Ne vous fiez surtout pas à la magnifique couverture qui semble issue de l’œuvre du peintre Friedrich, point de romantisme ici dans ce premier roman mais une histoire d’homme terrible, un western old fashion racontée par un Américain représentant permanent des Etats-Unis auprès de l’OMC et ancien directeur des affaires économiques internationales à la Maison Blanche.
« 1823, Missouri. Tandis qu’une première expédition a été attaquée et annihilée par une tribu indienne, la Rocky Mountain Fur Company force sa chance et engage une poignée d’hommes dans une nouvelle tentative pour rallier Fort Union par un trajet inédit et périlleux. Parmi l’équipée, le trappeur Hugh Glass est attaqué par un grizzli quelques jours après le départ. Défiguré, la gorge et l’abdomen dévastés par les coups de pattes de l’animal, il est laissé en arrière avec deux hommes, chargés de le veiller jusqu’à sa mort. Mais Glass s’accroche à la vie. Et chaque heure qui passe rend le trajet pour rallier Fort Union plus dangereux à Fitzgerald et au jeune Jim Bridger, tous deux portés volontaires pour rester avec Glass. Convaincu par le premier d’abandonner leur compagnon agonisant à son funeste sort, Bridger disparait à son tour dans les bois. C’est la dernière image que le trappeur gardera de ses anciens partenaires.
Quelques heures plus tard, contre toute attente, il reprend connaissance. Il est seul, en territoire indien, sans arme, sans nourriture. Incapable de se déplacer, souffrant le martyre en raison de ses blessures infectées, délirant, déshydraté, il s’accroche à la vie comme un damné. Son unique motivation : la vengeance. Peu à peu, mû par la colère et aguerri par l’expérience d’une vie hors norme, il reprend des forces. »
« The revenant » sorti aux USA en 2004 est l’histoire romancée du trappeur Hugh Glass attaqué par un grizzli et abandonné moribond au milieu d’un no man’s land hostile, sans arme et nourriture, par des compagnons d’infortune peu scrupuleux et pressés de rejoindre le groupe pour pouvoir mieux affronter le péril occasionné par les Arikaras, Indiens pour le moins hostiles et aux mœurs brutales et aux méthodes ingénieuses en matière de traitements réservés aux prisonniers.
On a bien ici un roman de ce que l’on appelle du « nature writing » popularisé par certaines maisons d’édition et qui plait tant aux amoureux de grands espaces et d’une certaine Amérique fantasmée. Si certains de ces romans sont parfois un peu trop contemplatifs, trop situés dans une pseudo-harmonie entre l’Homme et la nature (au point que l’on se croirait chez « nature et découverte ») ou plutôt entre un lecteur fantasmant des rêves perdus de cowboy et la nature américaine avec tout le folklore qu’on aime y trouver : loups, grizzlis, grandes plaines inviolées, Indiens souvent bien plus aimables et philosophes que dans la réalité, feux de camp nocturnes, « pork and beans ». On y est mais pas trop quand même car Punke qui a déjà écrit deux ouvrages sur l’histoire de l’Ouest américain connaît parfaitement son sujet et sa prose rend passionnante l’histoire légendaire d’un Hugh Glass alors que dès le titre et la carte montrant son périple dans les premières pages, on sait que l’homme armé par la rage va tout faire son possible et même l’impossible pour retrouver ceux qui l’ont trahi.
Quand on regarde le portrait (réel ou imaginaire) de Hugh Glass, on se doute que sa quête a des chances d’aboutir car cet homme qui a déjà connu des moments difficiles dans sa vie notamment un période de pirate aux côtés de Laffitte racontée par Punke semble déterminé.
Sa présence sur des blogs, dans des ouvrages sur l’épopée de la conquête de l’Ouest et bientôt à l’écran sous la direction de l’excellent réalisateur Alejandro González Iñárritu (Babel) avec Di Caprio (sortie le 26 février en France) dans le rôle vedette prouve que l’aventure de Glass reste un exemple pour certains Américains.
Punke a du talent et des connaissances très sures de la situation comme du cadre pour nous offrir un roman d’aventures sauvage qui m’a laissé une bonne impression même s’il n’est pas (encore) McCarthy ou James Carlos Blake et encore moins Jack London. On peut regretter peut-être un manque de profondeur des personnages mais l’ensemble donne un roman solide, prenant, malgré une certaine tendance à la dramatisation et un beau témoignage, et c’est le plus important, sur la vie de ces pionniers souvent sans foi ni loi qui à force de courage et de rage ont réussi les paris les plus inconcevables.
L’Amérique dont l’histoire est encore très récente a besoin de ces histoires, légendes pour affronter un présent si peu conforme aux vœux de société originels et Punke, par ce roman réussi, offre à travers l’histoire de Hugh Glass un portrait d’une Amérique battante, d’une Amérique qui ne renonce pas et si l’histoire est éprouvante, la lecture s’avère, elle, très agréable.
Wollanup.
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