The Border.
Traduction: Jean Esch.
“Art Keller, ancien agent de la DEA, est recruté par le sénateur républicain O’Brien pour participer à une opération officieuse au Guatemala : aider le cartel de Sinaloa, dont la mainmise sur le Mexique assure un semblant de stabilité à la région, à se débarrasser d’une organisation rivale sanguinaire, Los Zetas. La rencontre organisée entre les dirigeants des deux cartels tourne au bain de sang : les trafiquants s’entretuent et le parrain de Sinaloa disparaît. Keller retourne alors au Mexique, où il retrouve la femme qu’il aime, Marisol. Maire d’une petite ville, celle-ci résiste vaillamment aux cartels, malgré la tentative d’assassinat qui l’a laissée infirme quelques années plus tôt. Quand O’Brien propose à Keller de prendre la tête de la DEA, il y voit l’occasion de lutter contre les organisations qui sèment la mort en Amérique. Il accepte.”
Les décharges du Guatemala, les pêcheurs du Costa Rica, le Guerrero et le Sinaloa au Mexique, Mexico, Juarez, Tijuana, Acapulco mais aussi Vegas, la Californie, Washington, New York avec Inwood et Washington Heights au nord de Manhattan et Staten Island, les prisons américaines, les centres de rétention… la zone de guerre s’est étendue.
Don Winslow a déclaré que tout ce qui était raconté dans cette trilogie, inaugurée en 2005 avec “la griffe du chien”, poursuivie en 2016 avec “Cartel” et qui connaît son dénouement cette année, s’est réellement passé et que parfois il a lui-même préféré édulcorer les faits. C’est un monde effroyable que nous montre, nous décrit, nous explique, nous raconte Don Winslow pour la troisième fois et peut-être de manière encore plus aboutie que précédemment.
“La frontière” chère à Trump, démarre au début des années 2010 et se termine au moment de l’élection du promoteur à la Maison Blanche. Il y a deux Winslow, celui qui a écrit et continue encore à produire des polars globalement honnêtes et parfois même d’un goût douteux comme “Savages” et sa suite et… le grand Don auteur de cette exceptionnelle trilogie sur cette guerre contre le trafic des narcotiques: la marijuana, la meth, la cocaïne autrefois, l’héroïne et le fentanyl maintenant.
Une fois de plus, c’est du très, très haut niveau. Il faut parfois s’accrocher, rester bien concentré, le théâtre des conflits s’ est étendu, leur nombre méchamment aussi. Au cours de ces huit cents pages, fleurit un nombre impressionnant d’intrigues qui se recoupent, s’éloignent pour se retrouver en mode sanglant et éprouvant y compris pour un vieux guerrier comme Art Keller, toujours aussi cow-boy et franc-tireur malgré sa promotion à la tête de la DEA.
Nul besoin de lire les deux premiers pour attaquer “la frontière” tout en considérant néanmoins que vous vous privez de deux énormes monuments. “La frontière” lance une nouvelle histoire, une nouvelle apocalypse qui démarre par une guerre entre “los hijos”, héritiers des chefs narcos se disputant l’empire, le territoire, la thune, la came, les femmes…Keller, lui, a compris qu’il ne pourra jamais venir à bout du trafic à partir du Mexique et va s’attaquer ainsi au financement, à l’argent qui circule, à la came qui débarque aux USA, à l’ennemi intérieur.
Don Winslow dévoile toute la constellation narcos, les gamins qui crèvent d’overdose, les nanas en manque qui se vendent, les maras, les sicarios, les victimes de la terreur, les dispensaires, les massacres, la barbarie, la misère, les ateliers de fabrication du poison, les trains de l’horreur pour monter vers la frontière américaine, les territoires, mais aussi les financiers véreux, les banquiers ripoux, le blanchiment des montagnes de narcodollars, les trahisons, les politiques américains et mexicains unis par l’argent sale, les flics corrompus, la géopolitique régionale, l’économie du trafic…
La route vers “la frontière” est longue, difficile, complexe, noyée de sang et de larmes, pavée d’horreur et de mort: huit cents pages sidérantes, époustouflantes au bout de l’enfer.
Drogue dure !
Wollanup.
PS: Et une petite chansonnette à la gloire de Juan Alberto Ortiz Lopez, alias “Juan Chamale”, un gros narco.
Le retour d’Art Keller, bon sang quelle nouvelle !! Je ne vais pas pouvoir attendre…
Ah, il ne faut pas attendre mais il faut aussi être très disponible, c’est très chaud. Du bonheur !
Excellent, votre commentaire du livre. Votre blog l`est aussi, bravo !
Merci Jean !