On suit Marianne Peyronnet depuis longtemps. Ses chroniques sur son blog Black roses for me, ses entretiens pour le magazine New Noise réunies dans Bruit noir comme dans ses débuts de romancière avec Vergne Kevin. Très éloigné de son premier opus, Le mur voit Marianne Peyronnet se lancer dans la très à la mode dystopie, loin des territoires connus de Nyctalopes…

« Nous sommes l’utopie. Chacun une cellule du corps parfait de la Matrie. Chacun utile à son bon fonctionnement, indispensable par notre nombre et notre dévouement. Chacun à notre place, œuvrons à l’équilibre. Nous sommes l’écologie. Nous sommes la nature. Nous n’abusons pas de ses richesses. Nous sommes la sobriété. Notre vie ne compte que comme partie du tout. Nous en faisons don à l’ensemble, de notre premier cri à notre dernier soupir. »

Le jeune soldat au service de la Matrie répondant au nom d’Alb 3, troisième fils d’Alba Irina Viga Luane, est très fier de se voir affecté au Mur en tant que sentinelle. Il défendra le territoire des Matrides contre les assauts des Bêtes.

Avec soulagement, le futur imaginé est aisément assimilable. Une société qui se veut égalitaire mais n’est rien d’autre que totalitaire, fonctionnant sur l’instauration d’un climat de peur dans les populations afin de mieux les soumettre sous une bannière matriarcale. On est à peine dans la SF, on peut aisément imaginer la symbolique sous-jacente.

Alb3 est l’exemple type d’éducation, d’embrigadement, d’asservissement, d’endoctrinement parfaitement réussis. Il connaît son rôle, qu’il va remplir du mieux qu’il pourra en combattant les Bêtes. “Allons zenfants de la Matrie !” Mais l’apprentissage sera long. Pour ce jeune naïf de 16 ans, après l’excitation des débuts viendront les temps des interrogations, des questions, du doute, des révélations, de l’insoumission et de la rébellion. Le rythme de la première partie peut avantageusement suggérer Le désert des Tartares de Dino Buzzati.

La vérité qui un jour va s’offrir aux yeux d’Alb3 sera le fruit d’une rencontre et Marianne Peyronnet nous offre ici une belle variante de Les animaux dénaturés de Vercors, lançant un sujet de réflexion qu’on aurait aimé encore plus développé. Ces 200 pages s’avèrent finalement bien trop courtes, on aurait aimé lire encore… l’apparition de la tendresse, de l’amour, cette belle humanité qui se dégageait du roman et qui, joliment, explosait à la fin… On espère une suite rapide.

Rock on Marianne !

Clete.