Jean-Luc Bertini, photographe indépendant, a été récompensé par la bourse du Talent dans la catégorie « portrait » en 2006 et est co-auteur de « Solovki, la bibliothèque perdue » et de « Carnets d’Amérique ». Alexandre Thiltges enseigne la littérature au Texas, il est également traducteur et l’auteur d’un essai sur Bukowski et de biographies. Ils ont réalisé un voyage de rêve pour des amoureux de littérature américaine : ils sont partis à la rencontre de ceux qui les font tellement voyager… « Comme vous, sans doute, je n’ai pas fait mon premier voyage sur le continent américain au volant d’une Ford décapotable ou en stop, non rien de tout ça. Mon premier voyage sur ce continent, je l’ai fait en livre. Sur un livre, dans un livre, entre deux livres. Bref, mon premier voyage américain fut littéraire. »
Ils partent avec comme seuls repères les écrivains qu’ils veulent rencontrer et l’envie d’essayer comme Kerouac de « voir l’Amérique comme un poème et non comme un endroit où il faut se battre et en baver ».
C’est ce voyage qu’ils racontent, un road-trip étiré sur plusieurs étés, le territoire américain partagé en cinq grandes parties qu’ils ont sillonnées. Les paysages, les gens rencontrés, les péripéties du voyage font le lien entre les entretiens.
Rien que les photos pourraient suffire à notre bonheur : portraits d’auteurs, d’anonymes, paysages à couper le souffle et la route bien sûr, qui fascine et à elle seule représente l’espoir « Espoir de liberté absolue, en germe depuis les Pères fondateurs, que cultivent tous les auteurs que nous rencontrerons au cours de ce voyage. »
Des photos magnifiques qui nous invitent au voyage, captent l’esprit des êtres et des lieux.
Et il y a les entretiens ! Trente-cinq écrivains rencontrés dans l’intimité de leurs repères : une maison, un atelier de travail, un bar et dans les lieux qui les inspirent ou les façonnent. Ils se livrent d’autant plus et dévoilent leurs origines, leurs influences littéraires, leur manière d’écrire, leurs thèmes privilégiés, leur vision des Etats-Unis. Certains débordent des interviews et partagent une soirée, une ou des bouteilles…
Le livre s’ouvre et se referme avec le grand Jim Harrison, qui nous a quittés cette année et qui pensait que la responsabilité de l’écrivain est de « donner une voix aux gens qui n’en ont pas ». Le voyage ayant commencé en 2007, ils ont également eu la chance de rencontrer l’immense James Crumley dont ils ont réussi à vaincre les réticences à se livrer.
Forcément parmi les auteurs, il y en a qu’on adore déjà et c’est un grand bonheur de les retrouver. En vrac pour moi : Meyer, Levison, Pollock, Erdrich, Davidson, Alexie, Vlautin, Vann, Johnson… Et puis il y a ceux que j’ai découverts et que j’ai désormais envie de lire.
Le tout vaut bien plus que la somme de ses parties, il se dégage de l’ensemble un portrait lucide, vivant et diversifié du nord au sud en passant par l’Ouest, territoire mythique s’il en est, de l’Amérique d’aujourd’hui, tracé par les voix de ces écrivains, fins observateurs de leur époque et de leurs pairs mais aussi hommes et femmes de grande humanité dans leur sagesse comme dans leur folie.
Un livre magnifique pour tous les amoureux de littérature et d’Amérique.
Raccoon
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