Traduction : Mathilde Tamae-Bouthon

La science, la dévotion liées au tatouage dans le pays du soleil levant, à la sortie du conflit de la seconde guerre mondiale, culmine à son apogée. L’Irezumi, la pratique de l’estampe épidermique corps entier, attise les convoitises et les fétichistes présentent une fébrilité concrète.

« Tokyo, été 1947. Une femme est retrouvée démembrée dans une salle de bain fermée à clé. Son buste, qui était recouvert d’un tatouage, a disparu. Sa mort est liée à deux autres meurtres : son frère est retrouvé écorché, et son amant est tué d’une balle dans la tête. Kyosuke Kamisu, dit « le Génie », est appelé à la rescousse pour aider la police.

Crime violent, crime parfait dans sa configuration de la chambre close, constitue le St Graal des auteurs du genre. A l’instar de Poe pour « Double assassinat de la rue morgue », de S.S. Van Dine et « L ‘assassin de canari »/ « Le chien mort », ou l’œuvre de Dickson Carr, le personnage principal Kenzô Matsushita passionné de romans policiers se remémore de même le pendant nippon, Mushitaro Oguri, qui éleva le genre à son plus haut degré de raffinement, en particulier dans son chef d’œuvre, « Le crime parfait ». Tiraillé entre sa naïve idylle et son appétence de résolution de l’énigme criminelle, il se voit entraîner dans les méandres d’esprits tortueux incarnés par des personnalités loufoques, exaltées ou viciées par leur passion.

Longtemps le tatouage dans cette société était synonyme d’appartenance à l’organisation Yakuza, ce qui est vrai et d’usage de nos jours, et les alliances impliquaient alors ce passage, ce rite d’impression corporelle. Hors champ esthétique, l’enquête menée par le frère de Kenzô s’empêtre dans un jeu de mikado joué par un Parkinsonien. Un lien d’amitié à propos voit apparaître un personnage hors norme, mathématicien de formation ayant bifurqué vers la médecine légale et une concrète propension à la criminologie, qui infléchira le rythme et les procédés d’investigations vers une partie d’échec. L’analyse minutieuse des pièces du puzzle et des retrouvailles inopinées feront naître une profonde mise en perspective des destinés des protagonistes.

Roman paru en 1948 mais qui aurait pu être écrit de nos jours dans sa modernité de ton et son tableau incluant un Tokyo hanté par les fantômes du second conflit mondial armé, l’auteur décédé en 1995 diplômé de l’université de Kyoto a longtemps exercé comme ingénieur, lauréat du Japan Mystery Writers Club, géniteur de quinze polars à succès.

Thriller, où perversité et fétichisme enfantent une lecture saisissante, envoûtante sous le joug propre à cette culture de codes et de rites.

Soie et Wasabi !

Chouchou.