Jacques Olivier Bosco est un auteur de polars ayant commencé sa carrière chez Jigal et qui la poursuit actuellement chez Robert Laffont dans la collection « la bête noire » de Glenn Tavennec. C’ est aussi un ami du site pour qui il a déjà chroniqué De Cataldo et Montero. Son explosif nouveau roman « Brutale », titre amplement mérité, raconte les débuts romanesques de Lise, flic extrêmement dangereuse utilisant des méthodes très particulières et vient de sortir en janvier, pour les amateurs de sensations très fortes..

Ici, il nous conte beaucoup plus sereinement ses souvenirs d’Amérique, son rapport au pays.

  • Première prise de conscience d’une attirance pour l’Amérique

Alors je ne dirais pas que j’ai une attirance aujourd’hui pour l’Amérique, mais j’ai eu, c’est vrai, lorsque j’étais enfant. Il y a eu les westerns, les cow-boys et les indiens, et puis la série Starsky et Hutch, je sais, ce n’est pas très original, mais j’habitais en banlieue parisienne, et les seules choses de l’Amérique que nous voyions à cette époque, c’était à la télévision, et là, j’avoue, j’étais accro à ces deux mecs qui faisaient des dérapages dans de grandes avenues brodées de gratte-ciels.

  • Une image

Heu, une voiture rouge avec une bande blanche ? Ou alors, les hot-dogs que mangeaient les personnages dans la série. Non, par contre si tu veux dire une image qui me vient tout de suite et dans mon inconscient de l’Amérique je dirais Spiderman regardant New York la nuit ( et sous la pluie) du toit d’un building,  ou alors King Kong sur l’Empire State Building en train d’attraper des avions, c’est très symbolique de mon impression de ce pays, la grandeur et la violence, d’abord parce que cent pour cent de mes références sont culturelles, et ensuite, que ce King Kong s’attaquant à une tour mythique de New York peut être une image que l’Amérique  a la capacité  de créer ses propres problèmes.

  • Un événement marquant

Je crois qu’on a beau retourner tous les événements, il n’y en qu’un qui ressort, tellement symboliques en même temps de ce pays et de notre époque, encore une fois un film, en direct, cette fois, que j’ai regardé incrédule, fasciné et choqué, comme beaucoup. Mais si je devais mettre un ordre, je dirai qu’en premier c’est l’entrée en guerre de l’Amérique au Koweit, je me rappelle avec ma copine nous écoutions la radio en direct pendant la nuit dans une petite chambre d’hôtel de Toulouse, et le lendemain les journaux titraient «  La guerre », comme si notre génération qui avait tant entendu parler des grandes guerres précédentes était curieuse et impatiente de vivre la sienne (oui j’admets que ce genre de pensée est abject avec le recul, mais il s’agit d’une impression du moment).

  • Un roman

Mon Dieu (expression culturelle dénuée de sens religieux), moi qui croyait être le seul avec ma petite bande de copains a avoir découvert Demande à la poussière de Fante lorsque j’vais 20 ans (et ensuite la vague d’autres auteurs qui s’inscrivaient dans cette lignée), cela en devient presque banal de citer ce livre à présent. Mais je l’ai relu, encore dernièrement, et la scène de la mer, la nuit, la poésie urbaine des descriptions du personnage, et surtout, cette rage, cet espoir et cette naïveté romanesque (l’amour empêchera-t-il son rêve de se concrétiser ? ), enfin quoi, puis, cela parle d’un apprenti écrivain. ( d’ailleurs j’ai toujours voulu écrire une nouvelle qui se serait appelée «  le petit chien qui riait » ou «  qui pleurait » )

 

Un auteur

Alors grâce donc à cette vague de livres de cette époque bénie, j’ai pu découvrir mon auteur favori américain, pas très original non plus, mais qui dégage une folie, une poésie, un romantisme, et une mélancolie qui me touche au plus profond, Richard Brautigan ! Mon livre culte est d’ailleurs « Un privé à Babylone »  que j’ai acheté une demi-douzaine de fois, prêté des dizaines et conseillé à n’en plus pouvoir. Mais il y a aussi le monstre des Hawkline, et ses magnifiques nouvelles, minimalistes, et japonisées pour certaines.

Un film

On parle d’Amérique, et pour mois, les USA c’est Le Cinéma. Il y a tant de films, tant de claques, mais s’il devait y avoir un ordre, alors cela serait un western que j’ai vu à la télévision « quand j’étais petit », ma première baffe ;  Little Big Man, avec Dustin Hoffman, il y avait d’ailleurs tout dans ce film, la musique, le grand spectacle, l’amour, l’initiation du père ( et la trahison de l’autre père à la fin), tous les paradoxes de l’Amérique de cette époque, dans ce film, qui dénonce, au passage, la guerre du Vietnam. Film, qui d’ailleurs a dû inspirer Meyer pour son livre le Fils, dont la partie du grand père enlevé par les indiens est magnifique, et les deux autres parties pitoyables à mes yeux (une vieille femme milliardaire qui s’ennuie et un fils rebelle et torturé par amour) car même si Meyer dénonce dans ces deux parties le racisme anti-mexicain des Texans, on sent un tel respect pour ce pays (Le Texas) et amour, qu’on les excuserait presque de cet atavisme malheureux.

 

  • Un disque

Un disque, c’est simple, c’est Morrisson Hotel des Doors, une des meilleures choses que l’Amérique est faite. Roadhouse blues, qui est énorme, mais aussi tout aussi terrible Space Frog et Queen of the Highway, You make me real, etc.

