régal pour les amateurs.

La seconde intrigue s’inscrit dans un méchant jeu du chat et de la souris entre un homme d’affaires puissant, riche et ordure notoire et Sandra, une jeune agente immobilière surendettée et tout au bord du gouffre. On est là dans le polar psychologique mais de haut vol. On sent le piège, Sandra aussi, mais la belle se croit plus forte…

Meyer passe d’une intrigue à l’autre, au départ de manière très tranquille, puis le rythme s’affole vers la moitié du roman. Les intrigues rebondissent et se rejoignent de fort belle manière pour aller vers un final commun mais néanmoins avec un traitement différent pour chacune, l’une d’entre elles restant même sur des points de suspension.

Deux intrigues brillamment menées, pas de temps mort, du très bon polar.

Clete.

LA PROIE de Deon Meyer / Série Noire/ Gallimard.

PROOI

Traduction: Georges Lory.

Sixième opus de la Série Benny Griessel, “La proie” signe aussi l’arrivée de Deon Meyer à la Série Noire. La collection qui édite déjà Jo Nesbo s’enrichit donc d’une nouvelle locomotive dont les ventes permettront certainement à l’éditeur de parier sur de jeunes auteurs.

“Au Cap, Benny Griessel et Vaughn Cupido, de la brigade des Hawks, sont confrontés à un crime déconcertant : le corps d’un ancien membre de leurs services, devenu consultant en protection personnelle, a été balancé par une fenêtre du Rovos, le train le plus luxueux du monde. Le dossier est pourri, rien ne colle et pourtant, en haut lieu, on fait pression sur eux pour qu’ils lâchent l’enquête.

À Bordeaux, Daniel Darret, ancien combattant de la branche militaire de l’ANC, mène une vie modeste et clandestine, hanté par la crainte que son passé ne le rattrape. Vœu pieux : par une belle journée d’août, un ancien camarade vient lui demander de reprendre du service. La situation déplorable du pays justifie un attentat. Darret, qui cède à contre cœur, est aussitôt embarqué, via Paris et Amsterdam, dans la mission la plus dangereuse qu’on lui ait jamais confiée. Traqué par les Russes comme par les services secrets sud-africains, il ne lâchera pas sa proie

pour autant…”

Bon alors Deon Meyer n’est plus à présenter, connu et apprécié mondialement, l’homme conte depuis de nombreuses années l’Afrique du Sud au sein de polars très bien troussés et si vous ne connaissez pas le duo Griessel Cupido, pas d’inquiétude, on suit facilement… Parce que Meyer, c’est un pro, il se renouvelle à chaque nouvelle histoire tout en restant quand même très proche de son grand thème du chaos de la société sud-africaine gangrenée par des maux non éteints, une corruption généralisée, un racisme prégnant, une violence de tous les instants, une classe politique rapace. 

L’auteur connaît tous les petits trucs pour faire monter la sauce, pour rendre urgentes des histoires. Il n’y a peut-être que les moments de calme avant la tempête, les moments de pause qu’il ne maîtrise pas du tout. Il y a ici, à chaque accalmie, les atermoiements du héros qui ne sait pas comment annoncer sa flamme à son aimée et franchement, c’est d’un niais…Mais ce n’est qu’un détail par rapport aux deux belles intrigues offertes dont une se déroule à Bordeaux… On visite la ville, Meyer citant même une célèbre librairie bordelaise, belle pub!

Lors des dernières pages, les deux intrigues se rejoignent pour foncer vers un final thriller explosif et Deon Meyer fait ça très bien. On passe un bon moment même si le retour aux armes d’un soldat de l’ombre, le sacrifice pour la cause, pour les générations à venir, blablabla, scénario usé, c’est peut-être très romantique mais je ne marche plus. 

Carré!

Clete.

EN VRILLE de Deon Meyer / Le seuil policier

Traduction de Georges Lory.

« Traumatisé par le suicide d’un collègue, Benny Griessel replonge dans l’alcool. Sa supérieure hiérarchique le protège en confiant à son adjoint Cupido l’enquête sur le meurtre d’Ernst Richter, créateur d’un site qui fournit en toute discrétion de faux alibis aux conjoints adultères. Richter faisait chanter ses clients. Est-ce là une piste ? L’analyse des relevés d’appels de son portable, l’épluchage des comptes de sa start-up, les interrogatoires de ses employés, les perquisitions ne donnent rien. Les soupçons se portent aussi sur François du Toit, un viticulteur en faillite. Rien de probant. Les Hawks sont dans l’impasse. La solution surgira, contre toute attente, de l’esprit embrumé d’un Griessel au bout du rouleau. »

 
J’ai toujours du mal à croire que mes auteurs favoris se plantent… et j’aime beaucoup Deon Meyer ! Ses romans, très bien construits au niveau de l’intrigue, du suspens, avec des personnages profondément humains (des failles, des défauts… mais sensibles, intelligents) vont bien au-delà du simple polar. Ses enquêtes prennent généralement en compte des faits de société et sont sacrément ancrées dans l’histoire de l’Afrique du sud dont on peut dire qu’elle a été sanglante et mouvementée. Il nous montre justement comment ce pays tente de se sortir du sous-développement et de retrouver la paix malgré les réticences et les grincements de dents de certains. Je lis Deon Meyer depuis longtemps, un nouveau Meyer était une fête mais avec ce livre, j’ai été franchement déçue !

 
L’histoire se tient, Deon Meyer sait toujours raconter une histoire et il nous amène à la résolution de l’enquête en bonne et due forme ! Un polar tout à fait correct mais pas époustouflant et lent.

 
Deon Meyer a perdu de sa profondeur, de son acuité, ses personnages sont plats (pourtant bon sang ! Benny se remet à boire !). Deon Meyer est dans l’action mais plus dans la psychologie, on ne les comprend plus… Il fait converger deux histoires, l’enquête et la vie d’un viticulteur sud-africain, il sait le faire, c’est intelligemment construit mais au lieu de renforcer le suspens, ce procédé l’atténue, on se perd, enfin je me suis perdue en route, l’intérêt parti en vrille…

 
J’ai ressenti un peu la même chose à la lecture des derniers Lehane ou Winslow… Et alors ? Est-ce un hasard ? Ces trois-là ont travaillé pour le cinéma. Comme si leur univers s’était formaté et tout ce qui faisait leur originalité, leur force, leur voix propre disparaissait. Meyer s’en est-il rendu compte ? Il fait faire la distribution du film par un de ses personnages, clin d’oeil ou promo ? Ce bouquin ressemble à un scénario qu’on aurait relooké en roman ou à un roman écrit à la manière d’un scénario sans réelle dimension sociologique, politique, psychologique…
En vrille…
Grosse déception
Raccoon

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