Traduction : Denise May, traduction revue et augmentée : Marc Boulet.
On ne présente plus le grand, l’immense, le génial Donald Westlake, alias Richard Stark, alias Tucker Coe, alias Alan Marshall… Il a écrit une centaine de livres et a gagné de nombreux prix littéraires américains et internationaux…
Je suis fan ! Et inconsolable de savoir que c’est fini… Alors je guette… et dès qu’apparaît quelque chose que je n’ai pas lu, je me jette dessus et … au diable le livre que j’avais en cours ! Je me jette littéralement sur les Westlake ! C’est plus facile maintenant que tout est réédité sous son vrai nom.
Alors, voilà, un « Mitch Tobin » que je n’avais pas lu…
Les « Mitch Tobin » sont sortis vers 1970 à la Série Noire sous le nom de Tucker Coe et le premier opus « Chauffé à blanc » a été réédité en 1995 pour le cinquantième anniversaire de la Série Noire, c’est là que j’ai connu Mitch… Rivages réédite maintenant la série des « Mitch Tobin » avec des traductions revues et augmentées, de nouveaux titres et sous le nom de Donald Westlake. J’ai acheté « On aime et on meurt comme ça », la nouvelle traduction de « Chauffé à blanc » pour comparer… Vous êtes prévenus, je suis complètement, totalement, absolument fan !
Revenons à ce « Mitch Tobin », « La pomme de discorde ». L’ancien titre était « Alerte aux dingues » paru en 1970. L’évolution de ces quelques mots de titre illustre vraiment bien l’image que le polar véhiculait à cette époque et les lettres de noblesse qu’il a gagnées depuis !
« La pomme de discorde » donc :
« Depuis son renvoi de la police de New York, Mitch Tobin flirte avec la dépression nerveuse. Aussi, lorsqu’il est interné dans un établissement de soins psychiatriques, peut-on se demander s’il est là en tant qu’enquêteur privé ou en tant que patient… »
Mitch Tobin enquête dans un centre de postcure. Mitch Tobin ne va pas bien, c’est un homme brisé qui n’arrive pas à se remettre de la mort de son co-équipier et qui expie en construisant un mur, il s’est condamné lui-même aux travaux forcés. Il sait également que son attitude blesse sa femme et son fils, il les aime mais ne peut tout simplement pas accepter de retrouver sa vie alors que son co-équipier, lui, est mort. Quand je vous dis qu’il ne va pas bien, c’est un euphémisme… Et c’est cet homme à la limite de la rupture qui va aller enquêter dans un centre psychiatrique. Il est quasiment dans le même état que les patients, mais n’a pas encore basculé tout à fait. C’est lui le narrateur. Westlake s’introduit ainsi en douceur dans l’univers de la psychiatrie de la fin des années 60 : les relations avec la police, la population de la ville…
Pas de théorie psy, tout est amené au fil de l’histoire et on retrouve le ton profondément humain de Westlake. Les pensionnaires du centre ne sont pas des monstres, on comprend comment ils ont pu sombrer dans la folie, ce sont des humains pour qui on a plus ou moins de sympathie, tout comme les psychiatres. L’histoire se déroule à huis clos dans le centre, de manière très classique, on pense à « la maison du Dr Edwardes » d’Hitchcock, à « Shutter Island » de Lehane… Ce n’est pas un Westlake drôle, on se frotte là à beaucoup de souffrance et peu d’espoir.
Mais Westlake sait tout faire : de l’hilarant avec les aventures et mésaventures de Dortmunder, du noir violent avec Parker qui, lui, n’a pas le sens de l’humour, et ici du noir plus psychologique avec Mitch Tobin, ex-flic dépressif… Plus des grands romans plus sociaux comme « le couperet », lucide et glaçant !
Avis aux amateurs donc, s’ils ont loupé la sortie de ce poche : c’est un polar classique mais écrit par Westlake…
Et il y a encore deux livres de cette série à sortir en traduction améliorée, pourvu que ce soit prévu par Rivages !
Raccoon.
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