Chroniques noires et partisanes

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LE BIG BOSS de Bill James chez Rivages/Noir

Traduction : Danièle Bondil.

Bill James est né au Pays de Galles où il a fait ses études avant de devenir journaliste. C’est un écrivain très prolifique qui a écrit plus d’une cinquantaine de romans sous différents pseudonymes. Il a notamment écrit « lettres de Carthage », un roman épistolaire et subversif sur la bourgeoisie et la série des Harpur et Iles dont  « le big boss » fait partie. Sur les trente volumes que comprend cette série, douze ont été traduits en français mais ils n’ont pas été publiés dans l’ordre de parution original, comme souvent, je ne sais pas pour quelles raisons. Ce livre date de 1996.

« Elle s’appelle Mandy mais a décidé qu’elle serait « NOON ». Elle a 13 ans, vit dans une cité et a fait les gros titres des journaux : elle a pris une balle perdue lors d’un règlement de comptes entre truands. Cependant, l’histoire se révèle plus complexe ; Mandy transportait de la drogue pour le compte d’un gang et l’examen balistique démontre que la balle lui était destinée. Qui pouvait avoir intérêt à sa mort ?

Du côté de la police, l’enquête s’enlise car le torchon brûle entre le chef de la police Mark Lane et son adjoint, le retors Desmond Iles. Mais comme toujours, le superintendant Colin Harpur tirera son épingle du jeu. »

La fusillade a lieu dans un quartier où les trafiquants font la loi, il y a vingt ans c’était déjà d’actualité… Dans cette petite ville ravagée par le chômage, le trafic rapporte, c’est le seul débouché pour les enfants qui n’aiment pas trop l’école et il fait bouillir bien des marmites. Les truands contrôlent le quartier et les flics se heurtent à la loi du silence, seuls des gens étrangers au quartier parlent.

Mais la mort d’une enfant est choquante, elle fait les gros titres de la presse et les policiers sont sous pression. Certains dépriment même, estimant avoir déjà perdu la bataille, culpabilisant d’avoir laissé les choses en arriver là. Les tensions qui règnent au commissariat de police s’intensifient. Différentes écoles s’affrontent sur fond de luttes de pouvoir entre le chef Lane et son adjoint Iles : passer des accords avec les gangs pour gagner la paix dans la rue, ou intensifier la lutte en infiltrant les gangs quitte à mettre la vie d’un policier en danger…

Bill James connaît bien le milieu de la police. Il nous décrit les rapports existants dans ce commissariat où tous se connaissent depuis longtemps, femmes et enfants compris : l’ambition, les entourloupes, les coups bas, les rapports dangereux avec les indics, la trahison qui peut parfois aller très loin… Il suit également les truands : le chef de gang aux grands principes, un « baron de la drogue » qui se prend vraiment pour un seigneur, sûr de son pouvoir, ses associés, ses concurrents… Tout cela avec un regard un peu ironique qui donne un ton particulier au roman, tout le monde se connaît, personne n’est dupe.

Bill James n’est pas un débutant, et si l’enquête est menée de façon classique elle fonctionne, et très bien même.

Un bon polar noir.

Raccoon.

LETTRES DE CARTHAGE de Bill James /Rivages

Bill James est un grand écrivain de polars gallois. Il n’a pas encore rencontré son public en France et pourtant il aligne les écrits de grande qualité dans la veine de John Harvey qui l’a d’ailleurs fait connaître aux gens de Rivages qui ont publié « Retour après la nuit » pour ensuite se rendre compte que ce roman devait être le dixième d’une série mettant en scène Harpur et Iles, deux flics gallois. Une dizaine d’aventures est,depuis, parue chez Rivages Noir sur la presque trentaine écrite. A partir de 2000, l’auteur a commencé à écrire d’autres romans ne mettant plus en scène ses deux flics mais ils n’ont pas eu pour l’instant l’honneur d’une édition française.

« Lettres de Carthage » se différencie de sa production habituelle parce qu’il ne s’agit pas d’une enquête policière et que l’action se situe dans la région (magnifique) de Exeter et non plus au Pays de Galles et surtout parce qu’il s’agit d’un roman épistolaire ce qui signifie pour moi plonger dans l’inconnu avec un auteur apprécié mais quand même. C’est aussi un roman qui a le droit à une entrée dans la collection de luxe « thrillers » de Rivages.

Un avertissement important : réservez votre après-midi ou votre soirée parce qu’une fois le livre entamé vous ne pourrez plus vous arrêter si vous appréciez les romans où l’on privilégie la psychologie des personnages à l’action pure et dure. Si vous aimez Thomas H. Cook et William Bayer, ruez-vous chez votre libraire, vous allez adorer.

En bref, Kate et Vince s’installent dans un quartier hyper-bourgeois (anglais de surcroît, donc encore plus succulent d’hypocrisie et de lâcheté) de la périphérie de Exeter. Ils s’intéressent à leurs voisins les Seagrave dont ils jalousent la vie qui semble idyllique et dont ils voudraient gagner l’amitié, heureux qu’ils sont d’être arrivés dans cet Olympe. Les semaines passant, Kate devient complice de Jill Seagrave qui lui fait part de ses difficultés avec son mari et dépeint l’homme d’une façon inquiétante qui surprend au plus haut point Kate qui trouve pourtant Dennis charmant et attendrissant.

Même si… certains soirs dans la maison des Seagrave nommée « Carthage » se déroulent des soirées musique en sourdine, rideaux tirés, couples d’invités élégants, nombreuses voitures de luxe dans la rue, la présence d’un homme politique français de premier plan candidat à l’élection présidentielle (non, je plaisante !) mais jamais de gens du voisinage.

Le roman va progresser lentement mais de façon vraiment passionnante pour arriver à la vérité. Pendant toute l’histoire, Bill James va nous promener à sa guise tout en éclaboussant allègrement la bourgeoisie anglaise pour finir par un dénouement en deux temps de toute beauté comblant le lecteur frénétique que j’ai pu être pendant ces quelques heures.

Un thriller psychologique impeccable, un suspense haletant (on sait que cela va mal tourner mais pour qui et quand ?), un dénouement magnifique et un très beau réquisitoire contre la bourgeoisie. Merci Monsieur James pour ce beau roman, une fois de plus.

Wollanup.

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