Damnation Spring

Traduction : Fabienne Duvigneau

Originaire de Californie, Ash Davidson vit aujourd’hui en Arizona. Elle nous propose aujourd’hui son premier roman, salué par une large critique américaine (dont Stephen King himself).

1977. Californie du Nord. Rich est de ces bûcherons qui travaillent au sommet des arbres. C’est un métier dangereux, dont son père et son grand-père sont morts. Il veut une vie meilleure pour sa femme Colleen et son fils Chub. Pour cela, il a investi en secret toutes leurs économies dans un lot de séquoias pluricentenaires. Mais lorsque Colleen, qui veut avoir un deuxième enfant malgré de précédentes fausses couches, se met à dénoncer la compagnie d’abattage pour l’usage d’herbicides responsable selon elle de nombreuses malformations chez les enfants, le conflit s’invite au coeur de leur couple.

De (bons) romans qui nous entraînent dans les forêts de la côte ouest des Etats-Unis et/ou dans les communautés de bûcherons, Nyctalopes en connaît quelques-uns, chroniqués parfois dans nos colonnes. Citons Le miel du lion de Matthew Neil Null, Faire bientôt éclater la terre de Karl Marlantes ou le désormais classique Et quelquefois j’ai comme une grande idée de Ken Kesey.

L’autrice déclare avoir mûri et travaillé son projet durant dix années. Il n’y aucun mal à le croire tant le texte coche de bonnes cases : caractère épique de cette saga familiale, sens du détail vif, personnages d’épaisseur humaine sensible, galerie de portraits remarquable, lignes de dialogues qui font mouche, enjeux enracinés dans un contexte temporel et humain mais universels (amour, travail, honneur, loyauté aux siens, impact de la dégradation de l’environnement sur la vie humaine). Oui, Les derniers géants s’appuie sur cette ancienne problématique, l’homme contre le vivant, la nature, pour dérouler superbement une chronique familiale et communautaire des plus fines. Ash Davidson et son roman, avec puissance, talent et grâce, même, s’avancent sur la scène. Et déjà cela est une réussite. Ne dit-on pas que nous aurions là trouvé une nouvelle Great American Voice ? C’est fort possible et demandera confirmation.

Voilà un premier roman de haut calibre, qui pourrait démarrer un parcours littéraire de façon parfaite. Trop parfaite ? Selon moi, un texte soigneusement travaillé, calibré, expression d’un talent et qui, pourtant, est retenu, juste à temps, de s’aventurer plus loin sur des versants fragiles face à un glissement de terrain, comme il peut arriver à la saison des pluies au pays du redwood. C’est une impression personnelle qui ne doit pas vous empêcher d’embrasser les arbres et les habitants de Del Norte County. Ash Davidson, désormais nous voulons un autre géant.

Paotrsaout