Ce premier roman de Bob Passion photographe, musicien, globe trotter et  auteur inaugure la collection Vents Noirs de l’éditeur des Bouches du Rhône Vents d’Ailleurs. Et c’est un bien joli coup réalisé avec un roman qui bouscule.

“Vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, en plein milieu des steppes glaciales, Jacques Beauregard, un Belge, fuit les combats depuis Stalingrad. Il croise une colonne militaire allemande qui est bombardée sous ses yeux. Blindés, soldats et chevaux sont mis en pièces. Il découvre que ce convoi escortait un véritable trésor sous forme de lingots d’or… Mécanicien, terrassier, maçon, il construit alors un bunker de fortune à partir de tous les débris matériels et organiques ramassés sur les lieux. Il comprend vite qu’emporter une telle quantité d’or est impossible.

Espérant revenir chercher le magot plus tard, il marque son emplacement en érigeant une statue monumentale, macabre mausolée incluant cadavres de soldats et pièces mécaniques, sans oublier la carcasse d’un cheval et un corbeau.

Une quarantaine d’années plus tard, Jacques vit à Marseille. Vieillissant, presque dément, il est le gardien d’un immeuble aux allures de squat, où vit Pascal, photographe et grand fumeur de haschisch. Le QG du quartier est un bistrot de légende, repaire d’esthètes de l’illicite, d’ivrognes et d’amateurs de psychotropes. Le temps a obscurci les souvenirs de Jacques et ses rares propos intelligibles passent pour les divagations d’un fou, tant ils sont hermétiques. Mais Pascal et sa bande, substances psychoactives obligent, sont toujours partants pour un bon délire…”

Alors la présentation de l’éditeur est longue, c’est certain, mais inévitable tant ce roman fourmille d’aventures lointaines au fin fond de la Russie dans les années 40 comme marseillaises dans les années 80 dans le milieu du hash. Mais vous êtes encore très loin du bout de vos surprises. Bob Passion (pseudo?) a mis beaucoup de cœur pour écrire un roman bien rock voire punk comme l’indique l’éditeur.

“Le cavalier hilare”, un titre qui interroge, et dès qu’on fait connaissance avec le héros et sa situation au milieu de nulle part, on comprend, sans vouloir offenser l’auteur, bien au contraire, que cette histoire aurait très bien pu être écrit avec l’aide d’une très bonne sativa. Le ton est donné, et quand est dévoilé le patronyme du héros, Jacques Beauregard, nom du personnage incarné par Henry Fonda dans le western spaghetti humoristique des années 70 “Mon nom est personne”, plus de doute cette fable va nous faire voyager mais aussi travailler les zygomatiques.

La première partie, particulièrement originale et superbement torchée, laisse des regrets de quitter Beauregard, gentil abruti avéré, perdant de toutes les guerres mais sortant vainqueur de cette terrible odyssée dans la steppe où il a affronté ou plutôt évité les nazis, l’armée russe, les tribus locales, les hordes de chiens errants. Un vrai hall de gare, son coin de désert asiatique. Mais on le retrouve, pas d’inquiétude, encore moins bien dans sa tête, à Marseille 40 ans plus tard, flanqué de Rose une compagne qui n’a rien à lui à envier au niveau dérangement à l’étage supérieur.

Autant Jacques Beauregard était seul au monde en Russie, autant il vit ici, incidemment,  auprès d’une tribu rock, usant et vendant de la bonne fumette et qui le protège de tous ses délires puisque, le cerveau cramé par l’alcool, il s’imagine encore en guerre. Bob passion a dû puiser allègrement dans ses souvenirs pour nous montrer Marseille, les quartiers, des bistrots zarbis, une faune cosmopolite surprenante mais aussi très attachante, raillée avec beaucoup de malice et de tendresse. Voulant aider Beauregard à retrouver la mémoire mais aussi attirée par l’appât du gain la bande de potes va monter une expédition pour retrouver l’or perdu et d’autres produits dont vous connaîtrez la teneur en lisant le roman.

“Le cavalier hilare” part dans de multiples directions mais sans jamais perdre le fil de l’intrigue et ce trip dans les années 80 secoue gravement, charme par ces choix musicaux judicieux et dégage un arôme fort et parfumé particulièrement roboratif à qui veut connaître un bon moment de délire sans aide de vodka à l’herbe de bison ou de THC.

Barré !

Wollanup.

Lien vers un entretien chez Milieu Hostile.