Un roman de Dominique Manotti est toujours un évènement. Madame Manotti, la prof que j’aurais aimé avoir, depuis des décennies, et sans faiblir avec l’ âge continue à nous dévoiler la face cachée d’ affaires françaises connues ou moins connues, de pratiques tordues voire criminelles mais toujours avec un éclairage bien différent et particulièrement documenté que ceux donnés par l’Etat ou les médias à la botte.
Au fil des années Manotti a montré et démonté la gauche caviar, Tapie, les agissements des banquiers et des investisseurs, les magouilles des politiques, les ventes d’armes clandestines, les flics ripoux… et la French Connection dans les années 70 à Marseille. A cette occasion, elle avait ramené au tout début de sa carrière un de ses personnages fétiches le commissaire Daquin, une présence qui l’avait rassurée dans l’écriture de son roman.
Dans “Racket” Daquin fait aussi quelques apparitions en vieux sage, statut que son âge comme son expérience permettent, mais c’est Noria Ghozali, flic des RG, apparue dans “bien connu des services de police” qui va mener l’enquête. Nul doute que ces deux flics n’étaient pas de trop pour affronter l’ogre américain.
“Racket” se veut une version romancée de la vente d’ Alstom à un groupe américain en 2013. Nul besoin de vous rappeler l’affaire, Dominique Manotti s’en charge. Si le début du roman s’avère un peu ardu par la profusion de personnages et de situations, les qualités didactiques de l’auteure offrent rapidement une compréhension de l’affaire, des tenants et des aboutissants, des enjeux.
Pour faire simple, un industriel américain veut acheter un fleuron de l’industrie française et a bien l’intention de mener son projet à terme. Et c’est la guerre: intimidations, meurtres, corruption, chantages, fake news, tout est mis en place, minutieusement, pour fragiliser la cible. Alors ce genre de procédés n’est sûrement pas l’apanage des seuls Américains. Néanmoins, ceux-ci ont un très gros avantage sur la concurrence puisque leurs attaques ciblées, leurs abordages, leurs hallalis sont appuyés par le ministère de la justice américaine, le FBI, la CIA, la NSA, bref, toute la puissance du pays le plus puissant du monde.
Face au déferlement, Noria et son équipe du Renseignement intérieur vont suivre adroitement des pistes peu balisées et tenteront de bousculer le bel ordonnancement orchestré par des pourris outre-atlantique. Sans leurs noms, apparaissent un ministre dupé vantant des marinières pendant qu’on pille le pays, un secrétaire général adjoint de l’ Elysée qui a fait beaucoup de chemin depuis 2013, les révélations de Snowden, l’énorme usine à gaz de Bercy, un sinistre ministre du budget qui nous demandait de nous serrer la ceinture… un monde effrayant, flippant, déshumanisé, pourri jusqu’à la moelle raconté de manière passionnante une fois de plus par une grande Dominique Manotti.
Manottien!
Wollanup.
PS: Dominique Manotti nous a parlé de son rapport à l ‘Amérique dans un entretien en décembre 2016, ici.
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