 

Un musicien ou un groupe

Entre plein d’autres qui sont à égalité (mais en fait beaucoup sont plutôt anglais), mais puisqu’il faut choisir, Jim Morrison, et son groupe les Doors, (dont je compte plus les morceaux mythiques, de Break on throught à When the music over, Whisky bar, L.A Woman et The End), d’ailleurs, encore un gros choc cinématographique grâce à Oliver Stone. Morrisson a tout ce que j’aime, encore une fois, la poésie, la mélancolie, et puis, il est venu à Paris (pour y mourir) et je me souviens des ballades au Père Lachaise…

  • Une série

Il y en a tellement, comment choisir, oui celles que j’ai citées au début, avec Serpico, Mission Impossible, Amicalement votre, Cosmos 1999 ( quel kiff) et plus tard Drôles de Dames et Magnum (hum, dois-je avoir honte ?), mais dernièrement, le niveau a explosé et évolué – la force indéniable des américains sur ce domaine – avec The Wire, Les Sopranos, Breaking Bad, True Detective, mais là où tout a été osé, symbolisé tout en étant une réussite de suspens et d’accroche c’est The Walking Dead ( seule série que j’ai achetée avec The Game of Thrones), il y a toute la fureur que chaque individu peut avoir contre autrui, ceux qui nous flouent, nous poursuivent, à leur rythme lent et coriace, cherchent à nous bouffer un peu plus chaque jour, les gars qui jettent les dés au dessus de nos tête dans le grand Monopoly qu’est notre société, et qui sont symbolisés aux yeux des spectateurs par les Morts vivants, et puis il y a ce génie scénaristique qui me passionne, créer des tensions entre les personnages, de la méfiance comme ligne de conduite, le nihilisme au paroxysme, quelle réussite, et quel plaisir ( sadique et gore) à regarder, il y avait de quoi  me soutenir lorsque j’écrivais Brutale !

  • Un personnage de fiction

Un personnage de fiction américain ? Heu… Moi c’est plutôt Albator ou Actarus (des japonais), mais sinon comment choisir, il y a Spiderman (mais celui de la bande dessinée Strange, hein, pas le film),  ou bien Shubaka, Michael Corléone, James Bond ( ah non, il est anglais) ? Non, plus sérieusement et après réflexion, je dirais en premier Rick Deckard le tueur de Répliquants dans Blade Runner, il a ses fêlures, ses peurs, ses doutes, mais c’est un homme de devoir qui va tomber amoureux de quelqu’un de « différent », une sorte de vengeance contre le système (et puis quel film, mais quel film !) et aussi Ellen Ripley, parce que c’est une femme, et pour les même raisons que Deckard, et puis, c’’est un peu la cousine de Lise Lartéguy dans Brutale !

 

Un personnage historique

Je ne suis pas un spécialiste, mais (et pas – seulement – à cause du livre de Stephen King ou de la série) je crois que Kennedy a fait, par son image, et aurait pu faire, beaucoup de bien pour ce pays.

  • Une personnalité actuelle

Edward Snowden pour son courage et son importance pour l’Histoire de la liberté et nos générations futures, et puis, parce qu’ils sont encore vivants et qu’ils m’ont marqués, traumatisés, emballés ; Ridley Scott, FF Coppola, De Palma ( Body Double plus que Scarface) et Martin Scorsese.

Une ville, une région

Hey Manhattan ! (la jolie chanson au clip horrible de Prefab Sprout) New York City, NYC, sans hésiter, j’avoue que Las Vegas, le grand canyon, L.A, San Francisco ou Miami ne m’emballent pas, mais New York !!! C’est la planète Mars, j’ai eu la chance d’y aller avec mon petit clan juste avant Noël il y a trois ans et quelle énergie, quel spectacle, quelle émotion, quelle ville !

 

  • Un souvenir, une anecdote

Bah, tu te promènes dans New York et tu vois passer ( en 2015) des camions de pompiers comme dans les films, tu vois des flics avec leur casquette en étoile, et la vapeur qui sort des bouches de trottoirs, qu’est-ce que tu fais ? Comme les autres New Yorkais, tu vas t’acheter ton café take away, tu te ballades dans Chinatown où ils vendent des crapauds vivants pour faire la cuisine, tu te bouffes un hot dog « au coin de la cinquième », tu te ballades dans Central Park en pensant à Woody Allen, et tu fonces au dernier étage de l’Empire State, imaginer Spiderman volant au bout de son fil, et voir les lumières et les gratte-ciel la nuit, avec l’Hudson River, la « Mystic River », Brooklin, le New Jersey, et La cuisine de l’enfer sur l’autre rive, et là, tu réalises, vraiment, ton rêve de gosse !

  • Le meilleur de l’Amérique

Son cinéma, ses séries télévisées et ses scénaristes, après, j’avoue qu’en littérature je suis un peu léger.

  • le pire de l’Amérique

Il vient d’arriver à la présidence 😉

  • Un vœu, une envie, une phrase.

Aux français, si vous le pouvez un jour, faites vous plaisir, aller faire un tour à New York, c’est le Disneyland pour nous, les adultes, et aux Américains ; transformez Hollywood en un bunker, et continuez à rêver à de superbes histoires, avec ou sans effets spéciaux fabriqués par des français, et à les tourner et réaliser. Et puis, venez nous voir en France, un peu, qu’on discute, on a plein de trucs à se dire, j’en suis sur !