Traduction: Jean Pierre Carasso.
Très court roman de Jim Dodge publié en 1985 par les éditions du Seuil, ressorti avec malice par les éditions Cambourakis en 2010 et paru également en poche chez 10/18. On peut parler aussi de novella si vous préférez, ou de conte métaphysique ou de fable vaguement animalière ou de récit sur un « néosurvivalisme » n’incluant pas de flingues ou d’attentats sur des buildings à Oklahoma city mais s’accompagnant d’une méfiance voire d’ une hostilité vis-à-vis des lois fédérales et tout ce qui concerne l’administration nationale et le système d’imposition. C’est tout ce que vous voulez mais c’est avant tout une heure voire une heure et demie de bonheur, de tendresse et de rire à gorge déployée à lire cette histoire qui n’en est pas vraiment une mais où on peut y voir beaucoup de métaphores si le cœur vous en dit.
« L’oiseau Canadèche » serait une introduction au roman « Stone Junction » qui a rendu célèbre Jim Dodge puisqu’on découvre ici « Sept lunes » sous la forme d’une réincarnation en sanglier personnage que l’on retrouvera par la suite .
Tout simplement, Titou, orphelin est recueilli par son grand-père excentrique pour que celui-ci puisse résoudre son problème d’impôts non payés depuis des lustres. Ayant eu une vie très mouvementée de joueur de cartes dans les saloons de l’ouest américain que Jim Dodge vous racontera avec son humour charmant et dévastateur et sa verve contagieuse mieux que moi, notamment ses différents mariages très infructueux, Jake (plus de 80 ans au début de l’histoire) qui deviendra Pépé Jake mène une vie pépère dans son ranch à regarder vivre la nature, en buvant son dangereux whisky à 97°(quand même !) qui rend soi-disant immortel, vautré confortablement sous sa galerie quand arrive Titou jeune enfant qui a perdu sa mère et dont Jake se contrefout. Mais le vieil homme a du cœur et même si tout les sépare il va se créer une histoire d’amour fou du vieux pour son petit-fils et réciproquement. Ils vont être rejoints, quand Titou sera devenu un adulte très robuste, par un étrange volatile d’origine canard colvert, semble-t-il. Recueilli par Titou, l’ oisillon va prendre en grandissant une taille et un poids extraordinaires et va devenir le fidèle compagnon des deux hommes accompagnant Titou le matin dans ses tâches dans les champs et cuvant son whisky avec Pépé l’après-midi.
C’est une histoire toute simple qui respire le bonheur mais qui ne pourra se finir sans des moments de tristesse puisque le breuvage fabriqué par Pépé Jake ne peut pas, en fait, offrir l’immortalité. On rit beaucoup, on est ravis par tant de complicité, de gentillesse, de bons sentiments se plaisant à rêver à une vie simple dans la nature où votre environnement proche devient univers paisible où les événements des journées seront prétextes à des éclats de rire le soir venu. Un bouquin pour ceux qui ont envie de lire une belle histoire drôle, un vrai antidote à la morosité ambiante. Suivez la plus grande partie d’échecs du monde, découvrez les effets du whisky « vieux râle d’agonie » sur les néophytes, intéressez-vous au débat critique, épique et dérisoire entre les deux hommes sur l’utilité des clôtures… Un coup de cœur, aussi roboratif que la lecture d’un roman de Drury, c’est dire !
Canardeur.
Wollanup.
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