C’est une cité portuaire, verre et béton sur sable, qui se dresse contre un ciel-champ de bataille. Un enfant se volatilise, la ville est amputée d’un morceau de terre mais ne s’en souvient pas. Une « fake news » tourne en boucle sur tous les écrans, la mort d’un guide spirituel, quelque part au fond d’un désert, secoue des mondes lointains, retentit jusqu’au plus proche. L’information attaque la réalité et le vertige saisit chacun différemment, interrogeant la mémoire, la vérité, l’avenir. Dans la tempête, quelques silhouettes se détachent, nous ouvrant le chemin vers une histoire de disparition et d’oubli.
Publié chez Actes Sud, Les sables, le premier roman de Basile Galais a ce quelque chose d’intriguant, cette aura magnétique qui pousse à la lecture. Ce que l’on en sait – c’est à dire pas grand-chose de concret – est assez mystérieux. J’en espérais le mieux en craignant quand même un peu le pire. Au final, il n’est pas si évident de se prononcer dessus.
Le Havre, ville portuaire grise, massive et bétonnée (pour ce que j’en sais), par laquelle est passée un temps l’auteur Basile Galais, apparaît comme un élément clé dans l’écriture de ce roman. La cité portuaire qui sert ici de décor à l’histoire, qui en est même l’un des personnages principaux, pourrait bien être une sorte de double fantomatique du Havre. On ne sait pas précisément où on est mais nous y sommes plongés de façon éminemment immersive. Les sables est sensoriel et surtout visuel. C’est un état entre rêve et réalité. Une atmosphère enveloppante et nébuleuse. Une expérience littéraire plus qu’un roman conventionnel.
La Cité est perturbée pas une actualité qui passe en boucle, la mort d’un guide, la mort « du » guide. Nos quelques personnages réagissent tous à leur façon à cette information. Sans pour autant savoir de quel guide il est vraiment question, sans se sentir initialement véritablement concernés par cette information, ils perdent néanmoins leurs repères. Ils affrontent des émotions diverses et puissantes. C’est un étrange bouleversement.
Tout au long du roman, je me suis demandé où Basile Galais souhaitait emmener ses lecteurs. J’attendais la concrétisation d’une intrigue, d’une histoire, mais tout est trouble jusqu’à la fin, au point de nourrir une certaine frustration. Les différentes trajectoires des personnages ne constituent pas un récit concret. Elles font partie de ce tout inexplicable. Il n’est pas difficile de se laisser absorber par la dimension esthétique et poétique du livre – qui est clairement son point fort – mais une impression d’inachevé demeure. Plus exactement, même si j’ai suivi le mouvement sans déplaisir, je n’ai pas tout à fait saisi la finalité du livre. Mais peut-être est-ce juste moi qui est en cause ?
Les sables, qui lorgne du côté de la science-fiction, est pour celles et ceux qui veulent s’immerger dans une œuvre littéraire singulière à la dimension esthétique puissante. Il ne faut pas craindre de voir l’intrigue vous échapper pour apprécier les qualités du livre. Ce n’est pas à proprement dit un roman complexe, mais juste insaisissable, car comme il est dit dans celui-ci : « Il y a des choses qui nous dépassent, il faut l’accepter. »
Brother Jo.
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