Old God’s Time

Traduction: Laetitia Devaux

“Tom Kettle, un inspecteur de police fraîchement retraité, coule des jours tranquilles à Dalkey, une petite station balnéaire de la banlieue dublinoise. Il a pour seule compagnie ses voisins et le souvenir encore vif de ses proches : sa femme, June, mais aussi sa fille et son fils, Winnie et Joseph, tous prématurément disparus.

Lorsque d’anciens collègues viennent frapper à sa porte pour lui demander son aide dans une vieille affaire d’abus sexuels au sein de l’Église, Tom est mis face à un passé et à un secret douloureux. À mesure que l’histoire avance, les souvenirs émergent : il y a eu la violence des prêtres de l’orphelinat, son enfance malmenée, et surtout celle de June, victime de viols perpétrés par le père Matthews. Il y a eu l’enquête, étouffée à l’époque. Et puis le corps du père, retrouvé dans les montagnes de Wicklow. Aperçu sur les lieux du crime, Tom est suspecté.”

Sebastian Barry est une belle plume, empreinte de la mélancolie chère aux auteurs irlandais. Par le passé, nous avions été éblouis, dans un genre très différent, par Des jours sans fin et cette seconde chronique confirme tout le bien que l’on pense de l’auteur et en même temps la déception et l’étonnement de ne pas le voir mis plus en avant sur les étals des librairies. Pas dans l’air du temps, peut-être, en dehors des modes et des sujets qui font vendre certainement, mais il serait dommage de passer à côté de ce roman qui aura l’art de séduire tous ceux qui ont envie d’une belle littérature certes très noire mais qui vous emporte sans artifices.

Il y a beaucoup de flics présents dans le roman, en activité ou en retraite, comme Tom dont on va découvrir la psyché tourmentée et le déni qu’elle cache. Mais pour autant, ce n’est pas tout à fait un polar, plutôt un roman qui raconte par la voix d’un vieil homme les souffrances, la tristesse infinie de la perte de tous les siens, épouse, fille et fils, et surtout montre avec force mais aussi extrême pudeur et élégance les méfaits de la pire invention de l’homme, Dieu, et son bras armé dégueulasse, la religion…

“Les viols, les salopards de prêtres, les bonnes sœurs, les souffrances, la douleur, la cruauté, tout ce bordel”. Sebastian Barry fait le procès de l’église catholique irlandaise et de sa hiérarchie qui a couvert pendant des décennies l’ignominie et la bestialité qui sévissaient dans ses rangs…

“280 prêtres pédophiles pour 70.000 victimes et pour toute l’Europe, environ 11.200 prêtres qui auraient abusé de plus 2,8 millions d’enfants. L’ampleur du phénomène aurait poussé l’Église à dissimuler ces abus. (Euronews). Les chiffres sont effarants, quasiment trois millions de gamins dézingués, de vies innocentes souillées pour l’éternité… Le sujet est donc terrible mais traité avec une pudeur et une intelligence qui arrivent presque, presque seulement, à masquer la colère de l’auteur qu’on sent, à travers les lignes, particulièrement ébranlé comme son héros.

Au bon vieux temps de Dieu n’offre pas un moment de lecture confortable, les océans de larmes vous envahissent très vite, vous submergent rapidement, vous noient dans des abîmes sans fin mais c’est un roman utile, nécessaire, magnifique, qui, pour moi, fera date.

Clete